Müller a écrit:
Aucun problème, certes, mais surtout aucun rapport. Tolkien a cristallisé sa connaissance encyclopédique, formelle comme théorique, des littératures médiévales en un roman hommage, Maurice Druon a romancé les rivalités et les contextes historiques de succession de certains rois de France. Le fait que Martin se réclame de Druon n'a rien à voir avec son rapport de rivalité mal placée et bizzarement mal assumée doublée d'une lecture très indigente du SDA.
Sauf que Martin assume très bien son approche :
"I wanted to combine the wonder and image of Tolkien fantasy with the gloom of historical fiction."
Bref, du Tolkien... raconté par Maurice Druon.
Tes histoires de rivalité, ça sort de la bouche des journalistes qui lui posent des questions sur Tolkien à la pelle depuis 15 ans (et ce surnom à la con, le "Tolkien américain"), et c'est pour ça qu'il en parle autant.
Et au-delà de ça, tout ce que tu décris, je vois même pas en quoi ce serait des défauts. Comme si vouloir répondre à Tolkien dans ses propres mots et son propre univers (si on part du principe que c'est ce qui l'anime), c'était une tare créative en soi, et comme s'il fallait pas y toucher, à Tolkien.
D'autant plus que plein de choses que tu décris comme positives dans la série télé, genre "Passée cette entrée en matière, ça devient un gimmick qui nécessite au fil des saisons toujours plus d'outrance pour continuer à fonctionner. Et au revisionnage, il apparaît finalement que chaque mort de personnage principal, aussi choquante qu'elle ait pu être à chaud, arrivait à point nommé car il ou elle avait épuisé tout intéret narratif, et se trouvait déjà depuis quelques épisodes, voire plus dans certains cas (Robb, par exemple), en sursis scénaristique"... c'est déjà dans le roman, et les points chauds dont tous les fans de la série télé se gargarisent ici et là, ils viennent tous de chez Martin, c'est pas des ajouts de Benioff et Weiss.
Müller a écrit:
Sa focalisation sur la mort de Gandalf qui aurait dû être définitive est purement scénaristique (donc réductrice), et utilisée en contraste avec sa manière à lui de ne pas hésiter à laisser pour mort un personnage compétent, héroïque, protecteur et intelligent. Sa série de questions sur la politique fiscale d'Aragorn, le génocide des Orcs, leur capacité ou non à niquer avec les Elfes vu qu'ils ont les mêmes origines... D'apparence humoristique par son excès, elle suit en réalité la même logique : "voilà ce dont moi je parlerais si..."
So ? En quoi est-ce un problème ?
D'ailleurs, tu as beau décréter que ces questions sont débiles, moi je les trouve tout à fait pertinentes... sans qu'elles nuisent à l'oeuvre de Tolkien pour autant, qui tient plus de la fable et du conte qu'autre chose.
Le sujet des romans de Martin, c'est avant tout le pouvoir (comme dans LOTR, d'ailleurs), et à ce titre, son approche n'a rien d'absurde.
Müller a écrit:
Et le problème structurel du nihilisme et l'absolutisme relativiste (tous ces fameux "points de vue"), c'est qu'il s'époumone très vite lorsqu'il est étiré au format saga.
Sauf que ces histoires de nihilisme et de relativisme, ça sort de ta tête. A moins d'être très con, on sait très bien qui est bon et mauvais dans les livres de Martin (et lui le sait aussi), et si on peut adorer Tywin, Joffrey, ou Cersei, on n'a qu'une envie, c'est qu'ils crèvent, et ça aussi, Martin le sait très bien. Y a aucun nihilisme, juste une volonté de donner une voix crédible aux méchants, ce que la fantasy a toujours été incapable de faire.