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MessagePosté: 02 Fév 2018, 09:03 
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Gontrand a écrit:
Le film a a été applaudi dans la salle (bilingue) où je l'ai vu à Bruxelles,


L'horreur

Un passage au hasard :

Citation:
Cela fait, habilement, de la responsabilité et du consensus démocratique un hors-champs nécessaire, que toute la difficulté est de rendre implicite et de dé-théatraliser, il doit basculer du drame vers la "structure".


Je vois pas pourquoi la "responsabilité démocratique" devrait nécessairement prendre l'aspect d'un "consensus", et je vois pas pourquoi il faudrait "habilement" que Spielberg la rende "implicite", la place "hors-champ" et la "dé-théatralise" (voir la représentation totalement "manichéenne" des manifestants contestataires), ou alors tu t'essayes de manière réussie à un hymne réactionnaire au cinéma réactionnaire ?

Il n'y a pas de "fictions de gauche" réussies ou pas, il y a des "fictions de gauche".


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MessagePosté: 02 Fév 2018, 09:28 
Tu es visiblement meilleur procureur qu'avocat.

En Belgique on a quand-même un secrétaire d'état à l'asile qui trouve qu'il y a trop de politilogues dans le pays quand le pôle juridique et des universitairses ont exprimé leur réserve sur sa politique et la possibilité de perquisition chez les personnes hébergeant des sans papiers.


Pour la seconde question, la réponse est simple : parce que dans une démocratie, l'exécutif n'a pas de fonction représentative, qui est transférée sur l'assemblée legislative, ce qui lui permet de servir aussi ceux qui ne l'ont pas choisi. C'est en fait le pôle le plus bureaucratique du pouvoir, et il tend à l'oublier. Tout le film est d'ailleurs plus sur la séparation des pouvoirs que le journalisme (qui ne font pas le moindre travail d'investigation, ni d'ailleurs éditorial, et ne font que couvrir la fuite).


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MessagePosté: 02 Fév 2018, 17:47 
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Gontrand a écrit:
j'ai l'impression que Spielberg se place un peu à la remorque d'une série comme "Mad Men", notamment dans le grille de lecture qui transfère sur la lutte sexuelle et le genre ce qui a l'époque était plutôt une opposition de classes plus englobante.


C'était les deux, la domination systémique des pauvres et des femmes allaient de paire et se recoupaient largement (et c'est encore vrai en partie), ce n'est pas une "grille de lecture" de le souligner, juste, on en parle un peu plus aujourd'hui qu'avant, c'est tout. Ce n'est pas une coquetterie ou un angle que de figurer des femmes quasi-invisibles (ou alors rabaissées à un rôle d'objet sexuel, ce qui est le cas dans Mad Men mais évidemment pas avec Meryl Streep) dans un monde archi-dominé par les hommes, c'est juste la réalité de la "lutte des classes" de l'époque, si on l'étend au-delà du simple appareil marxiste "ouvriers vs capitalistes".


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MessagePosté: 02 Fév 2018, 17:56 
Mmmm. Je me demande s'il n'y a pas parfois une réécriture du passé . Dans la 5ème Victime pourtant antérieur aux années 70, Ida Lupino n'est pas un objet sexuel, mais un personnage beaucoup plus fort (et en même temps un peu mystérieux et fêlé) que ne l'est Streep dans le Spielberg.
Le gros progrès de l'intégration économique des femmes dans les démocraties capitaliste est quand même les deux guerres mondiales où les femmes ont été mobilisées dans la vie économique, il s'est joué dans le monde ouvrier plutôt que dans celui des cols blancs et avant le basculement dans la société de consommation (et la crise du monde ouvrier) . Cela prolonge aussi le combat des suffragettes.
Au debut du XXème Rosa Luxemburg était par exemple cheffe du SPD, et cela même pendant la guerre, tout en étant populaire.
Dans le Peuple de Michelet il y a aussi des descriptions intéressantes sur le travail des femmes (la division tayloriste de certains métiers faisait que certaines machines fonctionnaient mieux avec de la main d'œuvre feminine). Les femmes étaient aussi très présentes dans les chaînes de montage de l'industrie automobile (on peut penser à Élise ou la Vraie Vie qui décrit bien cette réalité,et la complexité des rapports de domination).
Si je repense à l'histoire de ma famille, les femmes venues des branches les plus ouvrières (techniquement ce n'étaient pas ses ouvrier mais des employés chez des petits artisans ou à domicile) ont quasi toutes travaillé (et étaient assez fortes et "carrées" dans les rapports familiaux) , ce qui n'était pas forcément le cas dans les milieux plus bourgeois (ou le fait de travailler était perçu comme une rupture individuelle avec la famille et une revendication).

