Bon pour celui-là, j'avais déjà plus ou moins dit tout ce que j'en pensais dans mon avis initial et dans un autre avis juste un peu plus haut là.
Mais reprenons.
Film Freak a écrit:
j'ai jamais l'impression que le récit sert les scènes d'action mais que l'action sert le récit. Un récit sans temps mort, ça dure 2h06, mais tout s'enchaîne très vite. On a à peine le temps de reprendre sa respiration de la situation nerveuse d'avant.
Ca c'est très vrai.
On est encore une fois dans une approche totalement différente, sorte de course effrénée contre la montre. T'as presque l'impression que c'est en temps réel.
Le film est clairement de la génération 24/Alias, même si je n'ai jamais vu dans ce film ce que d'autres qualifient d'un péjoratif "ça fait télé", surtout quand les arguments sont "gros plans et caméra portée". C'est plutôt dans l'écriture que je retrouve l'expérience de la petite lucarne d'Abrams au travers d'un récit super compact. Tu sens l'habitude du mec qui doit condenser un max de choses en 42 minutes. Là il a beau en avoir 126, c'est plus speed que n'importe quel épisode de ses séries.
Citation:
Et nerveux, ça l'est. Ma plus grosse surprise, c'est de constater qu'Abrams a un style bien à lui, plutôt défini.
Cette volonté de rendre une scène hystérique sans dépasser la limite...toujours borderline...la toute première scène en est un bon exemple...ce crescendo en caméra à l'épaule qui va jusqu'à atteindre l'épilepsie...
Elle est vachement bien cette scène putain...
Alors ok, c'est une astuce un peu facile, héritée de la télé là aussi (où le prégénérique doit accrocher le spectateur pour qu'il ne zappe pas durant la pub qui arrive juste après la séquence) mais c'est un outil remarquablement utilisée par Abrams pour annoncer la couleur. C'est peut-être ces fameux gros plans, mais je trouve qu'on est tout de suite plus proche de l'humain, et ce dans tout le film. Malgré les cascades improbables, y a une dimension humaine relativement absente de ces deux prédécesseurs. Le De Palma était une ode à l'intelligence, le Woo une manifestation d'hormones, le Abrams c'est l'humain.
Ethan n'est plus l'enfant trahi du 1 ou l'ado jaloux du 2, il est l'adulte qui cherche à concilier l'amour et le travail (Alias style), en quête de l'innocence perdue symbolisée par Julia, en quête d'une famille. Thématique abramsienne commune à ses 3 longs métrages.
Pendant longtemps, je me suis interrogé sur le relatif manque de vrais
money shots dans ce film alors que j'aime beaucoup ses scènes d'action.
Le bordel de la poursuite en hélico entre les éoliennes tandis que Lindsay est en train de caner, c'est fabuleux...et la scène du pont est une démonstration exemplaire de gestion du décor, de l'espace.
Mais y a pas vraiment THE plan qui se dégage de ces séquences (allez, le coup de l'explosion qui projette Cruise, en hommage au 1, si on veut).
Et en fait, j'ai réalisé aujourd'hui en le revoyant à quel point ça entrait finalement totalement dans la démarche d'Abrams qui, malgré la démesure de ces séquences, parvient à donner l'impression que ça reste "terre-à-terre".
Je me rends compte que c'est ce que je dis plus haut d'ailleurs.
Citation:
j'adore les set pieces super bourrins mais paradoxalement terre-à-terre
On est plus du tout chez Woo, où l'action est surdécoupée en multiples ralentis qui décomposent chaque acte valeureux comme une action de match de foot.
On reste ici dans une sorte de linéarité supra efficace où tout doit speeder, aller de l'avant, vite, vite vite! Pas le temps pour un
money shot qui fait le beau.
Ca aussi ça participe à l'humain. On dira ce qu'on veut sur Cruise et comment il fait soi-disant son show mais faut être honnête, on est quand même loin du festival du 2. Là tu sens le mec mis à mal, en retard, qui bataille...c'est sûrement celui des trois films où il "galère" le plus.
Nan, vraiment, Abrams a approché le truc de manière réfléchie. Et personnelle.
J'aime particulièrement aussi la direction de la photographie.
Citation:
C'est presque "sale".
