1 -
Le Guépard (Luchino Visconti, 1963)
C'est aussi une découverte de cinéaste, puisqu'aussi étrange que cela puisse paraitre, ce fut mon premier Visconti.
J'attendais de pouvoir le voir sur un grand écran et en haute définition. Grosse claque évidemment, la dernière demi-heure est déchirante.
2 -
French Cancan (Jean Renoir, 1954)
Je redoutais un peu le côté tagada tsoin tsoin vieille France argotique avec ce p'tit père de Gabin, mais le rythme effréné fait largement passer la pilule et donne même envie de prendre son carte au Parti Pétainiste à la fin.
Je me demande si ce n'est pas le classique le plus américain de tous les classiques français. Le sujet est franco-français, la forme et l'écriture, pas du tout. Ca ne préfigure pas la nouvelle vague et c'est bien plus enlevé que l'essentiel des moisissures produites en France dans ces années-là ... Ça répond ici directement au cinéma américain contemporain, à tel point qu'on se dit parfois que le film est réalisé par Minnelli ou Donen. C'est une folle ode au spectacle, au rythme effréné, conduite par le personnage de Gabin, véritable animal ne vivant que pour l'entertainment. Le film se termine par une demi-heure ininterrompue de spectacle enchanteur, entre des chansons de cabaret (truc qui me gave habituellement mais qui là passe tout seul), la chanson "La complainte dans la butte" et bien sûr le spectacle de french cancan. Toute la salle s'emballe, danseuses comme spectateurs, qui se mélangent dans un festival de couleurs. Le spectacle, orgasmique, réconcilie tout le monde et efface les peines d'amour et tracas accumulés tout au long du film. Vraiment splendide.
Sur le podium de mes Renoir préférés après
Une partie de campagne et
Le Fleuve pour le moment, même si j'en ai vu peu.
3 -
César et Rosalie (Claude Sautet, 1972)
Pas mon Sautet préféré (je préfère
Les choses de la vie et
Vincent François Paul et les autres) mais c'est tout de même un des plus beaux triangles amoureux que j'ai vu.
Peut-être le plus grand rôle de Montand aussi, impressionnant dans le rôle de douchebag au profil psychologique
ESFP le plus véridique de toute l'histoire du cinéma.
4 -
Ma nuit chez Maud (Eric Rohmer, 1969)
Le meilleur film de Noël à propos de Blaise Pascal tourné à Clermont-Ferrand.
5 -
Un témoin dans la ville (Edouard Molinaro, 1959)
Je ne pensais pas voir un film comme ça dans le cinéma français un jour, surtout signé par l'auteur de La cage aux folles ou Hibernatus. Le pitch : un bourgeois arrogant habitant Neuilly tue sa maîtresse. Le mari de sa maîtresse (Lino Ventura) décide de venger sa femme en le tuant. Il est vu par un chauffeur de taxi et se met donc à le poursuivre pour le tuer lui aussi. Ce n'est ni plus ni moins qu'une cavale meurtrière d'1h25 donc, vraiment sèche, très rythmée, avec des scènes vraiment cash (morts très violentes, dénuées de pathos), comme si c'était la reconstitution d'un fait divers. Lino Ventura, brillant, incarne un homme violent, très froid, antipathique, comme déjà mort, mais qui parvient tout de même à susciter notre pitié. Face à lui, un chauffeur de taxi, qu'on voit avec sa copine dans son petit appartement parisien, ou dans les bureaux de son entreprise. On sent l'envie de Molinaro de représenter le plus fidèlement possible, avec un aspect presque documentaire, ce petit monde des taxis, de décrire de fond en comble son univers. D'une certaine manière, on a droit 20 ans plus tôt aux scènes entre chauffeurs vues dans Taxi Driver ! Le Paris nocturne est superbement filmé, dans ses rues ou son métro (où on y voit une superbe scène de filature), toujours avec un vrai dynamisme et une inventivité constante.
Certainement le polar français réaliste le plus dénué de mongoleries, le plus sec, que j'ai vu.
Je le recommande à QGJ, Film Freak ou Z, qui devraient trouver ici ce qu'ils ne trouvent pas dans la multitude de polars ou thrillers français actuels qu'ils vont voir !
