Du 6/6 sans faille, j'ai trouvé ça majestueux au possible, tout se joue dans les regards, les plis des yeux, des lèvres, l'occupation du cadre, et c'est surtout d'une intensité folle pendant 3h, qui auraient pu en durer le triple. Quand Emma raconte à Adele la façon dont elle dessine, s'attachant jusqu'à l'obsession sur des eptits détails d'apparence insignifiante, on dirait Kechiche qui parle à son public, sur sa façon de faire du cinéma.
Je vais m'envoyer les 47 pages maintenant avant de répéter tout ce qui a surement deja été dit...
Dernière édition par Mickey Willis le 22 Oct 2013, 16:21, édité 1 fois.
Décidément ce film me rend très bavarde. ça m'arrive rarement.
j'ai écrit un petit texte cette nuit à 3h du mat, pas forcément recherché mais avec quelques analyses même si tout est encore trop frais pour avoir beaucoup de recul
=> Mon visionnage de "La vie d'Adèle" date de dix jours, mais je ne sais toujours pas si j'ai aimé le film. Il y a beaucoup de choses qui m'ont dérangée ou qui m'ont fait sortir du film mais en tout cas j'ai aimé Adèle. Ce personnage est un des plus forts que j'aie vus dans mes aventures cinéphiliques. Et j'en ai vu des paquets de films et de personnages ! Celui-là m'a touché, m'a parlé. Je me suis beaucoup attachée à cette nana qui cherche à être heureuse, qui se casse la gueule, qui découvre l'amour, qui le perd, qui se retrouve seule et incomprise (et qui se rend compte qu'elle l'a été toute sa vie). Les gros plans aident beaucoup. Sa bouche, ses mains, ses fesses, ses seins, ses larmes, ses sourires, ses crises d'angoisse, ses orgasmes, son rire, sa tristesse, sa solitude.. tout ça m'a accompagnée pendant plusieurs jours après le visionnage (et le film m'accompagnera encore longtemps). j'ai beaucoup pleuré aussi parce que sa tristesse s'est mélangée à la mienne.
Pour le film en lui-même, les trois heures ont filé à une vitesse folle et ça aurait pu durer encore et encore sans problème. Il ne se passe pas grand chose en soi mais je ne me suis pas ennuyée car c'est l'histoire d'une vie, d'une période importante de cette jeune femme.
J'ai aimé :
J'ai aimé sa relation avec sa camarade qui l'embrasse "juste comme ça" parce qu'elle est jolie et qu'elle rougit, alors qu'Adèle, ça y est, elle est déjà partie à 100 à l'heure (qui nous montre bien que le personnage est excessif et passionnel !) ça m'a fait plaisir que cette camarade ne fasse pas partie des "copines" qui agressent Adèle devant le lycée, qu'on nous la montre désolée.
J'ai beaucoup aimé les rencontres dans la rue et le bar, les scènes de rendez-vous aux parcs, les discussions, les regards, le premier baiser (franchement super mignon!) entre Emma et Adèle. Les dialogues sont légers, trop peut être. Mais les expressions non verbales rendent les mots superflus. A titre de comparaison, la BA US, sans qu'aucune parole ne soit prononcée, est encore plus forte que la BA française alors qu'elles montrent à peu près les même scènes. La scène du premier baiser dans le parc n'a aucun dialogue (à part "on est bien là") et elle est très forte ; les rires, les pauses, l'attente et surtout les gros plans sur les sourires et les regards très expressifs. La scène du bar lors de la deuxième rencontre aussi est excellente. Tant au niveau technique (la photo avec la lampe orange qui les met superbement en valeur et le cadrage qui donne l'impression qu'elles sont seules au monde) qu'au niveau jeu (verbal et non verbal), surtout du côté d'Adèle qui voit Emma en hauteur. Elle est présentée de profil et à contre "jour" (la lampe) ce qui fait qu'on la voit bien avaler sa salive, d'un coup stressée, angoissée mais aussi contente de retrouver cette fille aux cheveux bleus.. tout ça émeut et fait sourire bêtement.
