Là aussi, j'avais oublié ce que j'avais écrit et j'aurais pu réécrire la même chose.
Film Freak a écrit:
Il y a quelque chose d'admirable dans la démarche de Zemeckis à réaliser un film à 31 millions de dollars qui n'a rien de high concept, qui ose les 2h20 et le Rated R, en prenant un des acteurs avec le plus gros quota sympathie pour lui faire jouer un déchet. A ce titre, le cinéaste reste un excellent narrateur, prenant son temps pour mieux s'intéresser à l'humain, faisant passer le film comme une lettre à la poste, mais les craintes que j'avais depuis l'annonce du projet se sont toutes confirmées.
Tout d'abord, je trouvais étonnant le retour du metteur en scène au film live avec une histoire aussi peu intrigante, mais j'ai récemment appris que Zemeckis lui-même avait souffert d'addiction et était sobre depuis plusieurs années. Ceci explique donc cela. Flight n'est certainement pas le film le plus intéressant de son auteur mais peut-être un de ses plus personnels étant donné qu'il adresse directement le sujet. Mon souci, c'est qu'il ne l'adresse pas d'une manière très originale.
Whip Whitaker, le protagoniste incarné - à merveille, comme d'hab - par Denzel Washington est assez typiquement zemeckisien : un mec coincé dans le temps, isolé du monde. Là où les héros des films de Zemeckis étaient jadis littéralement coincé dans le temps (Marty McFly ou Scrooge qui voyagent dans le temps, les femmes de La Mort vous va si bien ou Beowulf qui sont immortels, Forrest Gump qui semble ne jamais vieillir) ou isolé du monde (Marty perdu en 1955, Chuck Noland perdu sur une île déserte dans Cast Away), ici la notion prend une nature plus métaphorique, via l'alcoolisme du personnage, tout comme le site du crash a quelque chose de théorique dans l'image de cette épave échouée aux yeux de tous.
Et c'est le même parcours rédemptoire que certains héros zemeckisiens qui le guidera vers le salut. Je ne sais pas depuis combien de temps Zemeckis est sobre mais je suis prêt à parier que ça coïncide globalement avec La Mort vous va si bien, le début des années 90 en gros. Jusqu'alors, les films de l'auteur ne prenaient pas autant l'aspect de "contes moraux" mais j'ai l'impression que depuis, cette moralité prend une place assez importante dans sa filmo, passant parfois par un discours sur Dieu assez lourdingue. Dans La Mort vous va si bien, la punition réservée à celles qui défient Dieu reste superficielle mais ça va s'accentuer de film en film (Jenny la pécheresse qui meurt dans Forrest Gump, la conclusion pro-foi de Contact et The Polar Express, la christianisation de Beowulf, etc.). Et dans Flight, à peu près tous les personnages évoquent Dieu en parlant à Whip (une hôtesse de l'air qui lui dit de venir dans sa paroisse, un patient cancéreux à l'hôpital, l'avocat qui invoque Dieu avec cynisme, un survivant qui l'invite à prier, un Alcoolique Anonyme, etc.) dont l'avion s'est écrasé devant une église (dont elle a brisé le clocher).
J'avoue avoir trouvé ça plutôt casse-couilles. Ca ne gênera sûrement pas tout le monde (y a que moi qui suis soulé par la fin de Contact et de Signes visiblement) mais bon, disons que ça participe aussi au côté un peu conventionnel du récit.
Alors là pour le coup, il n'y a plus aucune allégorie, contrairement à
Contact ou
The Polar Express. C'est cash. Limite le mec dénigre Dieu et les croyants tout le long et à la fin c'est
"God, help me" avant l'acte de contrition et surtout "c'est grâce à Dieu" dans le discours final en prison, sans oublier les cartes postales de cantiques sur le mur de sa cellule. Brrrr.
Citation:
Parce que c'est ça le vrai problème. Je me demande d'ailleurs si Zemeckis, en bon pénitent, n'a pas aussi opté pour une relative modestie formelle pour ça.
Si c'est très bien raconté tout le long, c'est aussi très classique, tant dans le fond que dans la forme. On pourra discourir des heures sur l'incroyable séquence de l'avion, totalement différente de celle, déjà terrifiante, de Cast Away. La manière dont la caméra reste quasi-exclusivement à l'intérieur, principalement dans le cockpit, faisant monter la pression, sans musique, épousant une noirceur inattendue le temps d'une réplique (la boîte noire). Ca arrive au bout de 20 minutes de film, tu sais qu'ils vont s'en sortir, et pourtant tu agrippes ton siège sur lequel tu es cloué. La maîtrise de Zemeckis sur cette séquence n'a d'égal que celle de son protagoniste, gérant le chaos avec maestria. Ca restera une des scènes les plus mémorables de l'année...
...dommage que le film ne le sera aucunement.
Washington est brillant, Bruce Greenwood toujours aussi bon, John Goodman campe un perso secondaire haut en couleurs à la perfection, James Badge Dale continue les apparitions fugaces marquantes, j'aime bien la partie "enquête/juridique"....mais l'ensemble est globalement sans surprise.
Voilà, j'étais étonné de trouver ça éminemment (re)regardable, surtout au vu de la durée, mais c'est un film sans deuxième niveau de lecture.
En Zemeckis avec la rédemption d'un menteur, je préfère
Beowulf.