Vieux-Gontrand a écrit:
Recemment j'ai dû me rendre dans une région de savanne (donc pas de forêt équatoriale) à l'est du Congo (pour le dire en clair : à Lubumbashi) et il est vrai que, vu d'avion, il y avait un nombre impressionnant de foyers d'incendie (localisés), visiblement pour déboiser. C'est une region potentiellement riche et relativement bien équipée, mais de facto pauvre, le poids des mines est tellement important qu'il n'y a même plus de fermes et de paysans. La nourriture de la ville est importée des pays anglophones au Sud, alors que l'espace existe pour la culture et la bétail. Simplement la propriété foncière n'appartient qu'aux exploitants miniers. L'exode rural vers les grandes villes minières de la région n'arrange rien, car il interrompt la transmission du savoir-faire agricole.
On n'observait pas cela dans les pays voisins, donc la politique joue là un rôle.
Les exploitants forestiers ou miniers profitaient visiblement du vide de pouvoir local (pas de gouvernement entre décembre et la semaine passée à cause d'une crise politique particulièrement complexe) pour défricher.
Je m' auto-reponds. J'ignore si ces feux sont destinés à l'agriculture ou bien au nettoyage avant l'exploitation minière. Mais il est manifeste que si la terre risque de devenir une mine à moyen terme, on ne trouvera même pas des metayers pour la valoriser. Du coup la population rurale préfère migrer vers la ville où elle deviendra soit des petits commerçants, soit des mineurs ( et encore les groupes chinois embauchent des ouvriers chinois).
C'est à la fin la ville de Lubumbashi ou la province qui (je crois avec le groupe Forest) achète des terres et joue ce rôle de métayer, notamment pour produire du pain industriel, et non plus du pundu, cassant encore plus l'agriculture vivrière et familiale.
Une des conclusions c'est que plus l'état est pauvre plus on lui demande d'être interventionniste. Cela s'appelle le capitalisme.
Il y a des pages des
Damnés de la Terre où Frantz Fanon sent ce type de logique se mettre en place, et dit de manière assez courageuse vu son parcours que les états africains ne pourront les surmonter qu'en adoptant une neutralité idéologique dans les conflits entre Bloc de l'Ouest et Bloc de l'Est. Il place donc lui-même ces problématiques macro-économiques à la limite de sa justification de la violence, dimension que Sartre n'a absolument pas vue dans sa préface qui le travestit en apologue du terrorisme (alors qu'il décrit la violence comme une étape abstraite dans un odyssée de la conscience, la violence est chez lui comme sans doute chez Hegel la même chose que l'insuffisance de la morale).
Ceci dit son point de vue sur les paysans comme classe est lui-même problématique.
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