Déçu. C'est mon Gravity de cette année : énorme attente vis à vis du film précédent du réal, énorme ambition formelle, pureté d'un projet au scénario menu... et incapacité quasi-totale à rentrer dedans. Pourtant tout est génial, motivant, intriguant, mais voilà, parfois la mayonnaise ne prend pas, c'est con mais c'est comme ça.
Bon, y a déjà l'impression de connaître tous les aspects du film par les quelques éléments qu'on en avait (notamment la BA) et de voir un programme se dérouler comme on l'attendait (le film étant très minimaliste, il offre peu de choses qu'on n'avait pas déjà entraperçues).
Légers spoilers.
Je me souviens que certains parlaient pour Birth de film poseur. Je ne pense pas qu'Under the skin le soit, mais il y a là un retournement malvenu qui fait des expérimentations un but recherché. Plus ou moins pensé comme un "simulateur de vision d'alien", le film cherche en effet moins à rentrer en empathie avec son personnage, ou même dans un rapport brut de fascination, qu'en faire une sorte d'excuse pour peindre le monde sous un jour étrange. Ce qui fait d'ailleurs que la deuxième partie, sur l'alien lui-même, est un relatif échec.
J'ai longtemps cherché à sentir ce dont le film parlait. Il y a là, en creux, un portrait de l’Écosse, terre désolée de fin du monde, qui semble dessiner une image belle et terrifiante, crépusculaire, du désert affectif terminal qu'est le monde actuel. Et à côté, on a parfois l'impression que la SF est une excuse pour faire le portrait d'une psychopathe, qui à un moment ne peut plus se satisfaire de ces intégrations (scènes d'ailleurs répétitives en elles-même, on sent que le film pourra plus tenir sur elles longtemps), et qui va chercher, sans réellement y arriver, à apprendre le contact humain.
Ces deux pistes résonnent forcément avec le portrait-catastrophe d'un monde devenu incapable de tout lien à l'autre, qu'on croise de plus en plus souvent au ciné j'ai l'impression (Oslo 31 août par exemple ; on pourrait citer Fincher, dans un style assez proche : un cinéma sur-stylisé, aux replis microscopiques, comme ultra-sensible aux échos de la plainte d'un monde contemporain solitaire). Mais est-ce ça qui secoue réellement le film ? Je n'en suis pas certain.
Il y a des choses qui ressortent : l'identification à la prédatrice en recherche de proie (qui résonne étrangement avec les rituels de séduction), la dispersion étrange des motos et la perte progressive des corps dans les immenses paysages. Il y a des tentatives intéressantes (les inserts de caméra cachée dont on a du mal à deviner le début ou la fin), des coups auteuristes un peu tartes (le défiguré), des choses couillues (la longue intro qu'on expliquera jamais), beaucoup de magnifiques idées...
Mais globalement, chacune de ces idées me semble aller dans le sens d'une illustration savante de ce que propose le pitch, plutôt que de se faire l'outil d'une réelle immersion (pour le dire autrement : malgré l'intérêt du projet sur le papier, il ne se passe pas toujours quelque chose de réellement fort dans le plan, d'enjeu qui donne de la force à la scène, le ravissement plastique que les situations permettent restant le but premier). D'où même, au final, un certain ennui. En fait, à la réflexion, je crois que le film aurait du assumer son côté horrifique et phobique, nous parler d'abord de cette manière viscérale, pour que son projet fonctionne (les moments les plus frappants sont de cet ordre : la fin, le retour du prisonnier nu immédiatement pêché dans son jardin, le passage sous la surface...)
Bon, je suis peut-être juste passé à côté, ou peut-être y avait-il trop d'attente. Mais j'ai l'impression qu'il y a une couille... Allez le voir quand même.
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