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MessagePosté: 10 Juil 2021, 01:11 
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Dès la première séquence, Verhoeven appose inévitablement sa patte, quand un miracle invoqué par une petite fille semble se produire et que le divin se manifeste via une fiente de moineau. Par ce gag scato, le cinéaste annonce la couleur et son programme exposant par une grossièreté assumée associant le firmament à quelque chose d'aussi médiocre la farce qu'est la foi mais aussi la matrice dans laquelle se forge sa protagoniste, croyant autant à une entité supérieure qu'à elle-même. Et c'est peut-être là son seul véritable péché. Mais un mensonge en est-il un si l'on se ment à soi-même? Surtout dans une institution où tout n'est déjà que jeu et hypocrisie? Véritable thriller politique, Benedetta garde habilement l'ambiguïté jusqu'au bout, porté par une héroïne dans la droite lignée de la Nomi Malone de Showgirls et la Catherine Trammell de Basic Instinct, déjà deux femmes en quête de pouvoir dans un monde d'hommes.

Deux scènes en particulier semblent renvoyer directement à chacun de ces thrillers érotiques susmentionnées de Verhoeven mais Benedetta, malgré son parfum sulfureux de saphisme au couvent, ne cherche jamais à marcher sur le même terrain. Adaptant un ouvrage écrit par une femme et s'adjoignant les services d'une directrice de la photographie, le metteur en scène adopte un autre regard, défait de toute objectification, mais l'ouvrage témoigne de son point de vue à chaque instant. Comme dans La Chair et le sang, l'Eglise est dépeinte comme corrompue par les mêmes bassesses dont l'humain est capable. Cupide, opportuniste et surtout prompte à la fiction, comme l'illustre cette première scène montrant Benedetta adulte en pleine représentation théâtrale. Si la mise en scène est permise pour servir le prêche, qui est en droit d'interpréter une vision comme authentique ou comme affabulation? Dans un premier temps, Verhoeven montre ces apparitions au spectateur comme si nous étions la nonne mais exacerbe leur caractère factice par une esthétique délibérément kitsch. Par la suite, bien que le jeu opéré par Benedetta apparaît plus trouble, le doute demeure sur ce que la jeune femme croit vraiment.

Une chose est sûre, dès lors que l'arrivée de Bartholoméa éveille son rapport à ce corps qu'on lui dit de haïr, parce qu'elle chie sans pudeur et se montre nue, Benedetta croit en elle. Plus qu'une libération sexuelle ou que l'homosexualité, qui paraît d'ailleurs plus opportuniste ou par défaut qu'autre chose, quand la sœur goûte au sexe, elle goûte surtout le sien. Sa propre cyprine semble l'enivrer davantage qu'un désir pour Bartholoméa qui devient de plus en plus accessoire à la satisfaction masturbatoire de sa supérieure. Benedetta se dit épouse de Jésus mais elle porte les stigmates, parle avec Sa voix et suit Son parcours. En un sens, Verhoeven utilise cette figure qui a réellement existé pour raconter la même chose que dans son livre sur Jésus : une démystification explorant l'humain derrière le prophète. Selon son ouvrage, Jésus a existé mais était un simple leader politique. Comme Benedetta en somme, manipulant la foi pour accéder au pouvoir. Un chemin de croix vers l'émancipation mais aussi un miroir aux alouettes. Tel est le constat ambivalent de Verhoeven sur notre monde de pécheurs et pécheresses.

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MessagePosté: 10 Juil 2021, 06:57 
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Et sinon c'est bien :mrgreen:


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MessagePosté: 10 Juil 2021, 08:13 
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ya des nichons ?


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MessagePosté: 10 Juil 2021, 08:54 
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6, si l’on compte ceux de Guilaine Londez (dont un très abimé).

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MessagePosté: 10 Juil 2021, 10:27 
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Sir Flashball
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Mr Degryse a écrit:
Et sinon c'est bien :mrgreen:


Vraie question.
Je veux pas lire la critique avant d'avoir vu le film.

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"Je vois ce que tu veux dire, mais..."
"Je me suis mal exprimé, pardon."


