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MessagePosté: 29 Nov 2009, 19:41 
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Très beau film en effet, porté par la beauté de ses cadrages et par la grâce fragile de sa protagoniste. On est sans cesse destabilisé par l'atmosphère particulière que Dumont insuffle à son histoire, toujours à la limite entre implacable tragédie et carricature versant dans le second degré, comme le laissait supposer la mère supérieure quand elle assène que la jeune fille n'est qu'une carricature de religieuse.
La fin ne nous laissera en bouche ni l'un ni l'autre de ces seuls registres, mais plutôt les deux, transcendés dans un mélange miraculeux qui laisse sans voix.

5.5/6


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MessagePosté: 01 Déc 2009, 23:21 
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J'avoue être plus mitigé.
Posons ça d'emblée : le film est sublime, la photographie, la prise de son, tout.
Mais c'est aussi là que j'ai du mal à le suivre, dans les ellipses incessantes, dans les non-dits qui freinent l'empathie, dans l'invisible qui est au coeur du film et que je n'arrive pas à ressentir vraiment, dans le formalisme qui prend le pas sur le récit, sur le sujet. C'est bien beau d'enchainer les plans fixes sur le visage pâle d'une jeune fille perdue, encore faut-il en faire quelque chose, et ce que Dumont en fait ne me convainc pas complètement. Peut-être qu'il a trop aimé son actrice au point de ne pas la partager, j'ai eu la sensation qu'il la gardait pour lui, ou bien entendait-il incarner l'absence qu'elle ressent en nous la rendant inaccessible dans ses mobiles jusqu'au martyr, mais dans ce cas-là c'est à mon sens hors de sa portée de réussir à faire un tel film sur l'absence. Et il l'a aussi trop aimé en la confinant dans une imagerie érotico-mystique qu'il aurait fallu violenter un peu si le thème du film était le vécu de la passion dans la chair.
(Pour le reste, le virage "potentiellement polémique" ne m'a pas dérangé du tout. Même les atroces clichés qui jalonnent le film, j'aurais pu tolérer. La toute fin, par contre, sur l'air du "démerdez-vous avec ça", me casse les couilles. Je n'aime pas cette lâcheté et non, ce n'est pas pour permettre au spectateur de réfléchir parce qu'il n'a tout simplement pas la substance pour le faire ici).

4/6 (parce que quand même, Dieu que c'est beau)


Dernière édition par boultan le 01 Déc 2009, 23:36, édité 1 fois.

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MessagePosté: 01 Déc 2009, 23:35 
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Bon bah maintenant on peut dire que le film ne fait plus l'unanimité! :twisted:

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MessagePosté: 02 Déc 2009, 09:39 
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boultan a écrit:
Posons ça d'emblée : le film est sublime, la photographie, la prise de son, tout.
Rien que ça, c'est déjà pas mal! ça ne rompt pas vraiment l'unanimité!
Oui , le film est magnifique.L'expression qui surgit en tête: c'est de l'épure cinématographique.
L'actrice m'a fait penser également aux actrices de Bresson: elle est émouvante, mystérieuse, trés belle dans sa simplicité, superbement photographiée. Les ellipses font tout l'intérêt de ce film, c'est un puzzle qu'on doit compléter nous mêmes. Le réalisateur en est conscient, c'est pour lui une manière de confronter chacun avec sa propre interprétation, lui même ne s'engage pas dans cette démarche (curieusement il se tient en deçà, et nous pousse à choisir à sa place).
Je n'y ai pas vu vraiment d'islamophobie (encore que là dessus, c'est vrai, la dimension politique soit totalement évacuée, on en reste à la seule dimension religieuse, ce qui simplifie trop ).
La fin est surprenante, une vraie trouvaille, qu'on doit décrypter seul.

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MessagePosté: 02 Déc 2009, 10:25 
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Citation:
L'actrice m'a fait penser également aux actrices de Bresson: elle est émouvante, mystérieuse, trés belle dans sa simplicité, superbement photographiée.


Citation:
C'est du niveau de la relation Robert Bresson / Anne Wiazemsky (fallait bien que je cite Bresson quelque part dans cette critique, ce n'est plus une critique d'un film de Dumont sinon)


Bon, je crois qu'il faut vraiment arrêter les comparaisons avec Bresson.
Le travail effectué par Dumont sur le jeu, dans le cas présent, est très loin des recherches de Bresson. Et je ne parle même pas de la mise en scène...


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MessagePosté: 02 Déc 2009, 10:38 
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C'est vrai que j'ai du mal à voir le rapport avec Bresson là, si ce n'est dans sa construction et l'évolution de son héroïne.


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MessagePosté: 02 Déc 2009, 10:51 
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El Topo a écrit:
C'est vrai que j'ai du mal à voir le rapport avec Bresson là, si ce n'est dans sa construction et l'évolution de son héroïne.


Même à ce niveau-là, j'ai du mal à voir.
Il faudrait prendre des exemples précis, mais ne serait-ce que les fameuses ellipses, elles sont utilisées de manière radicalement différente.
Ou bien, il suffirait de mettre en parallèle la fin de Mouchette avec celle du film de Dumont, pour voir qu'il y a quand même un monde d'écart entre les deux.


