Weah.
Bon je vais pas faire mon habituel prologue pré-avis récapitulatif des émotions et sensations et appréhensions qui m'ont traversé durant tous ces mois d'attente vu qu'on a sensiblement tous eu les mêmes...disons juste qu'après moults pérégrinations, j'entrais finalement dans la salle assez confiant.
Et j'ai pas été déçu.
Les rares infimes bémols du film, si vous avez lu les avis ici bas, vous les connaissez déjà.
Oui, le récit s'appuie sur des archétypes et stéréotypes assez classiques.
Et c'est tout.
Moi c'est le seul truc qui me freine un chouïa et ça me freine pas des masses parce que je trouve ce canevas transcendé par l'univers qu'il habite.
Après tout, c'est un peu toujours le cas avec ce genre de films, franchises en puissance, tels que Matrix pour citer le plus récent (et qui partage certains éléments avec Avatar, juste retour des choses vu les emprunts de Matrix à la filmo de Cameron), les parcours et les enjeux sont souvent les mêmes (pas besoin de rappeler Joseph Campbell) mais c'est tout ce que l'auteur tisse autour qui crée l'intérêt, l'originalité.
Avatar est typiquement le genre de film dont je sors en ayant envie de dévorer le "The Art of...", sans doute riche comme jamais. Le film dont je suis impatient de m'émerveiller devant les bonus du DVD, tant pour la créativité durant la pré-prod que pour les méthodes folles de la post-prod.
Cameron s'en était vanté et il avait raison : Avatar est un des rares blockbusters récents à ne pas être une adaptation.
Le film aura beau évoquer Miyazaki, ça reste très cameronien. Je ne parle pas uniquement des thèmes, désormais décernables comme des néons dans la nuit (femme forte, extension du corps humain, menace militaire, blabla), mais de la faune et de la flore de Pandora qui semblent davantage s'inspirer de paysages et de créatures, de couleurs, que l'on peut rencontrer au fin fond de l'océan, que d'un environnement terrestre.
Avatar c'est le rêve éveillé de Cameron.
Dès le premier plan, c'est bim, je vous emmène dans un nouveau monde.
J'étais déjà un défenseur de la 3D et Cameron, sans avoir encore livré son argument le plus massif, en était déjà un pionnier et annonçait tel un prophète la venue de cette technologie, cette "fenêtre plus lucide", ce "rêve éveillé". Et Avatar est sans aucun doute le film qui exploite le mieux la technologie.
Le film est intégralement dépourvu de plans gadget. Y en avait déjà peu chez Zemeckis, y en a encore moins ici. Deux ou trois plans avec des flèches qui pointent l'objectif et c'est à peu près tout...le reste du temps, la technique s'efface derrière la réalité, on s'y habitue encore plus vite que d'habitude et de temps en temps, on y croit vraiment...l'utilisation des fougères dans la première apparition de Neytiri...magnifique.
Il en va de même pour la performance capture. Les quelques réserves que je pouvais avoir devant la bande-annonce qui s'étaient déjà envolées lors du Avatar Day sont brisées en éclat ici...au départ, tu remarques encore les petits hics qui ne sont pas des hics en fait, mais disons ces rares instants où tu ressens quelque peu la divergence entre le réel (la performance) et le numérique (le rendu) mais très vite, tu l'oublies. Moi en tout cas, je l'ai adopté si vite que je me posais même plus la question à un moment : tout ce que je voyais était vrai. Et du coup, a posteriori je me demande quels sont les plans de forêt qui sont réels et ceux qui sont composites et ceux qui sont intégralement faux.
Y a des gros plans des yeux, des visages, c'est la folie...les reflets, la rapidité du mouvement, la texture de la peau...y a des moments, j'avais vraiment l'impression de regarder des acteurs maquillés et non des CGI.
Et Cameron a en plus les couilles d'alterner sans cesse les scènes avec les Na'vi (faux) et les scènes avec les humains (vrais).
Et ça ne jure jamais.