J'ai aimé ce coup de foudre, montré comme quelque chose qui te tombe dessus sans prévenir, dans la rue, qui manque de te faire écraser. Cette passion dévorante qui ne tient que par le sexe (cru !) car il est évident que tout les oppose. Cette relation passionnelle. Les "je t'aime" n'ont pas lieu d'être, tous les gestes et regards le crient. Une passion qui s'éteindra lorsque le sexe ne sera plus. Restera la tendresse mais ce ne sera pas suffisant.. Lorsqu' Emma se rendra compte qu'elle préfère être en symbiose intellectuellement plutôt que sexuellement, le contraire de ce qu'elle a avec Adèle, alors leur histoire sera totalement terminée. Peu importe si la jeune femme à la mèche folle est encore complètement amoureuse et s'accroche désespérément.
Mais surtout la scène du café à la fin qui, pour moi, regroupe pendant ces quelques instants toutes les émotions perçues pendant tout le film
: amour, passion (=sexe), tendresse, gêne, incompréhension (qui est cette femme que j'ai aimée ? Pourquoi cette femme ne m'aime plus et pourquoi ne m'a -t-elle pas aimée comme je suis ?), tristesse, abandon (Adèle se rend compte que leur relation est définitivement terminée),.. les dialogues sont justes, posés, percutants, désespérés ("tu ne m'aimes plus?" ) durs ("non.. mais j'aurais toujours une grand tendresse pour toi"), triste (quand Adèle raconte son quotidien). La passion revient, l'espace d'un baiser fiévreux et désespéré, deux mains qui se serrent, une troisième entre des jambes, des larmes,.. Adèle Exarchopoulos et Léa Seydoux sont extraordinaires. Il faut avoir un talent fou et être un grand metteur en scène pour accéder à ce genre de résultat, à ce degré de jeu, à une mise en scène aussi minimaliste mais qui va droit au coeur.
Il est dommage que le reste ne suive pas cette direction sensible et subtile.
Je n'ai pas aimé la façon dont Kechiche a présenté
les différences de milieu entre Emma et Adèle (la comparaison huître/pâtes est bien trop simple et vulgaire) et le fait qu'il présente le milieu artistique comme pédant et non ouvert d'esprit (Emma la peintre ne veux pas comprendre ni accepter qu'Adèle s'épanouisse dans son métier d'institutrice, et au final c'est pour ça qu'elle la quitte. ce n'est pas une histoire de tromperie, c'est juste qu'elle a honte). Et puis aussi pourquoi, au bout de 2 (3?) ans de vie commune, aucune ne comprend ni ne partage la passion de l'autre ? Pourquoi au bout de tant d'années Adèle ne comprend-elle rien à l'art et au métier d'Emma alors qu'elle nous est montrée comme une femme qui a soif d'apprendre ? Et, si elle aime Emma, pourquoi elle ne cherche pas à entrer dans son monde ? Inversement, même si pour Emma le métier d'institutrice n'est pas assez "gratifiant", pourquoi elle ne fait pas d'effort puisqu'elle aime Adèle et qu'en plus ça a un rapport avec l'art ? Le mystère du couple et du coup de foudre.. Mais j'ai trouvé ça injuste cette notion d'incompréhension alors qu'aucune n'a cherché à aller vers le monde de l'autre. Et même si c'est présent tout au long de leur relation, les scènes du diner mondain, de la discussion au lit juste après et du petit déjeuner ("tu veux une tartine?") représentent clairement tout ça et m'ont bien refroidie..
Ensuite, je n'ai pas aimé la façon dont il nous tient la main pour nous montrer comment Adèle apprend la vie (avec les livres scolaire, Marivaux, Sartre). Adèle apprend ce qu'est le coup de foudre dans un livre et bam le lendemain elle le vit ! C'est un peu trop voyant..
Et je n'ai pas aimé les deux grosses scènes de sexe. j'ai eu l'impression de voir du catch. Tout le cadre change à ce moment là, il n'y a plus de gros plans mais des plans larges, la lumière est travaillée et le son est amplifié. Je me suis sentie agressée, je n'ai pas l'habitude d'être gênée mais là je l'ai été. J'ai même détourné les yeux tellement (pour moi) rien n'est réaliste, rien n'est sensuel, rien n'est beau. Mais c'est surtout parce qu'on voit tout. Les corps sont beaux à voir et les gémissements sont agréables à entendre mais ça ne m'excite pas (c'est le but non ?). Au cinéma, je suis davantage excitée quand ce genre de scène laisse place à l'imagination, quand c'est suggéré, quand c'est à moi de me faire mon propre scénario. Par exemple je préfère juste entendre les bruits (des requêtes, des accélération de souffle, des gémissements) et voir autre chose que les corps (ombres, porte, arbre, etc), ou je préfère voir que des parties du corps comme par exemple une main qui serre le drap ou qui tire des cheveux (selon le niveau de la passion), une bouche qui s'ouvre, des yeux qui pétillent. Ou même carrément voir que le début de la scène d'amour. Et là présentement pour Emma et Adèle je vois tout, le réalisateur m'impose tout ça et j'aime pas. Voir des fesses en gros plans, bof. Voir des visages collés au sexe, bof. Voir deux corps emboités, bof. Ce qui m'a dérangé aussi c'est de voir Adèle aussi sûre d'elle. Alors qu'on la voit tout au long de ces 3h, apprendre, échouer, recommencer, grandir, et là BAM elle baise comme une pro ? à l'image de son apprentissage tout au long du film j'aurais aimé le voir ici aussi. Entendre Emma la guider, lui montrer, lui expliquer. Voir Adèle excitée, stressée, en recherche, en demande, m'aurait semblé plus logique et m'aurait d'avantage excité.
