Veille du nouvel an dans un hôtel de luxe des Alpes, le maître d'hôtel et tout le personnel sont sur le pied de guerre pour accommoder des clients exigeants.
La satire - facile - sur les hyper-riches ou les riches est un genre à la mode (Triangle of Sadness, The Menu, White Lotus, Glass Onion, paraît-il Saltburn). D’aucuns sont assez naïfs pour voir dans ces distractions inoffensives des brûlots. Pour cette raison, il était intéressant de voir ce que Roman Polanski proposait dans le genre, d’autant que son film est unanimement conspué, à l’inverse des films précités. Surtout qu’on entend parler de vulgarité (dont n’était pas exempt Triangle of Sadness), de laideur visuelle (la satire des ultrariches doit-elle être aussi visuellement léchée qu’une pub de parfum, à défaut d’être de bon goût ?), toutes choses qui semblent enfin correspondre à ce sujet. Le film ferait-il ainsi preuve d’une certaine honnêteté, contrairement à ses prédécesseurs qui se contentent le plus souvent de punir un peu artificiellement leurs protagonistes au cours de péripéties cousues de fil blanc ou éculées ? En le voyant défiler, pas drôle, sans intérêt mais jamais désagréable, on aimerait en savoir plus sur sa raison d’être ; la seule chose que l’on sait est qu’il a été coscénarisé par Jerzy Skolimowski, qui paraît-il en dit le plus grand bien en interview (quoi d’étonnant à cela). On a un film de deux préboomers honorés tant et plus (même si Polanski a connu les quelques turbulences que l'on sait) dont on se demande ce qui les a motivés à le faire. Mickey Rourke, Fanny Ardant, John Cleese, Sidne Rome(l’actrice de Ché?, défigurée par la chirurgie esthétique, mais aussi par un accident de voiture ayant eu lieu en 2009) se prêtent volontiers au jeu de l’autodérision. Une actrice dans un second rôle fait ses débuts au cinéma : elle fait/faisait apparemment partie de plusieurs comités de direction, avec son mari un entrepreneur suisse sans doute plein aux as. Le film présente ainsi l’originalité de faire jouer des ultra-riches, qui ne sont pas des acteurs au départ, dans des rôles correspondant à leur compte en banque. Il a coûté 17 millions d’euros, ce qui peut paraître beaucoup, mais ne l’est pas forcément quand on se rappelle combien coûte un kebab en Suisse, et le niveau d’un smic (4 400€ par mois dit-on). Le film se passe à la veille du passage à l’an 2000, et finalement du plus grand bug de l’an 2000 (Müller et Emmanuel Todd, ces franc-tireurs, désapprouveront), à savoir la passation de pouvoir de Eltsine à Poutine (qu’observent en ricanant un groupe de nouveaux russes à la télévision). C’est à la fois con et puéril (et certains, plutôt que parler de gâtisme, pourront invoquer l’esprit de Gombrowicz, adapté par Skolimowski), sans intérêt et, en même temps, on ne peut s’empêcher de dire qu’il y a ici sans doute l’expérience de plusieurs vies recueillie dans ce script, expérience singulièrement rabougrie au reste. Faut le dire, c’est pas bon, même si ça n’a rien de honteux, et tout en étant redondant, ça a le mérite d’être moins hypocrite que beaucoup de films du genre. L’esprit anar de droite qui met tout au même niveau dans un grand éclat de rire nihiliste - et non partagé - est assez dégueulasse à mon sens, mais il est là sans dissimulation.
Jerzy aurait dû appeler son pote Vincent Gallo pour top off le casting.
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