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MessagePosté: 26 Jan 2013, 01:06 
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Baptiste a écrit:
Je trouve que cette interprétation est tirée par les cheveux.


Tiré par les cheveux? Tu y vas fort.

Ce que tu décris à propos du personnage de Homeland est exactement ce que j'ai ressenti devant la finale de ZERO DARK THIRTY et le perso de Jessica Chastain.

Oui, à un bref moment,
elle lève les yeux vers le ciel, et on peut y voir un sentiment de soulagement et de relâchement dans son visage. Mais ça ne dure pas. Et ce n'est pas aussi simpliste que ça. Le visage finit par se tordre d'une angoisse et d'un vide. Une tristesse surtout. La façon que Bigelow nous montre Chastain devant le cadavre de Ben Laden est symptomatique de son sentiment final. C'est le vide qui prend le dessus. Ta phrase conçernant Homeland s'applique très bien à cette séquence "comme si une crise existentielle guettait le héros maintenant que son ennemi juré est mort."
La manière Chastain est simplement fait de subtilité, et donc plus propre à l'interprétation.

Bon, j'ai la mienne, et tu as la tienne. Mais je ne vois pas en quoi c'est tiré par les cheveux.

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MessagePosté: 27 Jan 2013, 15:27 
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SPOILERS

J'ai pas ADORE le film comme je l'aurais aimé (et comme j'aurai pu), mais j'ai trouvé ça quand même ultra-bien. Le fait de m'être trop monté la tête sur la radicalité du film m'a empêché d'être totalement à fond par moments, me faisant surtout remarquer les tout petits trucs de çi de là qui font un peu cinéma (des trucs comme Maya qui participe à la mission en surveillant la radio pakistanaise à la fin, où les fameux écrans d'ordinateurs qui font "bip bip bip" quand tu zoomes sur un détail de la carte). Mais en y repensant - et c'est un des films auxquels j'ai le plus repensé depuis longtemps - je suis assez ébahi par le jusqu'au-boutisme du film.

Pour le coup je suis avec David Swinton sur ce coup-là. Je trouve ça tellement adulte dans la manière qu'a le film de se dépouiller de presque tout oripeau de poncif: où est la scène aux 2/3 où Maya se confie à quelqu'un et on comprend soudain que son père est mort le 11 septembre ? Où est le regard "lourd de sens" à la fin entre Maya et genre un supérieur qui a toujours douté d'elle mais dans les yeux duquel on lit "You were right all along" ? Où est le memento appartenant au personnage de Jennifer Ehle que Maya porte toujours sur elle et regarde avec tendresse et amertume après que Ben Laden soit mort ?
Fuck all that. Y avait un critiques US, je sais plus si c'est Faraci ou McWeeny, qui disait que le film évitait constamment "the easy version of a scene" et c'est clair que le film va quand même loin dans sa manière de zapper tout ça, de faire arriver et disparaître les personnages de manière hyper sèche, et de jouer à saute-moutons entre des scènes très denses, tout en laissant de grosses ellipses, de gros gaps dans la narration, autant de moments que Bigelow a l'intelligence de laisser le spectateur remplir lui-même.

Tout ça ça rejoint aussi la maturité dans le traitement du point de vue. Dans ces scènes de torture, où le rejet attendu de Maya face à l'horreur va plus tard céder la place à de brèves scènes de waterboarding d'autant plus choquantes qu'elles sont matter-of-fact, presques quotidiennes ; dans le fameux regard final, tellement subtil et fort d'effet Koulechov ; dans l'assaut final, hallucinant de doigté, constamment sur la corde raide (à la fois kiffant, tendu, drôle, cynique, sombre) et dans d'autres moments qui me reviennent pas tout de suite, je suis admiratif d'à quel point, comme dit Swinton, Bigelow accorde une confiance presque aveugle au spectateur. C'est vraiment couillu et brillant.