MAIS je peux comprendre ce choix de les présenter de cette façon. Le personnage d'Adèle bouffe tout pendant le film. Elle dévore ses pâtes, son kebab, ses cheveux, ses livres, ses gâteaux et même ses croûtes de blessure (beurk), et la vie. Elle dévore donc Emma, la bouche d'Emma, les seins d'Emma, le sexe d'Emma, les fesses d'Emma. Le personnage est excessif et pulsionnel, c'est tout ou rien. Et puis c'est vrai que chacun fait l'amour comme il veut.. même si ça nous plait pas (on dirait le slogan du mariage pour tous ^^)
Par contre, les deux autres plus petites scènes d'amour qui sont des fantasmes sont magnifiques. Les deux femmes sont ensemble aussi et là c'est réaliste, beau, excitant même (car on ne voit pas tout justement ! )
Pourquoi ces différences ? Il peut y avoir plusieurs raisons : comme je l'ai dit plus haut, Kechiche à voulu représenter la passion dévorante et pulsionnelle. Le sexe pulsionnel n'est pas beau, n'est pas doux, il est plus proche de l'animal que du petit couple du vendredi soir. On peux aussi penser que, comme il a filmé beaucoup de ces scènes, au montage il a mis plein de bouts à la suite sans qu'il y ait de "logique de narration" mais comme une volonté de montrer qu'elles se bouffent dans tous les sens en même temps et de toutes les façons possible. Ou bien alors évidemment il les a montrées de cette façon parce qu'il n'y connaît rien.. tout me semble sensé..
Il aurait été parfaitement faisable de représenter tout cela de manière réaliste en admettant ne pas savoir mettre en pratique ces idées et d'engager une consultante extérieure (les Wachowski l'ont bien fait pour "Bound" ! ). Dommage.
Mais au-delà de tous ces éléments, de tout ces côtés grossiers, il reste beaucoup de choses : les deux actrices (même si Adèle exarchopoulos éclipse carrément Léa Seydoux), l'histoire d'amour et l'histoire de vie, le montage, le cadrage, la lumière, la musique.....
.....Et le visage d'Adèle...
Dernière édition par Mathilde le 05 Nov 2013, 17:48, édité 2 fois.
Je n'ai pas aimé la façon dont il nous tient la main pour nous montrer comment Adèle apprend la vie (avec les livres scolaire. Marivaux, etc). Adèle apprend ce qu'est le coup de foudre dans un livre et bam le lendemain elle le vit ! trop fort..
Je ne suis pas sur qu'il fasse faire un lien aussi lourdaud entre le texte de Marivaux et le coup de foudre. Tout le côté scolaire, je le place plus dans la thématique de l'apprentissage que tisse Kéchiche à l'intérieur du film.
Je n'ai pas aimé la façon dont il nous tient la main pour nous montrer comment Adèle apprend la vie (avec les livres scolaire. Marivaux, etc). Adèle apprend ce qu'est le coup de foudre dans un livre et bam le lendemain elle le vit ! trop fort..
Je ne suis pas sur qu'il fasse faire un lien aussi lourdaud entre le texte de Marivaux et le coup de foudre. Tout le côté scolaire, je le place plus dans la thématique de l'apprentissage que tisse Kéchiche à l'intérieur du film.
je l'ai ressenti comme ça puisque les deux scènes se suivent (ou presque je me souviens plus exactement) il y a d'autres métaphore livre/vie présentes dans le film mais j'ai oublié. si quelqu'un s'en rappelle ?
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