Attention, l'image est léchée hein, c'est supra soigné, mais cette abondance de vert, de rouge, de jaune et de noir...une fois de plus, il y a comme une saturation contrôlée...ça énerve la rétine. Dans le bon sens.
Mais grave, c'est presque abstrait cette avalanche de couleurs qui contamine tout. On est plus du tout dans une photo contrastée comme dans le 1 (et même le 2).
Citation:
Et surtout, j'aime le style d'Abrams, super nerveux, super crade, cette caméra qui ne cesse de bouger, ce récit qui ne cesse d'avancer, l'image tantôt granuleuse, tantôt super léchée, mais toujours chargée, toutes ces couleurs qui saturent...c'est bouillant.
Ce côté dégueulasse, plus dark, se retrouve dans l'action...une charge dans le cerveau, un défibrillateur oblige, un oeil révulsé...c'est moche.
C'est pas glamour.
Ca je m'en lasse pas. La mort de Lindsay, en sueur, les cheveux collants à la gueule, l'oeil révulsé et crade...c'est plus Thandie Newton qui se fait une petite piquouze.
Citation:
On est quelque part dans l'univers underground d'Alias mais avec les couilles d'un 24. Ici, quand ça torture quelqu'un, c'est plus "Oh là là, Vaughn, tu as fait craquer l'articulation du petit doigt de ce méchant, c'est pas bien, je devrais écrire un rapport...mais je t'aime".
Ici, ça y va cash.
Oui, il y a de la vraie cruauté là. Là aussi, Hunt a évolué depuis le premier film.
Influence de Jack Bauer ou pas, tu sens un mec VENERE, à bout. Il crie, il chiale, il tabasse.
Et en face aussi, c'est pareil.
C'est même pire. Meilleur bad guy des trois films, je pense en fait.
Phelps était plus ou moins réglo. Bon la mort de Jack est un peu trash, c'est vrai, mais il ne se salissait pas les mains. C'est un papy de la Guerre Froide.
Ambrose était un chien fou. Il tuait à tout va et se bastonnait quand il fallait mais reste un guignol en mal d'amour au fond.
Owen Davian il rigole pas lui. Il est tout fat et tout mais il prend les choses en main, il torture lui-même, et il se tape aussi s'il veut MAIS tu sens le mec DANGEREUX rien que quand il PARLE (d'ailleurs, c'est sans doute le mieux dialogué des trois films).
Citation:
j'adore même les dialogues, Hoffman et Fishburne en gros connards
Fishburne est très bon en nouveau Kittridge (là où Hopkins était classe en simili-M mais limité à un cameo).
L'autre bienfait du passé d'Abrams dans l'écriture de série, c'est qu'il sait construire des univers.
Ethan Hunt, c'est un peu comme Rocky, à la fin de chaque film, il raccroche. Mais celui-ci présente un double statut un peu bizarre. D'un côté, la saga aurait pu se conclure sur cette image (un peu niaise) d'Ethan et Julia, souriants main dans la main...
...et de l'autre, Abrams semble créer une nouvelle mythologie (on montre davantage la hiérarchie chez IMF, création du perso de Benji Dunn) tout en embrassant à fond la mythologie pré-existante, qui se voit alors donner ses lettres de noblesse geek (géniale séquence de la création du masque).
Toute la scène du Vatican est aussi assez réjouissante dans son exploitation de l'équipe, et là aussi c'est sans doute celui des trois films qui donne le meilleur rôle à l'équipe. Il y a une vraie complémentarité (même si je pense qu'on peut faire encore mieux, avec des rôles plus définis encore). Jonathan Rhys Meyer et Maggie Q existent mille fois plus que Billy dans le 2.
J'aime beaucoup aussi la simplicité des gadgets et l'humour qui tourne autour des concepts de la série et de la franchise (le message de la mission caché dans un appareil photo jetable, la spécificité non-sensique du texte à lire pour créer l'empreinte vocale, le McGuffin assumé qu'est la Patte de Lapin, la séquence d'infiltration à Shanghai à moitié ellipsée avec diversion à base de balles de base-ball).
Film Freak a écrit:
je me rends compte que j'aime de plus en plus le film à chaque fois que je le remate...
Je confirme.
En relisant mon premier avis, j'avais oublié que j'en parlais comme d'une surprise et comme d'un film qui n'était pas "LE truc mémorable".
C'est pas ce que je dirai aujourd'hui.
5/6