Je crois ne jamais avoir vu une série qui réussissait à ménager ainsi la jubilation et la frustration du spectateur.
Dans un sens, Game of Thrones réussit tout ce qui rendait Lost agaçant.
Un tour de force d'autant plus réussi que la façon qu'a Martin de ne pas donner au public ce qu'il veut se fait de manière bien plus radicale que chez Lindelof & Cuse. Dans Lost, la culture du mystère fatiguait à trop vouloir jouer les prolongations et l'écriture tirait sur la corde de la crédibilité dans le refus des personnages à communiquer entre eux.
Ici, on est dans un monde sans mystère. Certes, il y a des machinations qui se fomentent dans l'obscurité et on n'est jamais à l'abri de révélations qui s'apparentent à des retournements de situations mais tout est connu. L'histoire de Game of Thrones se fonde sur l'Histoire des Sept Royaumes et le passé de chacun le hante et l'anime. On sait DEPUIS SA PREMIÈRE APPARITION qu'Oberyn veut se venger des gens qui ont tué sa soeur. Ce désir est développé SUR PLUSIEURS ÉPISODES. Par conséquent, quand Martin nous tire le tapis de sous les pieds et que l'on tombe à la renverse face au sort qu'il réserve à ce personnage, la surprise s'explique presque immédiatement par la cohérence. Le mec a ruminé sa vengeance pendant des années et n'a pas su éviter l'arrogance de vouloir la voir s'accomplir comme il l'avait imaginé. Il ne tue pas la Montagne quand il le peut parce qu'il veut l'entendre avouer ses crimes...et ça se retourne contre lui.
C'est frustrant parce qu'Oberyn était classe et badass et qu'on vouloit le voir assouvir sa vengeance et sauver par la même occasion notre chouchou de Tyrion mais ça fait sens et l'on ne peut que tristement le reconnaître. Comme pour le Red Wedding. C'est en ça que l'on est énervé : on sait que la série a raison. Dans une histoire normale, le gentil gagnerait à ce moment (tout comme Tyrion gagnait son précédent "trial by duel") mais tous les plans ne peuvent être toujours bien huilés.
Si j'avais un reproche à faire, je dirai que le duel est un peu trop rapide. La scène entière, la dernière de l'épisode, dure à peine plus de 5 minutes. Ça renforce le côté "choc".
Ailleurs, d'autres changements majeurs prennent place.
Daenerys se défait du pauvre Jorah, le seul qui freinait son arrogance grandissante, et Sansa, tout comme Arya quelques épisodes plus tôt, sort de l'enfance en apprenant enfin à jouer le "game of thrones". Qui va à sa perte? Qui trouve le salut?
Et quel sera le sort du pauvre Tyrion?
Deux épisodes avant la fin de la saison. Quelle série cruelle.