Pour ce qui est de la torture, je suis pas du tout d'accord. Raisonner comme ça, c'est prendre les spectateurs pour des ordinateurs, c'est réduire les films à juste du scénario pur, à des effets de domino, des relations de cause à effet. C'est faire totalement fi de toute l'humanité du spectateur (et de son intelligence évidemment), de lui laisser le droit de ressentir une tension entre la logique (toute relative quand même) des procédés montrés, et le dégoût que les scènes de torture peuvent lui inspirer. Et le film existe justement dans cet entre deux tout le long, entre la logique/la froidure, et l'exaltation/le kiffant.

Je ferais une petite parenthèse sur les acteurs: outre Chastain, géniale de minimalisme, j'ai adoré Jason Clarke, qui est vraiment bluffant, apportant plein de nuances à son personnage. Par contre j'ai été déçu par la prestation flemmarde de Gandolfini en patron de la CIA, celle de Stephen Dillane, que d'habitude j'adore, avec son accent mid-atlantic mal dissimulé et son oeil torve, et puis j'ai trouvé Kyle Chandler à l'image de son personnage dans KING KONG: pas mauvais acteur, mais presque.

Bref, tout ça pour dire que c'est vraiment super intéressant comme film, super riche.

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MessagePosté: 27 Jan 2013, 22:32 
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MessagePosté: 27 Jan 2013, 22:50 
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Karloff a écrit:
Tiens Zad, viens parler du film

N'empêche, ça m'intéresse.

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MessagePosté: 28 Jan 2013, 01:27 
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MessagePosté: 30 Jan 2013, 00:41 
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2H40 pas inintéressantes du tout...
Autant je trouve pas mal de défauts dans la production, autant Bigelow me passionne pas mal derrière la caméra.

Encore plus que dans Démineurs, je lui trouve une vraie présence durant la majorité des scène avec une certaine marginalité dans le propos. En tant que réalisatrice, elle s'inclut dans un système qu'elle remet néanmoins souvent en cause, sans faire miroiter autre chose, à travers une rébellion hypocrite ou un discours pétant plus haut que la faiseuse qu'elle est, par exemple.
Elle me semble clairement dans la réalité, à savoir un questionnement constant et avoir trouver cela dans la première production US parlant de leur propre vengeance est assez exceptionnel.
Ajouter à cela une bonne qualité de la réalisation, un scénario solide et une excellente Jessica Chastain, on a finalement un très bon film.


Après je ne saurais dire si ce sont des choses que Bigelow n'a su gérer mais des détails m'ont gêné et éloignent le film de l'excellence.


Premièrement, le casting type double téléfilm catastrophe avec la moindre tête connue à chaque nouveau personnage, ça fait vraiment impersonnel et fainéant. Si c'est pour le charisme des personnages, à relier avec l'importance de leur job, ça fait l'effet contraire quand on connaît la majorité des acteurs. (bien placé par contre le français d'Engrenages et Mafiosa)

Ensuite, le scénario est solide mais loin d'être parfait, autant dans les grandes largeurs que dans certains courts intants. L'assault final et sa préparation en sont les meilleurs exemples à mon sens, je ne comprends pas l'intérêt d'humaniser les soldats et de fait la longueur de la séquence (même l'assault en lui-même). Toute cette partie prend trop de place même si elle est bien tendue et parfois jouissive, nottament dans l'amour assez diégétique de Bigelow pour la technique cinématographique liée à la technologie.

Avant cela, durant l'attente de l'opération, j'aurai aimé un scénario ayant autre chose à dire que des répétitions sur Chastain écrivant les jours passés ou celle des scènes sur les attentes de preuves concrètes des hauts placés. Le caractère du personnage de Chastain, c'est aussi un peu un défaut. Si le personnage avait sûrement besoin d'être réchauffé, ses quelques sautes d'humeur trop prononcées me font sortir du réel que veut installer Bigelow (I'm the motherfucker...).