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MessagePosté: 02 Fév 2018, 19:07 
Ceci dit je ne vois pas ce que la scène avec les manifestants a de manichéenne. Je crois que Spielberg est au courant que la contestation de la guerre du Vietnam a commencé avant 1971, et que c'est plutôt la contestation qui a suscité les articles que l'inverse (au prix peut-être d'un essoufflement que Spielberg, certes, filme, à tel point que le look hippie est devenu un déguisement neutre pour se fondre dans le décor, justement quand il signifie sa propre réalité politique. La scène à d'ailleurs un symétrique quand le journaliste dit plus tard à l'hôtesse qu'il transporte des secrets d'état, qui comprend qu'elle ne doit pas creuser. Le sens des situations, assumées et rendues visibles, est une cachette) . L'idée de la scène est de montrer que, suite aux articles, les manifestants ont moins peur de la police, et celle-ci est dans une position d'attente (le mouvement du plan suit les agents qui encadrent mollement le groupe). Ce n'est pas anodin, la fusillade de l'université de Kent State, est alors à peine vieille d'un an.
De toute manière, le film ne se pose (presque) pas la question "qui sont les contestaires", mais "comment les protéger" (il est vrai que moins les journalistes en savent à ce sujet, plus le sens de leur démarche est directement politique) .


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MessagePosté: 04 Fév 2018, 16:08 
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Au fait, il faisait quoi comme films Spielberg dans les années 70 au moment des scandales avec Nixon ?


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MessagePosté: 04 Fév 2018, 16:28 
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scienezma a écrit:
Au fait, il faisait quoi comme films Spielberg dans les années 70 au moment des scandales avec Nixon ?

Sugarland Express, Jaws, Rencontres du 3ème type et 1941 soit 4 films qui remettent en question les figures d'autorité. Les flics neuneus ou cruels dans Sugarland, le maire corrompu dans Jaws, le gouvernement qui ment dans Rencontres et l'armée viriliste et parano dans 1941.

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MessagePosté: 04 Fév 2018, 16:58 
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Film Freak a écrit:
scienezma a écrit:
Au fait, il faisait quoi comme films Spielberg dans les années 70 au moment des scandales avec Nixon ?

Sugarland Express, Jaws, Rencontres du 3ème type et 1941 soit 4 films qui remettent en question les figures d'autorité. Les flics neuneus ou cruels dans Sugarland, le maire corrompu dans Jaws, le gouvernement qui ment dans Rencontres et l'armée viriliste et parano dans 1941.


Et n'oublions pas, en 71 (l'année des Pentagon Papers, je crois), «Duel» qui alerte l'Amérique de la menace des camions noirs qui pèse sur les automobilistes du pays ! Lol


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MessagePosté: 04 Fév 2018, 17:07 
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scienezma a écrit:
Film Freak a écrit:
scienezma a écrit:
Au fait, il faisait quoi comme films Spielberg dans les années 70 au moment des scandales avec Nixon ?

Sugarland Express, Jaws, Rencontres du 3ème type et 1941 soit 4 films qui remettent en question les figures d'autorité. Les flics neuneus ou cruels dans Sugarland, le maire corrompu dans Jaws, le gouvernement qui ment dans Rencontres et l'armée viriliste et parano dans 1941.


Et n'oublions pas, en 71 (l'année des Pentagon Papers, je crois), «Duel» qui alerte l'Amérique de la menace des camions noirs qui pèse sur les automobilistes du pays ! Lol

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MessagePosté: 04 Fév 2018, 17:28 
scienezma a écrit:

Et n'oublions pas, en 71 (l'année des Pentagon Papers, je crois), «Duel» qui alerte l'Amérique de la menace des camions noirs qui pèse sur les automobilistes du pays ! Lol


Hein !?

Je suis loin d'être un vendu à Spielberg (je n'aime pas du tout les Indiana Jones ou la Liste de Schindler ou la Guerre des Mondes- mais j'aime bien Duel) mais le procès d'intention est tellement grotesque qu'on ne peut que le défendre.

Rien n'est simple. Dans cette génération (en mettant Robert Kramer à part), le film le plus fort politiquement est sans doute THX 1138 de Lucas, qui après va faire ensuite les films les moins politiques du Nouvel Hollywood.
"Greetings" de de Palma aborde frontalement le Vietnam, et l'assassinat de Kennedy, mais n'en fait bizarrement pas une lecture politique particulièrement forte (le film est replié sur la pulsion voyeuriste et le fétichisme de tous les personnages), même si le film est drôle et mordant, un peu à la M. A. S. H.

C'est pas plutôt un asiatique le chauffeur de Duel ?