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MessagePosté: 02 Déc 2009, 10:56 
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Puis quand on en parle à Dumont il est le premier à dire qu'ils sont différents, déjà l'un tente de faire le moins de prise possible, l'autre pouvait en faire cent pour arriver à ce qu'il voulait. Je pense que Dumont laisse beaucoup plus de choses au hasard, il est loin de Bresson l'inquisiteur comme l'appelait Godard... Y a un certain sens de l'épure mais il ne suffit pas de ça pour se rapprocher de Bresson.

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MessagePosté: 02 Déc 2009, 11:06 
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the black addiction a écrit:
Je pense que Dumont laisse beaucoup plus de choses au hasard, il est loin de Bresson l'inquisiteur comme l'appelait Godard...


Oui, même si, malgré sa précision extrême, son exigence, ses dizaines de prises, Bresson disait quand même qu'il laissait une place à la surprise du tournage; il aimait trouver quelque chose d'inattendu. Mais effectivement, on ne peut pas appeler ça du hasard.


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MessagePosté: 02 Déc 2009, 11:36 
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thepassionoflovers a écrit:

Oui, même si, malgré sa précision extrême, son exigence, ses dizaines de prises, Bresson disait quand même qu'il laissait une place à la surprise du tournage; il aimait trouver quelque chose d'inattendu.


Oui, c'est tout le miracle de son cinéma.

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MessagePosté: 02 Déc 2009, 19:13 
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DPSR a écrit:
Mr.Orange a écrit:
6/6, La fin m’a presque fait chialer.


Ah la fin est sublime.

Les inter prétations de cette fin peuvent vraiment être trés différentes...
Pour moi,
à la différence de DPSR: je ne vois pas un flash back, mais un aboutissement:2 inconscients qui se rencontrent enfin, miraculeusement (!! et rebelote!) alors que les personnages semblaient sur des voies parallèles, qu'ils avaient l'air de s'ignorer; un vrai "sauvetage", en tout cas


ce qui met sur cette voie, c'est la scène assez ambiguë des trois personnages dans la serre, se mettant à l'abri de la pluie: la religieuse reste à l'extérieur (il y a un homme dans le lot!), sous l'averse, et réprimande les deux novices, les qualifiant de " petites sottes" , ou quelque chose de ce genre; seule la novice voilée répond et se justifie , les deux autres se taisent de façon "entendue" comme si c'était déjà une complicité tacite entre eux. Mais bon, on peut y voir tellement de choses...

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MessagePosté: 02 Déc 2009, 19:38 
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Oui je souscris à cette interprétation, et en fait je me demande quelle autre interprétation peut soutenir la comparaison en termes logiques... disons que c'est la plus évidente.
Ce sauvetage est un véritable miracle dans le sens où ce que souhaitait Céline depuis le début se réalise: l'apparition corporelle d'un amour qui la conduira à son salut. Ce qui est intéressant est que Dumont filme la séquence d'abord en plan large, pour que le spectateur voit bien à l'avance que le taulard s'approche et qu'il va la sauver, puis enchaîne sur un plan rapproché pour montrer l'étreinte avec tout son aspect sensuel, brusque et inattendu, inespéré. Le premier plan souligne le caractère pratique et les circonstances du sauvetage (le taulard l'a suivie), tandis que le second montre le point de vue que Céline peut avoir sur cet évènement, qui est celui d'une manifestation mystique du sublime et du divin. On peut gager qu'après cela, elle sera raffermie dans sa foi, qui sera dorénavant plus ancrée dans la matérialité.
C'est ce traitement lucide, intraitable et en même temps assez respectueux, compréhensif, de la religion par un athée qui m'a intéréssé.


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MessagePosté: 02 Déc 2009, 21:20 
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Alors là, c'est marrant , j'ai dû complètement m'identifier à Céline ce qui fait qu'à la fin je n'ai pas vu du tout le plan large
je n'ai vu que le plan rapproché, l'étreinte brusque dont tu parles, et là les dernières images font un effet pas possible, c'est enfin ce qui comble le manque signifié dès le départ avec le "je fais abstinence, ma mère" de Céline, et le pain sec donné aux oiseaux...(alors qu'il était censé apaiser sa faim à elle). Et ce que tu dis des intentions du réalisateur correspond entièrement aux propos qu'il a tenus l'autre soir en réponse aux questions des spectateurs.

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MessagePosté: 04 Déc 2009, 20:35 
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Zad a écrit:
précisément je sais plus, mais en gros que c'était une grosse arnaque, une auto-parodie grossière.


C'est un petit peu ce que j'ai ressenti.
Je vais laisser murir, mais en l'état je déteste.

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MessagePosté: 04 Déc 2009, 20:42 
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Mr.Orange a écrit:
Bon bah maintenant on peut dire que le film ne fait plus l'unanimité! :twisted:


Non, maintenant on peut le dire ...

Je suis surpris que t'aie pas aimé TBA.


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