Quand à la torture, c'est bien que le thème soit présent sous cette forme...Mais c'est vaste et soit tu vas dans le sujet complètement ou tu ne fais que l'effleurer. Bigelow essaie l'entre deux mais ça ne prends pas pas trop. Je ne crois pas que les quelques exemples de torture montré soient les pires et l'analogie avec les singes en cage, c'est non surtout en deux scènes espacées.


Pour revenir aux qualités techniques qui en font un très bon film, il y a de bonnes excluvités. La piste puis la découverte de la maison d'Abbottabad font les meilleurs segment puis moments du film, avec beaucoup d'extérieurs filmés et une intrigue qui avance sans avoir à s'expliquer par le dialogue. Les plans des indics devant les routes, c'est génial.

Aussi, la CIA est super bien présentée, on compare beaucoup Homeland mais ça m'a bien plus rappellé Rubicon avec son univers d'analystes aussi froids que compétents, globalement bien plus réaliste que les actuels "mindgame" des créateurs de 24. Le coup de gueule du 2nd de la CIA avec sa cellule secrète, c'est parfait.

4,5/6


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MessagePosté: 31 Jan 2013, 09:13 
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Pour David Swinton et les autres. Food for thoughts.

Dans le topic "Top 10 Criterions films by Nolan", on peut voir que Nolan dit à propos de l'un des films: "it doesn’t tell you what to think—it tells you what to think about."

Ca m'a fait penser à notre petit débat. Et précisément, je trouve que Bigelow malgré les apparences ne nous dit pas ce sur quoi il faudrait réfléchir. Elle ne nous donne pas matière à réflexion, jamais. Elle déroule son programme de description d'une opération d'espionnage, ce pour quoi la CIA lui dit merci.


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MessagePosté: 31 Jan 2013, 11:47 
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Baptiste a écrit:
Pour David Swinton et les autres. Food for thoughts.
Dans le topic "Top 10 Criterions films by Nolan", on peut voir que Nolan dit à propos de l'un des films: "it doesn’t tell you what to think—it tells you what to think about."
Ca m'a fait penser à notre petit débat. Et précisément, je trouve que Bigelow malgré les apparences ne nous dit pas ce sur quoi il faudrait réfléchir.

Je vois ce que tu veux dire, mais quelque part c'est ce que j'aime dans le film, c'est qu'il mette tout "à plat". Scénaristiquement, émotionnellement, moralement. Il évite le piège (facilement évitable quand même) du triomphalisme patriotique (quand je lis Pierre Murat dans Téléramoin qui évoque le raid final filmé comme un grand moment patriotique, je me dis que la merde est dans l'oeil du spectateur), tout en évitant le poncif moral du "Est-ce que ça en valait vraiment la peine ?".

Après je peux comprendre que ce parti-pris soit facilement rejeté, mais je trouve que pour du gros budget sur un sujet tel que celui-là, le film a le mérite d'échapper à toute catégorisation. C'est d'ailleurs pour ça que les trucs que j'aime le moins dans le film sont les moments métaphoriques ou trop signifiants (les singes en cage et le rapport de Dan avec eux, par exemple). On est dans un film qui ne se donne pas facilement et nous (en tout cas moi) interroge sur ce qu'on doit en penser. Je m'exprime pas très bien mais voilà.

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MessagePosté: 31 Jan 2013, 18:04 
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D'accord avec Qui-Gon. D'abord sur les scènes qu'il aime le moins. Ensuite, sur le fait que le film nous laisse nous démerder. Et franchement, je trouve bien plus stimulant de sortir d'un film en me demandant "qu'est-ce que ça voulait dire tout ça" que "ah ouais, c'est un film sur la filiation, sur le deuil, et blablabla". Ça ne sert à rien de discuter sur la couleur bleue, c'est plus intéressant de se demander si c'est réellement bleu.

