Film Freak a écrit:
Chaque flashback parvient à aborder les passages obligés avec un œil nouveau (la découverte des pouvoirs qui se fait plus flippante qu'autre chose, pour ne citer qu'elle) et regorge assez fréquemment d'émotion (l'adieu de Jor-El, la confession de Pa Kent). Snyder confère à ces séquences tout l'iconisme requis, même si cette fois, cela passe par un style plus malickien que pictural. On est toujours dans le tableau, mais dans le tableau à l'épaule, avec du grain à l'image. Ce film c'est tout l'inverse de Watchmen. En lieu et place de la déconstruction du mythe, Snyder offre une reconstruction, substituant au cynisme pessimiste d'Alan Moore un premier degré optimiste qui se devait donc de passer par une mise en scène revenue à l'état pur. La caméra tremble, hésite, ne se pose pas. Tout comme le héros.
Petit à petit, tel son protagoniste, la narration trouve son sens dans cette volonté d'approcher le personnage par un autre angle, assez riche, adoptant le point de vue du jeune homme qui se cherche, et surtout qui porte ses pouvoirs comme un fardeau. Même s'il est encore question de dieu vivant, l'aspect religieux a plus ou moins disparu, dans le fond (Kal-El n'est pas tellement un martyr ici, même s'il y a une phase d'incompréhension de la part des "Hommes") comme dans la forme (tout ce qui caractérisait le Singer, avec son imagerie christique, est absent). Par conséquent, c'est un Superman relativement inédit (au cinéma) que l'on retrouve ici, enfin caractérisé autrement que comme un boy-scout. Singer en avait fait un messie orphelin en quête d'adoption, Snyder & Goyer & Nolan en font un enfant déchiré entre deux pères, entre ses souvenirs de celui qui l'a élevé, et la conscience artificielle de celui qui l'a conçu, entre ce à quoi il est destiné et ce qu'il peut choisir par lui-même. Quel héritage, quel peuple choisira-t-il?
De plus, au-delà de ce que ça permet au niveau de l'action, c'est aussi un Superman plus vénère qu'on a là, plus humain du coup, plus "relatable". Il y a tout un truc sous-jacent avec Clark qui doit se contrôler, se retenir. Ca joue sur tout un truc de frustration qui, quand elle explose à la fin, pfoooo... Maintenant, le but n'est pas non plus d'abandonner tout ce que le matériau peut avoir d'alien, et l'approche que l'on pourra qualifier de "réaliste" se fond finalement assez naturellement dans de la pure science-fiction. On retrouve tout le gravitas nolanien - il y a d'ailleurs encore moins d'humour que dans ses Batman - mais on est pas exactement dans le même genre d'univers. En fait, ici, l'approche "réaliste" consiste à revisiter l'origin story à travers les codes du film d'invasion extra-terrestre. En gros, que se passerait-il réellement si demain, un mec comme Superman faisait son arrivée sur Terre (aspect complètement éclipsé dans le Donner)? Du coup, l'implication de Lois Lane dans cette découverte, mais également celle de l'armée, font sens.
Un autre aspect chelou de la structure, c'est qu'il n'y a pas tant trois mais deux actes, et une fois de plus, on passe assez vite, même si assez logiquement, de ces débuts "quête de soi" à une sorte de climax d'une heure, encore plus audacieuse dans son jusqu'au-boutisme SF. Si j'aurai pu me passer d'un énième McGuffin de dernier tiers à base de "machine à rayon qui menace de tout détruire pour mieux envahir" (façon Transformers 3/Avengers), je n'ai strictement rien à redire sur le reste, qui venge tous les fans de comics et de films d'action et de bastons de super-héros déçus par Superman Returns avec les combats à base de super-pouvoirs les plus fous depuis...Spider-Man 2? C'est un peu ce que la fin de Matrix Revolutions aurait pu, dû, être. C'est encore plus destructeur que Hulk dans The Avengers. Y a bien deux-trois plans où les doublures numériques sont un peu trop élastiques, mais franchement, c'est jubilatoire dans l'abattage de pouvoirs (la vitesse de Faora, le bourrinisme de Superman et Zod). Parfois, c'est juste dans le look (meilleure illustration de la heat vision, notamment quand Superman la balance, ultra-vénère). Et puis il y a aussi les machines, et puis il y a l'armée, et puis et puis et puis...
