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MessagePosté: 15 Mar 2017, 11:01 
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L’histoire vraie de Percival Harrison Fawcett, un des plus grands explorateurs du XXe siècle.
Percy Fawcett est un colonel britannique reconnu et un mari aimant. En 1906, alors qu’il s’apprête à devenir père, la Société géographique royale d'Angleterre lui propose de partir en Amazonie afin de cartographier les frontières entre le Brésil et la Bolivie. Sur place, l’homme se prend de passion pour l’exploration et découvre des traces de ce qu’il pense être une cité perdue très ancienne. De retour en Angleterre, Fawcett n’a de cesse de penser à cette mystérieuse civilisation, tiraillé entre son amour pour sa famille et sa soif d’exploration et de gloire…


J’avais lu le scénario donc je savais à quoi m’attendre et ce qui m’avait déçu à la lecture (le fait qu’au final on passe peut-être moins de 50% du film dans la jungle) est beaucoup mieux passé à l’image. Mais c’est ce qui rend le film aussi peu aimable de prime abord, presque trop cartésien, ne délivrant pas l’épopée d’aventures que le titre et le pitch laisse imaginer. Au contraire même, on sent que Gray a voulu expurger son projet de toutes péripéties inutiles, de tout spectacle superflu. Dans la version du scénario que j’avais lu il y avait une scène de traversée épique d’un pont suspendu. Je m’étais dit immédiatement que Gray allait nous faire sa scène du pont de Sorcerer. Mais est-ce pour une raison de budget ou autre, cette scène (qui était un peu le morceau de bravoure du film) n’est pas dans le film (ni de près, ni de loin d’ailleurs). On n’est pas non plus dans un périple mystique à la Aguirre, il faut tout de suite évacuer cette attente. Chez James Gray aucun dolorisme, les mois/années passées dans la jungle par Fawcett se réduisent à quelques scènes sobres où l’on ressent malgré tout la difficulté de l’environnement sans que cela ne devienne le sujet (en ce sens c’est l’anti The Revenant). Ce qui intéresse James Gray ce n’est pas l’homme dans la nature à la recherche de l’impossible c’est la vue du dessus, l’homme avec un grand H dans une nature avec un grand N.

Car le point central de The lost city of Z c’est son personnage principal. Gray construit peu à peu à travers Fawcett un archétype de héros total, un grand homme bon, humaniste, fidèle à ses principes et avec une vision du monde ayant un siècle d’avance. Ce qui est très beau c’est que ce n’est pas dans la jungle que son héroïsme rayonne le plus mais plutôt dans la conviction des ses opinions, qu’il fasse un discours devant un parterre de scientifiques hilares ou qu’il refuse de trahir ses hommes face à co-équipier qui a mis en péril leurs vies à tous. C’est un personnage magnifique de bout en bout avec ses zones d’ombre évidemment, cette obsession qui est la sienne (et qui est à la fois profondément intime et totalement universelle) et qui finira par détruire sa famille.

C’est dans l’exploration de cette obsession que le film est sans doute le plus fort. Dans la manière de composer un espace mental où cohabitent sans cesse les deux vies de Fawcett. Celle dans la jungle et l’autre. Et c’est dans l’articulation de ces deux mondes que le film est sans doute le plus brillant, les points de montage sont toujours très précis et surprenant, des visions permanentes venant envaser un monde dans un autre. Aussi dans cette manière de figurer le voyage à proprement parler. En un cut parfait on a traversé l’Atlantique et parcouru des milliers de kilomètres en train, il y a là à la fois une passerelle insécable entre les deux mondes et en même temps une dichotomie totale et positivement irréconciliable. C’est vraiment dans cet espace cinématographique que le personnage de Fawcett existe et va se révéler. Tout cela se résume aussi magnifiquement dans le troisième espace du film, plus bref mais néanmoins fondamental, celui de la guerre. Je garde en tête depuis deux jours cette scène pivot absolument bouleversante de la voyante russe. Là au fin fond des tranchées, dans un entre deux entre la vie et la mort, entre la sauvagerie tant décriée et l’humanité de ces soldats qui n’en font qu’un, Fawcett est renvoyé à son obsession, à cet autre espace où sa vie prend tout son sens, avec la contamination visuelle de sa jungle mental
qui préfigure sublimement le dernier plan.


Un film qui hante, qui laisse ce goût d’absolu en bouche comme la recherche intime de cet eldorado introuvable. Je garde en mémoire cet enchaînement de plans incroyable et absolument bouleversant où Charlie Hunnam, porté par les indiens tend la main au ciel et au lieu d’y voir l’objet de l’obsession qui lui a coûté la vie (même si finalement le film ne conclut rien à ce propos) y voit le message de sa femme où elle lui explique comment elle élèvera ses enfants. Ce qu’il a toujours cherché est là, dans les étoiles au-dessus de sa tête, son absolu c’est la vie elle-même, cette recherche pour une vie menée selon la force de ses convictions jusqu’au bout du monde. Encore une histoire de père et de fils.

Ainsi le film se conclut sur cette note merveilleuse, l’aventure n’était pas dans la jungle, pas dans les dangers et les péripéties qui attendaient Fawcett et son équipe mais elle était dans la vie elle-même, dans le sacrifice d’aller explorer l’humanité dans un mouvement aussi intime qu’universel. Je tombais justement hier sur cette citation de Horace Mann qui résume bien quelque part la dialectique du film, « Be ashamed to die, until you have won some victory for humanity ».