6 -
De bruit et de fureur (Jean-Claude Brisseau, 1988)
Brisseau tente un milliard de choses dans ce film. Il en rate la moitié (toutes les incursions du fantastique, par exemple), mais ce n'est pas grave tant le film est fascinant jusque dans ses ratages. C'est excessif, outrancier, hilarant, hyper violent, et ça ne ressemble à rien d'autre (mélange de film social, de naturalisme à la Pialat bien bourrin, de film de genre à la Charles Bronson, et de fantasmagorie cheap teintée d'érotisme de téléfilm M6). La cité est ici un vrai cauchemar urbain, magnifié par Brisseau.
Et puis Bruno Cremer est fantastique en vieux truand anar maniaque des armes.
7 -
Le Fugitif (Andrew Davis, 1993)
Je triche un petit peu car je l'avais déjà vu. Mais c'était à un âge où je ne m'intéressais pas du tout au cinéma. Je ne me souvenais plus que de quelques bribes du film.
Eh bien, que le film rend nostalgique sur cette période où les plus gros films américains pouvaient être des polars ! Ici, le gros du budget du film est dédié à une collision entre un train et un bus, à une merveilleuse cascade (la fameuse scène du barrage) et à de longues scènes dans les décors naturels de Chicago. Les petites rues, l'hôpital, la banlieue triste, le défilé de la Saint-Patrick ... Rares sont les films qui investissent aussi fortement le décor urbain.
On a en plus de cela droit à un vrai héros auquel on s'attache vite dans sa quête de vérité et surtout à un fantastique "méchant", un vrai chien flic interprété par Tommy Lee Jones dont c'est à mon sens le meilleur rôle. L'intrigue est prenante, pleine de rebondissements et d'idées géniales.
Un des meilleurs films policiers de ces 30 dernières années pour moi.
8 -
Millennium Mambo (Hou Hsiao-Hsien, 2001)
Je n'avais encore jamais rien vu de HHH, étant l'opposé de Karloff sur l'appréciation du cinéma dit contemplatif. Finalement, j'avais tort. Déjà, c'est contemplatif mais jamais creux ou simplement esthétisant, c'est assez rèche et HSS cherche vraiment toujours à rendre son film incarné, habité. Ensuite, malgré la dureté du film, il y a toujours une belle atmosphère nocturne ouatée, pleine de douceur, proche de ce que j'imagine pour les nuits taïwanaises ou hong-kongaises. Le film m'a plongé dans une douce torpeur, sereine et quiète. Je sais que je voudrai maintenant ressentir la même chose dans mes dernières minutes de vie avant mon euthanasie dans une luxueuse clinique suisse proche du Lac Léman. On est bien.
9 -
Les guerriers de la nuit (Walter Hill, 1979)
J'ai mis du temps avant de le voir, redoutant un film trop marqué par les années 70 et aujourd'hui irregardable. Or non, comme
Orange Mécanique, le film puise dans les pires travers esthétiques de son époque pour accoucher d'un univers intemporel (tout en parlant on ne peut mieux de son époque, et plus précisément ici du New-York pré-Giuliani). Très bon.
10 -
La nuit américaine (François Truffaut, 1973)
Le film m'ennuie quand Truffaut nous balance ses dialogues habituels pas très finauds sur le cinéma ou les femmes. Quand il s'intéresse à sa mise en scène ou à ses acteurs, c'est tout de suite mieux. Grosse alchimie entre Léaud, Jean-François Stévenin, Nathalie Baye (toute mimi ! je ne l'avais même pas reconnue) et Truffaut lui-même, tous excellents. Côté forme, c'est le plus beau film de Truffaut que j'ai vu. Je comprends enfin la passion de Desplechin pour son cinéma d'ailleurs. Même si leurs thématiques et préoccupations sont bien différentes (d'où la passion que j'ai pour Desplechin et que je n'ai pas pour Truffaut), on sent ici une vraie filiation dans la forme. On est dans une sorte de naturalisme maniéré, avec mouvements de caméra (parfois référentiels), ruptures de ton fréquentes, inserts, jeux de montage, ... C'est inventif mais jamais trop voyant ou péteux, c'est toujours au service du récit, de la narration. Le film est dynamique et enlevé, parfois franchement virtuose. Superbe partition de Delerue aussi.
Ensuite j'ai vu pas mal de choses bien mais pas suffisamment pour être dans ce top 10 (
Chungking Express,
Presque Célèbre,
WarGames,
Prisoners,
Le vieux fusil, ...).
Quand au pire film découvert cette année :
Spinal Tap. Énorme incompréhension. Pourtant, j'aime beaucoup Rob Reiner. Je crois que c'est le combo heavy metal + mockumentary qui m'a tué ... Je n'ai pas esquissé un seul sourire.