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MessagePosté: 10 Juil 2021, 10:57 
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Film fragile qui peut facilement sombrer dans le ridicule pour peu qu’on n’adhère pas au propos ou aux visions du cinéaste (en témoignent les rires embarrassés dans la salle). Pour ma part j’ai adoré, avec deux ou trois réserves (le jeu des deux actrices principales dans certaines scènes - mais probablement volontaire vu à quel point le film cherche la naïveté et le premier degré).
5/6

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MessagePosté: 10 Juil 2021, 16:16 
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Projet étonnant et dense qui prends les acquis de Elle pour les transposer dans un mix entre Basic instinct et La chair et le sang. Assez touchant de voir un Verhoeven baroque qui n’hésite pas à flirter avec le ridicule (les visions de Jésus et les possessions) pour arriver à un film qui arrive à la fois à être le passionnant portrait d’une époque où règnent la peste et l’obscurantisme et celui d’une religieuse avide de pouvoir et manipulatrice au possible. C’est évidemment transgressif au possible, ça oscille entre la farce, la croyance et la folie, ça reste toutefois un peu moins bluffant qu’un Elle même si Benedetta reste de l’excellent Verhoeven.

4,5/6


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MessagePosté: 12 Juil 2021, 09:16 
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Le film est en effet un peu fragile, pas tant pour moi au niveau de l'interprétation mais plus au niveau visuel, le film est limite cheap, avec ses quelques ciels numériques dégueulasses et ses 30 figurants. La mise en scène de Verhoeven est assez plate également, je m'attendais à un peu mieux, Elle me semblait plus tenu à ce niveau là.

Mais à part ça j'ai pris un plaisir quasi total et constant. J'aime tellement cette approche frontale, sans détour, avec toujours cette vulgarité assumée (le film commence par une chiure d'oiseau et un spectacle d'un mec qui enflamme ses pets). Et cette fois j'ai eu le sentiment qu'au cynisme habituel se substituait une véritable sincérité face à son personnage principal. Évidemment il n'est pas dupe, Benedetta se construit sur un délire érotomane autocentré mais son regard sur elle est plein de compassion et d'une forme d'amour. Comme s'il était normal qu'une enfant promise à Dieu depuis sa naissance et privée de la liberté de jouir de son corps se transforme en une prophétesse qui en vient à appeler au meurtre.

Efira est géniale, le film a un petit coup de mou au milieu et s'avère moins sulfureux que sa première partie laisser penser. Mais ça n'enlève rien à la puissance du film, à ce côté étonnement "nunsploitation" qui assume un aspect presque exploitation. Verhoeven confirme qu'il est inestimable.

5/6

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CroqAnimement votre


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MessagePosté: 12 Juil 2021, 11:31 
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[Sinon, je viens d'apprendre qu'avant ce film, une autre adaptation de Djian était évoquée... Dommage]

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MessagePosté: 12 Juil 2021, 23:36 
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Antichrist
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ça m'a fait penser à Jeanette


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MessagePosté: 14 Juil 2021, 20:44 
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Inscription: 30 Déc 2015, 16:00
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Castorp a écrit:
Mr Degryse a écrit:
Et sinon c'est bien :mrgreen:


Vraie question.
Je veux pas lire la critique avant d'avoir vu le film.

Tout dépend de l'importance de la politique des auteurs à tes yeux. J'ai beaucoup pensé à Femme Fatale de De Palma pendant la projection.

Énorme déception me concernant, j'avais adoré Elle et attendais donc beaucoup de ce Benedetta (malgré mon aversion pour Efira), les retours cannois étaient très positifs, je ne m'attendais pas à ça... alors oui je peux concevoir que certains aient apprécié, c'est indéniablement un film de Verhoeven, thématiquement il coche toute les cases du féminisme et de la perversion d'un système propre à son cinéma, mais c'est aussi plus que jamais un geste jusqu'au-boutiste. Parce que j'ai tout de même vu une différence majeure avec toutes ses œuvres passées, où Verhoeven procédait systématiquement de la stratégie du ver dans le fruit, à savoir qu'il prenait à bras le corps un genre, et le pervertissait progressivement et en profondeur, tout en respectant toujours le genre dans lequel il s'était placé. Ici à l'inverse il fait fit d'emblée de tout respect à l'égard des genres (du film médieval à la nunspoiltation), et il n'est évidemment pas anodin que le film commence par cette fiente d'oiseau qui vient aveugler (parce que le mec est borgne) le vilain. Si Carax est le Deus ex-machina d'Annette, Verhoeven aurait lui pu endosser le rôle du pétomane sur lequel le film s'ouvre, tant Benedetta ressemble à un long pet lâché à la tête de ses spectateurs. D'ailleurs s'il y a bien un point sur lesquels je rapprocherai ces deux réalisateurs et leur dernier film, c'est la mégalomanie qui m'a semblé les habiter, comme si l'œuvre comptait finalement moins que ceux qui les avaient fait et le message qu'ils voulaient nous faire passer.