Ce film regorge de choses, d'idées, comme dans le traitement de la relation entre Superman et Lois par exemple, une fois de plus assez couillu, avec ce très beau plan sur la fin...d'ailleurs, les toutes dernières minutes sont parmi ce qu'il y a de plus beau dans le film, notamment un dernier flashback, et puis cette dernière scène qui sonne une fois de plus, à la manière de la fin de Batman Begins, comme une promesse.
CE
Film Freak a écrit:
Deuxième vision qui estompe donc les imperfections même si elles ne disparaissent pas. Je suis sûr qu'un Director's Cut avec un poil plus de respirations et peut-être une ou deux séquences réarrangées serait meilleur, mais en l'état, il n'y a pas grand chose qui me gêne à part le plan sans doute trop classique de Zod (qui reste inscrit dans la thématique).
Les qualités par contre me sont apparues encore plus brillantes. Toute la première moitié, de cette indevinable intro incroyablement couillue jusqu'à la bataille de Smallville, et surtout tous ces flashbacks qui m'ont encore plus ému cette fois-ci...
C'est simple, j'ai les larmes aux yeux quand :
Et la dernière scène, j'avais des frissons.
Toutes ces choses que je garde gravées
là plus encore que les époustouflantes scènes d'action. Y a sûrement un ou deux crashes de vaisseaux en trop mais quand ça redémarre avec son combat de DIEUX comme on en a jamais vu avant, ce pure combat digne de Dragon Ball Z, c'est gavage.
FILM
Film Freak a écrit:
Je viens de me le refaire là, à l'instant, et je crois que cette troisième vision m'a enfin permis de faire totalement la paix avec le film.
Je crois que je l'avais déjà formulé d'une manière ou d'une autre dans ce topic et je le confirme, Man of Steel ne sera jamais le film parfait que j'attendais, mais cette dernière vision en date, délestée des attentes, délestée de l'envie qu'une seconde vision gomme les défauts, en 2D et sur mon écran maison (donc grand mais pas trop imposant), m'a permis de mieux apprécier la principale qualité du film : la mise en scène de Zack Snyder.
Plus que tout autre blockbuster cette année, c'est LE film qui fonctionne le plus sur son (incroyable) iconographie.
Il y avait toute une série de plans que j'avais complètement oublié, qui sont parfois super furtifs ou qui frôle l'abstrait, mais qui viennent régulièrement ponctuer le film de tableaux à la force évocatrice sans pareil. C'est là qu'on voit que malgré la caméra à l'épaule et l'absence de ralentis, ça reste du pur Snyder.
J'avais déjà dit que je trouvais le scénario moins intéressant et carré que ceux d'Iron Man 3 ou Star Trek Into Darkness mais que le film m’émouvait davantage que ces derniers et, contrairement à ce que je pensais jusqu'à présent, ce n'est pas uniquement dû aux thèmes qui me touchent particulièrement, mais surtout à cette mise en image où tout est..."heightened". Accru, exacerbé, amplifié...INTENSIFIE.
Tout est intensifié, les émotions, les actions, les enjeux...tout ce qui se passe se joue invariablement à une échelle épique, COSMIQUE. La naissance de Kal, le coup d'état de Zod, la fin de Krypton, le sauvetage d'une plateforme pétrolière, etc. Jusqu'à ce climax tant décrié, injustement qualifié de "destruction porn" par incompréhension du sens que Snyder souhaite conférer non seulement à l'action mais aux enjeux dramatiques. Qu'on trouve ça grossier, soit, ça l'est, on va pas nier que l'utilisation d'une imagerie 11 septembre/apocalyptique est une manière bourrine de faire sens, mais le fait est que ça FAIT sens.
Et il en va de même pour chaque séquence.
Comme le dit The Scythe-Meister, c'est opératique.
Et je ne l'ai que mieux compris cette fois-ci. Je n'ai plus vu le spectre de Nolan ou la main de Goyer, j'ai vu à travers les yeux de Snyder.
DÉCHIRE.
Je crois que je l'aime de plus en plus à chaque vision.
Le film qui passe d'un morceau de bravoure SF à l'histoire d'un gamin qui cherche son père biologique à un Crépuscule des Dieux super-héroïque.
Hâte d'être mercredi.