Comme le dit le protagoniste à un moment, "tout commence à se confondre, le rêve et la réalité". Très habile.
La mise en abyme de l'intrigue par la mise en scène, de l'expérience du personnage (qui rentre dans une machine, se connecte, et se projette ailleurs, en quelqu'un d'autre, dans un "autre monde" ou presque) avec l'expérience du spectateur (qui rentre dans une salle, met ses lunettes, et se voit projeté un ailleurs, un autre monde), est sans doute le "sous-texte" qui m'intéresse le plus dans ce film. Plus que le fond, grillé avant même l'entrée en salles, sur la nature hégémonique de l'Homme, le génocide, l'interventionnisme, la guerre faite pour les ressources, etc.
Après tout, le film s'appelle Avatar, et pas Pandora (en passant : y a d'ailleurs tout un truc à dire sur la comparaison entre l'avatar Na'vi de Jake et l'avatar AMP de Quaritch, où l'un est symbolique de la symbiose qui régit Pandora tandis que l'autre n'est que bellicisme défensif et offensif, clairement dans la rupture).
Je vais peut-être pas aller jusqu'à dire qu'Avatar est "avant tout un film sur le cinéma" mais il est clair que c'est le film d'un homme qui a plus que jamais foi en son medium, en son art, et sur l'envie que l'on ressent tous de s'évader dans ce genre d'ailleurs, ce genre de monde.
Qui n'a jamais rêvé de vivre dans le monde d'un de ses films préférés?
Avatar c'est du pur film "world-building", un genre que j'adore. Comme Star Trek plus tôt cette année, mais en plus fort encore vu qu'il s'agit ici d'un univers crée de toutes pièces.
Et j'aime comme le film a les couilles d'être presque, pendant toute la première moitié, en gros un documentaire de Jacques Perrin sur Pandora. Oui, Avatar, pendant un bon moment au départ, c'est Microcosmos/Le Peuple migrateur. Sauf que c'est pas des insectes ou des oiseaux mais des Thanator, des Banshee et des Leonopteryx.
Contrairement à Qui-Gon, j'aime beaucoup le rythme et la structure bizarre du film...le début bande-annonce, les scènes super corutes, puis soudain de longs moments d'exploration, les petits inserts "vlog", la voix off qui peut paraître redondante mais qui fait vraiment "entrez dans la tête de Jake", et puis la fin...le climax interminable (dans le bon sens), qui n'en finit plus d'enfler, de segments en segments, ça se fait de plus en plus énorme. C'est assez incroyable, c'est Aliens à la puissance 10².
Et ce que je kiffe par-dessus tout, c'est qu'après ce summum de badass, t'as deux scènes qui scellent pour moi l'émotion du film.
J'ai rarement vu 2h40 qui passent aussi vite. J'aimerai en voir plus sur certains persos comme Norm ou Parker. Putain même Michelle Rodriguez je l'aime bien dans ce film. Je serai curieux de savoir si une version longue est prévue pour le Blu-ray même si je m'attriste déjà à l'idée de revoir ce film en 2D à la maison. Je vais le revoir demain, les places sont déjà réservées. Je vais le montrer à mon père qui rentre dimanche. Et il faut que je me fasse une séance en IMAX si Disney programme des séances en VO (coup de gueule en passant au Gaumont Capucines qui l'a joué dans sa salle du bas, en pente dans le mauvais sens, plutôt que dans sa salle du haut, plus en gradins).
Bref.
Respect. Respect pour Cameron que j'ai pas mal vanné pour ses 12 ans d'absence. S'il faut se taper tous les documentaires relous pour avoir enfin Avatar, y a pas de problème. Respect. Respect pour avoir non seulement attendu que la technologie soit au top mais d'avoir carrément conçu la technologie, la caméra, pour faire le film au mieux.
PS : pas respect pour James Horner qui signe une BO pas mal lorsqu'il ne s'autopille pas comme d'hab (sérieux, y a un motif musical récurrent qui était déjà dans Willow et Troy).
Anyway, 6/6.