Parce qu'avec Benedetta, il faut tout de même être prêt à franchir allégrement les frontières du ridicule (ce que - je n'ai guère de doute là-dessus - Verhoeven a sciemment orchestré), et ce sur absolument tous les points, comme si un sujet que le réalisateur considère comme grotesque ne pouvait être traité que sous une forme elle-même totalement grotesque : photo hideuse, jeu d'acteur oscillant entre le cabotinage outrancier (Wilson) et le totalement à côté de la plaque (Efira, même si je reconnais ne pas être objectif, mais qui m'a rappelé Nomi Malone dont on ne me fera pas croire que Verhoeven l'avait choisi pour ses talents d'actrices), scénario où les ressorts dramatiques sont rapidement passés par pertes et profits (le mystère des possessions de Benedetta est ainsi rapidement éventé - à partir de la séquence de la couronne d'épine - moment à partir duquel il n'y a plus un spectateur pour douter de la supercherie), humour potache et grossier (Benedetta et Bartolomea qui vont conjointement aux latrines, la seconde râlant de plaisir au moment de chier, puis s'étant fait sermonner parce qu'elle ne doit pas faire de bruit à cette heure tardive, de lâcher alors un énorme pet en espérant qu'au moins ça c'est autorisé... :| ), jusqu'à la reconstitution historique parfois approximative (en particulier dans les dialogues, beaucoup trop contemporain).

En rentrant dans la salle j'avais en tête un film lui aussi excessif vu il y a quelques années (Les Diables de Ken Russel), qui prenait déjà une certaine liberté avec la question de la foi au profit d'une énergie quasi psychédélique dans ses moments les plus délirants. Même ça on n'y a pas droit ici. Au final, ça m'a plus rappelé le côté ultra fauché et abusé des derniers films de Mocky. Ah, une scène tout de même que je conserverai longtemps en mémoire, celle où la servante du nonce, enceinte, sort son sein et presse son mamelon pour prouver qu'elle a déjà du lait, et de presser le mamelon encore plus fort produisant une giclée de lait qui traverse littéralement la table pour presque atteindre Rampling :lol:

1/6


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MessagePosté: 14 Juil 2021, 20:57 
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Lohmann a écrit:
Tout dépend de l'importance de la politique des auteurs à tes yeux. J'ai beaucoup pensé à Femme Fatale de De Palma pendant la projection.
L'ayant vu cette année, je ne vois pas trop le rapport. Si tu pouvais développer.


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MessagePosté: 14 Juil 2021, 21:03 
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Abyssin a écrit:
Lohmann a écrit:
Tout dépend de l'importance de la politique des auteurs à tes yeux. J'ai beaucoup pensé à Femme Fatale de De Palma pendant la projection.
L'ayant vu cette année, je ne vois pas trop le rapport. Si tu pouvais développer.

Juste que j’ai trouvé le De Palma atroce (un peu pour les mêmes raisons que le Verhoeven, avec un scénario encore plus claquée), mais je sais qu’il a malgré tout ses fervents défenseurs.


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MessagePosté: 15 Juil 2021, 00:27 
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Messages: 671
Lohmann a écrit:
Au final, ça m'a plus rappelé le côté ultra fauché et abusé des derniers films de Mocky. Ah, une scène tout de même que je conserverai longtemps en mémoire, celle où la servante du nonce, enceinte, sort son sein et presse son mamelon pour prouver qu'elle a déjà du lait, et de presser le mamelon encore plus fort produisant une giclée de lait qui traverse littéralement la table pour presque atteindre Rampling :lol:

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"Saint Bernard était en prière devant une statue de la Vierge et quand il prononça "Monstra te esse matrem" la statue devint vivante et la Vierge lança du lait dans la sainte bouche".
Alonso Cano, Saint Bernard et la Vierge, 1652 (Musée du Prado)


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MessagePosté: 17 Juil 2021, 18:57 
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J'ai été captivé par cette étude d'une émancipation par le corps, qui ouvre à Benedetta des perspectives de pouvoir, et moi qui ne connaissais pas du tout le pitch, j'ai été assez soufflé de la manière dont le personnage se transforme, fait face à l'adversité, joue des rapports de force dans l'Eglise...

Le choix de Virginie Efira est très bien vu: elle joue parfaitement le rôle de cette fausse candide et son jeu parfois un peu creux, que je critiquais pour un film comme Sybil de Justine Triet, est en totale adéquation avec le personnage qui oscille entre vanité (au sens d'un vide existentiel qui doit être rempli à toute force) et folie.


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