Bah, en même temps, j'aime pas trop la façon Nolan de nous donner de la réflexion, alors c'est sûr que je ne suis pas d'accord avec sa citation. Sa réflexion sur le "fear" dans Batman enfonce des portes ouvertes. C'est de la réflexion pour la forme, parce que c'est hip. Je préfère la façon Yoda de penser sur la peur :wink:

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MessagePosté: 31 Jan 2013, 18:14 
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MessagePosté: 31 Jan 2013, 20:21 
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Faut le trouver le rapport entre un film de Nolan et celui d'un Bigelow...
Cependant je trouve que la citation s'adapte bien à Zero Dark Thirty. Après, libre à chacun de prendre le "basé sur des faits réels" pour acquis ou de s'interroger comme Bigelow le fait sur presque chaque mouvement US dans cette affaire.

On ne peut pas dire que la CIA soit présentée en contre-plongée. Même Gandolfini sort qu'il n'y pas beaucoup de courage dans son personnel. Son second interpelle son équipe basée au Pakistan qu'il n'y a qu'eux sur l'affaire et pas de mission secrète comme 99% des métrages incluant la CIA aime rendre mystérieuse cette organisation par ce genre d'intrigues à tiroir. L'inutilité assez claire d'agents bien placés (Kyle Chandler ou Jennifer Ehle), aussi représentée par le fait Chastain soit seule. Les moyens plutôt limités pour pister OBL à travers la résignation de beaucoup de monde puis la maison trouvée à moitié par hasard, d'un renseignement venant de l'extérieur ou encore les légers rappels sur les manquements du 09/11.
Le nombre d'attentats montrés entre cette date et la prise d'OBL...

Internationalement, il n'y a pas tellement de films jouant un minimum la carte de la réalité avec leurs organisation d'espionnage, encore moins sur des faits récents. Combien de films tournés pas des réals dits plus marginaux aurait finit sur un plan de la foule américaine en liesse sur Time Square ?

Après c'est un film sur la chasse d'un terroriste et pas sur la politique impérialiste US dont l'enquête fait partie. Sûr que c'est pas l'objectif le plus dur dans le fond, mais est-ce qu'un film plus politisé sur ce sujet serait faisable, en terme de production et de scénario bien informé pour charger directement la CIA sur des faits précis, sans se tromper tel tant de théories conspirationnistes post 09/11 ?


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MessagePosté: 31 Jan 2013, 22:01 
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crevardinho a écrit:
Après c'est un film sur la chasse d'un terroriste et pas sur la politique impérialiste US dont l'enquête fait partie. Sûr que c'est pas l'objectif le plus dur dans le fond, mais est-ce qu'un film plus politisé sur ce sujet serait faisable, en terme de production et de scénario bien informé pour charger directement la CIA sur des faits précis, sans se tromper tel tant de théories conspirationnistes post 09/11 ?


C'est ce que je me suis dit. Déjà que Zero Dark Thirty n'a pas dû être facile à monter. Sortir un film sur la traque de Ben Laden aussi tôt, c'est marcher sur des oeufs. Et déjà là on accuse le film de ne pas coller totalement aux faits. C'est sûr que tout le monde ne sera pas nécessairement content du film. L'important c'est qu'il essaie de faire un portrait juste sans porter aux nues qui que ce soit, mais en se permettant de questionner un peu. C'tait un sacré défi quand même.

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MessagePosté: 03 Fév 2013, 17:24 
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Comme Qui-Gon, j'ai bien aimé le jusqu'au boutisme du projet, la ligne que se donne le film. Souvent, pendant la projection, en regardant la caméra et le non-découpage trembler dans tous les sens, je me demandais pourquoi ça passait tout à fait, quand Argo et cie me hérisse.

