Chef-d'oeuvre.
Film Freak a écrit:
J'ai récemment déclaré dans la shoutbox tout mon amour pour ce film culte de mon enfance, adolescence et adultence, sans doute mon préféré de Verhoeven pour son scénario de SF riche et malin mélangé à de l'actioner '80s ultron-bourrin à base de figurant sur l'escalator qui prend méga-cher et de bras sectionnés ("On s'verra à la fête, Richter!"), de mec avec une main de mutant dégueu qui se fait perforer (et the punchline hurlée teutoniquement : "SCRRROOO YOOO!!!!"), de noms de persos géniaux (Cohaagen, Hauser, Richter, Kuato), de réveil érotique avec Sharon Stone (l'un des mes premiers émois) avant la télé-fenêtre-écran, de mannequins bien faits (Schwarzie qui s'enlève l'émetteur du nez) et mal faits (Schwarzie qui enlève son "masque" de bonne femme), Lionel Jospin en sidekick de Michael Ironside, les bruits MEGA-EXAGERES des os cassés, les maquettes de Mars, l'abus grandguignolesque de la suffocation exorbitante...et la femme à trois seins...
Nan mais voilà, il a trop de détails que j'adore dans ce film.
Et du coup, en le revoyant dans le contexte de cette rétro, ça m'a permis de saisir davantage l'approche de l'auteur sur ce film que j'aurais pu jusqu'à présent considérer comme l'un de ses moins personnels...
Art Core a écrit:
C'est d'ailleurs vraiment là que le film est excellent dans tous les petits détails subversifs qu'a su insuffler Verhoeven, cette ultra violence (le bouclier humain !), ce sous-texte sexuel permanent (Schwarzenegger qui arrête pas de se prendre des coups dans les couilles), ces effets spéciaux à la fois crados et bluffants.
Je crois que c'est Cosmo qui m'avait dit jadis que le fait de prendre Schwarzie était quelque peu contre-productif vis-à-vis de l'ambigüité que le film cherche.
Et pourtant, je crois que c'est précisément le projet. Ici, la satire n'est pas aussi ostensible que dans
Robocop, elle réside dans la déconstruction en douce(ur) des codes du blockbuster. Bob McClane de chez Rekall résume le truc quand il dit
"je vais pas vous gâcher la fin mais vous tuez les méchants, vous choppez la fille et vous sauvez la planète". Il fait ça pour vendre son forfait "agent secret" des "vacances loin de soi" (quelle idée géniale putain) mais il cingle aussi les clichés du genre. Et qu'est Arnold si ce n'est un cliché ambulant.
Du coup, il ne cesse de le mettre à mal. Littéralement donc, avec tous ces coups de pied dans les couilles qui l'émasculent, mais aussi en le ridiculisant, le torchon autour de la tête, le déguisement de grosse dame (et même après avoir enlevé la tête, il a toujours les gros nichons et le gros cul) et même la vision à rayon X qui le réduit à une image absurde de squelette avec un gun.
Une fois de plus, après
Robocop, on a le beurre et l'argent du beurre : au premier niveau de lecture, un
actioner SF (et Verhoeven a plus d'aisance, financière sans doute mais également acquise avec l'expérience, sur les scènes d'action), au second, un détournement.
On est pas loin du
Quatrième homme, qui invitait déjà à rire de la paranoïa onirique du protagoniste qui se voyait dans un film noir.
Et comme pour le précédent, il réussit les scènes "sérieuses" comme tout ce qui touche aux mutants, la gamine voyante, Benny qui révèle sa main, et l'apparition de Kuato! J'ADORE sa voix en anglais, une vraie redécouverte car la VF lui a donné une voix de créature dégueue alors qu'en VO, il a une voix douce de sage.
Et bim, après, une naine avec une mitraillette. Sacré Paulo.
Mufti a écrit:
Bon esthétiquement, comme je le disais dans le top Cameron, ça a très très mal vieillit... La photo, les couleurs, les décors
Cosmo a écrit:
Néanmoins, déjà à l'époque le film avait une photographie bizarre. Là où Cameron choisissait d'assombrir les scènes de Terminator, cachant ainsi ses effets-spéciaux, Verhoeven film le tout en plein jour et ça donne parfois des trucs chelous (les fausses têtes de Scwarzie). Ca donne au film un certain cachet, mais je peux comprendre ceux qui le trouvent vieilli.
Mickey Willis a écrit:
J'avais trouvé ça un peu.. ridicule.. en fait. kitch.
Marlo a écrit:
Je crois que c'est, plastiquement parlant, l'un des films les plus laids que j'ai vu. Ce côté suréclairé, cette fadeur dans les textures, ces vilaines nuances de gris et de rouge, m'ont rappelé les débuts du jeu vidéo 3D, avec ses textures lisses et fades et son absence d'ombres, et même tout un pan du jeu vidéo en 2D isométrique - je pense à "Fallout" bien sûr, dont une des inspirations est, d'après ce qu'on m'a dit, le cinéma de Verhoeven, et en particulier ce film. Je ne peux pas croire que tout ceci est volontaire. On pourra me dire que c'est parce que c'est daté, mais non, encore une fois, le film date de 1990, je veux bien qu'il subisse le poids des années 80, mais pas à ce point-là. Cette laideur plastique s'accompagne d'une débauche de vulgarité, dans les maquillages, dans les masques, ridicules, dans les costumes (accoutrement ridicule de Schwarzy !), ...
Art Core a écrit:
Il faut dire que le film est assez laid dans l'ensemble. Je me faisais la réflexion que c'est vraiment le point faible des films de Verhoeven, son chef op de l'époque, Jost Vacano, qui était vraiment pas inspiré.
Film Freak a écrit:
Tom a écrit:
j'ai vraiment le sentiment que Verhoeven assume et exploite complètement la laideur de ces années-là (qui sont déjà derrière lui), qu'il en fait un élément de son film : par exemple, dans les échanges du couple au tout début du film, j'ai l'impression qu'on explore la vision du couple telles que les pubs et certains films ont pu la définir durant cette décennie. Entre la laideur et la vulgarité traînante de la situation initiale, et la laideur exhibée et soulignée des bas-fonds de Mars, il y a un face à face fertile.
Tout à fait d'accord, pour moi le film a une patine volontairement "terne", "sale" et vulgos. Même Robocop, c'est dans ses tons-là. Et je suis pas sûr que ce soit tant derrière lui (Starship Troopers c'est pas particulièrement léché...je me rappelle avoir enquillé un jour des séquences d'Armageddon avec des scènes de Starship, ce dernier avait l'air d'un film français à côté).
Je confirme, on est dans la continuité de
Robocop. Verhoeven continue de faire de l'anti-
Blade Runner dans ses visions du futur. Pas de belles ziggourats et de lumière feutrée mais du brutalisme à tous les niveaux. En le revoyant ce soir, j'ai compris pourquoi j'accrochais à l'esthétique dépouillée de
Tenet.
Art Core a écrit:
Oui pour le scénar malin même si je trouve dommage de vendre presque la mèche avec
Ah c'est marrant, moi j'aurais tendance à dire que c'est l'inverse.
Et sinon, oui, scénar génial, avec des rebondissements bonnards (le mec de la pub Rekall qui vient en mode
Inception/Matrix lui dire
"t'es en train de rêver, prends cette pilule") et tout plein de twists (Hauser avait tout prévu depuis le début, albataaaaaar).
Anyway, c'est encore et toujours mon Verhoeven préféré.