Et on peut faire une lecture politique de Duel (le mec se pense protégé par sa caisse, son boulot de col blanc, et sa vie de famille, capable de transporter son chez-soi partout, mais découvre qu'il n'est rien, sans qu'il sache si c'est la nature, un ordre social ou l'arbitraire d'une décision du pouvoir politique qui le nie). Le film est très kafkaïen.


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MessagePosté: 05 Fév 2018, 09:54 
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Enfin pour moi Spielberg reste très largement du côté «divertissement» du Nouvel Hollywood. Les films évoqués ci-dessus ne sont subversifs en aucune manière, ils reproduisent les formes du cinéma commercial américain le plus traditionnel et conservateur (relire les texte de Daney sur «les dents de la mer» par exemple). Ceci dit, peut-être que l'on jugera les films-Besson subversifs dans 40 ou 50 ans parce que leur scénario laisse souvent une place aux moqueries à l'égard des flics... et on voit bien qu'aujourd'hui il a rien d'autre à proposer pour vaguement s'impliquer politiquement que de pondre une «fiction de gauche» à la sauce années 70 (âge d'or de ce genre de films déjà lourdingues à l'époque où au même moment son objectif à lui était de divertir les masses avec des camions noirs, des requins géants et des extraterrestres). C'est Spielberg, quoi, pas de quoi en faire la couverture des Cahiers (ah si, excusez-moi, pourvu qu'au moins ils ne nous en pondent pas 5 ou 6 dossiers pendant toute l'année, comme Twin Peaks)...


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MessagePosté: 05 Fév 2018, 09:59 
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On peut aussi s'étonner de voir Spielberg se passionner pour l'émergence de la vérité historique, car il a quand même un peu passé son temps dans ses films à tordre l'histoire comme bon lui semblait. ..


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MessagePosté: 05 Fév 2018, 10:33 
En même temps, si quelqu'un pense que 1941 est un documentaire, le problème n'est peut-être pas chez Spielberg.

Mais c'est vrai que dans le précédent il y avait des distortions gênantes. Il montrait que Gary Powers avait été torturé par les Russes, alors que ce n'était apparemment pas le cas (j'avais posté dans le topic un bon article d'une historienne du Smithsonian sur le topic du film). En revanche, le fait que Powers ait été méprisé au USA à son retour est véridique.


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MessagePosté: 05 Fév 2018, 15:13 
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Je suis très client des films "de presse" et Spielberg est un de mes réalisateurs préférés, c'était donc bien parti pour apprécier, mais j'y suis allé sans pression aucune. Et je fais partie des conquis.
J'ai mis un moment à vraiment "rentrer dedans" mais la deuxième moitié j'étais limite on the edge of my seat. On n'est pourtant pas du tout dans du thriller à suspense (il n'y a d'ailleurs pas de suspense), mais j'ai été captivé quand même. Car la mise en scène elle-même est captivante (putain c'est un régal de chaque instant). Et parce que c'est bien écrit (c'est pas du Sorkin mais c'est très solide quand même) et parce que le casting est génial, Meryl Streep en tête, royale de A à Z. Et, par dessus tout, j'ai été (inconsciemment) captivé par le parallèle qui existe entre ce que le film raconte et l'histoire même de sa création (produit-tourné-monté-sorti en moins d'un an). Le tout rend ce "geste" de "cinéma fait dans l'urgence" tout à fait admirable. Pas un film parfait, ni révolutionnaire, même assez classique, d'ailleurs, mais un film utile, un film ancré dans l'actualité, dans son (notre) époque.
Il y a plein de moments superbes, surtout dans les détails, et surtout dans l'attention que porte le film sur les personnages féminins.
On y trouve aussi les images de rotatives les plus vibrantes ever.

La grande classe.

5/6

Pour comparer, je le préfère à Bridge of Spies, mais Lincoln reste juste devant The Post.

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MessagePosté: 06 Fév 2018, 02:09 
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Gontrand a écrit:
Dans cette génération (en mettant Robert Kramer à part), le film le plus fort politiquement est sans doute THX 1138 de Lucas, qui après va faire ensuite les films les moins politiques du Nouvel Hollywood.

Star Wars est quand même connu pour être une allégorie faisant de l'Empire, les USA et de l'Alliance Rebelle, le Vietnam.

scienezma a écrit:
Enfin pour moi Spielberg reste très largement du côté «divertissement» du Nouvel Hollywood. Les films évoqués ci-dessus ne sont subversifs en aucune manière

J'ai jamais prétendu qu'ils étaient subversifs. Les éléments que je cite ne constituent pas la thématique principale de chacun de ces films mais témoignent toutefois d'un esprit contestataire qu'on retrouvait à l'époque même dans les films de divertissements et d'un point de vue qui se retrouve dans les Spielberg d'après, notamment ceux qui en firent leur sujet principal.

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