Je ne saurais pas dire comment, mais il y a quand même une capacité que j'admire chez Bigelow à "neutraliser" son histoire : neutralisation dramaturgique, neutralisation affective. Non pas par incapacité à investir le film, mais par un travail constant et volontaire de remise à plat. Chastain joue très bien cette "page blanche", ce personnage sans arc narratif autre que le présent de l'action, sans même que le film ait à romantiser son obsession. On peut certes se demander à quel point le projet initial l'aurait fait : entre la quête sans issue (qui trouve la bonne distance mais qui se dilue dans la frustration et le non-événementiel) et l'organisation puis l'accomplissement de l'assaut (gros morceau de cinéma bien plus convaincant), il y a comme deux films différents qui se regardent dans les yeux. Mais avec ou sans Maya, la neutralité persiste.

Il en ressort donc des scènes de suspense très pures, même pas tendues à l'attachement aux personnages : l'arrivée de la voiture dans le camp, le repérage du portable, et bien entendu le final. Comme dans certaines scènes de Démineurs, un onirisme finit naturellement par effleurer de cette neutralité forcée, comme une absurdité du réel. La nuit c'est noir ? Et bien soit, ce sera une scène d'action noir sur noir, pénombre et hagarde, factuellement funèbre (l'image des hélicos, de ce point de vue là, est tout de même assez puissante). Si l'assaut est aussi saisissant, c'est aussi parce qu'à un tel "évènement" est appliquée la même approche si bizarrement neutre, dimension foireuse de l'opération y compris, créant une sorte de grand écart parfois presque burlesque ("Oussama ? Oussama ?").

Certes, l'approche de Bigelow crée un cinéma limité. Je vois mal un vrai grand film sortir de ces mains. Mais le refus du point de vue imposé (d'un "avis") n'empêche pas la possibilité d'un regard (d'une distance précise) sur ces évènements, et ce regard est assez intelligent pour filmer le meurtre de Ben Laden autrement que via une jouissance Call of Duty (et pourtant Dieu sait que ce final reprend la structure d'un FPS), et la torture autrement que dans une logique douteuse de torture porn. Je la comprend pas du tout, cette polémique sur la torture. C'est posé là, lisible, ouvert, longuement mis sur la table dès l'ouverture sans 36 chichis. D'emblée dés-idéologisé, sans aucun regard imposé comme vecteur (sinon celui de Maya, cette page blanche ambulante). Même pas insupportable, ce qui serait une autre façon de soumettre le spectateur en lui foutant la pression. Juste factuelle, là encore.



EDIT : j'ai passé la moitié du film à essayé de me rappeler où j'avais vu la tête du détenu qui coopère.

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Kiarostami-Bigelow, si ça c'est pas du grand écart...


Dernière édition par Tom le 03 Fév 2013, 17:46, édité 1 fois.

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MessagePosté: 03 Fév 2013, 17:46 
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Ce n'est pas une question de représentation que le fait de te dire que la torture a permis la mort de Ben Laden et donc qu'elle est un mal nécessaire.

Ce qui est contraire au rapport de la CIA sur la mort de Ben Laden.


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MessagePosté: 03 Fév 2013, 17:51 
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"Et donc qu'elle est un mal nécessaire", ça c'est ton avis, le film n'impose jamais cette conclusion là - il a même du mal à poser le meurtre de Ben Laden comme une chose forcément nécessaire, donc à ce rythme...

Perso, je savais pas que cela pouvait être factuellement faux (on peut aussi mettre le rapport de la CIA en doute...), et pourtant j'ai pas senti de légitimation (ni de condamnation). Ça reste une question de scénar, de parcours des personnages. La manière dont le film te présente les choses ne t'engage pas à t'en réjouir si tu ne le souhaites pas.

Pour être plus clair : un film qui aurait coupé tout lien de cause à effet possible, potentiel, entre torture et réussite de la mission n'aurait fait que contourner la question. Il n'aurait pas été plus "propre" moralement.


Dernière édition par Tom le 03 Fév 2013, 17:54, édité 1 fois.

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