Le film m’a hanté comme rarement, infusant lentement sa grandeur. Car il est d’une certaine manière d’une humilité désarmante. Même la photo de Kondjhi m’a semblé moins visible que d’habitude, plus naturaliste. Le film est beau attention mais jamais dans la démonstration. Un film que j’ai déjà envie de revoir pour mieux me laisser submerger par cette obsession de Fawcett, par cette jungle mental qui dévore tout. A l’image d’un dernier plan d’une beauté renversante aussi limpide dans son symbole
une épouse prisonnière à jamais d’une jungle métaphorique où réside l’espoir de retrouver son mari et son fils vivants.
que signifiant dans la dialectique plus sous-jacente du film
cette contamination cinématographique des espaces.
Grand film.

5/6

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CroqAnimement votre


Dernière édition par Art Core le 03 Sep 2019, 14:57, édité 1 fois.

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MessagePosté: 15 Mar 2017, 11:28 
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J'aime bien l'affiche


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MessagePosté: 15 Mar 2017, 11:33 
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C'est pas l'affiche française mais oui elle est superbe. C'est mon fond d'écran de téléphone d'ailleurs 8).

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MessagePosté: 15 Mar 2017, 15:11 
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Il n'y a d'ailleurs pas une seule image aussi jolie dans la bande-annonce qui m'a paru bien terne;


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MessagePosté: 15 Mar 2017, 15:23 
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Le film l'est un peu, c'est un peu dommage mais ça va bien avec le projet global et ça veut pas dire, une fois de plus, qu'il est moche.

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CroqAnimement votre


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MessagePosté: 15 Mar 2017, 16:22 
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Beau texte

j'ai adoré


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MessagePosté: 15 Mar 2017, 16:35 
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tape dans ses mains sur La Compagnie créole
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Putain je veux!!
Et bien plus encore depuis que j'ai kiffé Silence (sans savoir s'il y a un réel rapport).

Tous ces 5/6 foutent la pression, aussi.

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Ed Wood:"What do you know? Haven't you heard of suspension of disbelief?"


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MessagePosté: 15 Mar 2017, 19:16 
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J'ai cassé la lignée :mrgreen:

Alors ca pue clairement le cinéma, on retrouve même du Werner Herzog la dedans mais putain qu'est ce que c'est mal écris, on ne ressent jamais la passion qui devrait habiter les personnages, il y a zéro interactions qui fonctionnent, y a toujours ce "il manque une scéne" pour tel ou tel perso à tel point que ca en devient super frustrant (l'exemple le plus marquant étant Patterson, super classe mais qui traverse tout le film en ayant rien à défendre.)
Je ne parlerais même pas de la gestion du temps en mode "rien à battre" 20 ans se passe et on ne le ressent jamais, idem pendant les expéditions de 2/3 ans qui ont l'air de durer 15 jours. J'ai lu que Gray avait galéré pour obtenir ne serait ce que le minimum de fond pour faire son film et ca se sent tout le temps, avec un budget plus confortable ca aurait peut être permis de faire une grande fresque, de développer ses intrigues et ses persos et nous livrer le film qu'on était en droit d'attendre. Je ne serais jamais méchant sur ce film car c'est le cinéma que j'aime, on sent le nouvel Hollywood et tout ca mais au final malgré toutes les bonnes intentions c'est légèrement foiré. Mais la fin est jolie ouais.


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MessagePosté: 15 Mar 2017, 20:17 
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Je comprends parfaitement ce que tu décris mais c'est tout le projet de Gray. Je viens de lire son interview dans les Inrocks et il a délibérément choisi cette structure en épisodes antispectaculaire. Il a une très belle expression pour définir son film, "tapisserie épique".

Karloff a écrit:
Beau texte


Merci m'sieur !

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MessagePosté: 15 Mar 2017, 21:37 
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ça fait plaisir. Je trouve la narration dingue, totalement post-moderne, et bien sûr volontaire vu que l'on navigue dans la jungle mentale du héros qui est le seul à ne pas vieillir à l'écran (idée sublime, comme s'il restait un éternel adolescent en quête d'aventure et d'un nom)

sur la fin

tout le dernier tiers peut être interprété comme un délire du héros après la première guerre mondiale, devenu un "légume" qui observe la vie se dérouler (le plan sur la chaise, non ?) sinon cela m'a fait grave penser à 2001 - je pense que c'est volontaire


sur la scène de la voyante

cela m'a grave pensé à Ibicus, la bd géniale de Rabaté inspirée d'un livre de l'autre Tolstoï. James Gray est fan de littérature russe, je me demande si c'est une influence réelle


sinon comme toi Art Core, le film me hante. Je me suis fait envoyer le livre des notes de l'explorateur et le livre qui a été adapté tant je veux déjà m'y replonger. Film immense.


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MessagePosté: 15 Mar 2017, 21:44 
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Antichrist
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et dans l'interview de Match

Comme “Silence” de Martin Scorsese, le film parle de foi. Est-ce l’époque qui remet le spirituel au cœur de nos vies ?
Oui. J’ai été très attiré par cet aspect du film de Scorsese... Je suis athée, mais le cinéma est pour moi une façon de croire. D’accepter la mortalité ou d’une certaine façon de la transcender. L’art est ma version de la religion. Il ne s’agit pas d’une foi aveugle, mais au contraire de questionner et d’explorer cette foi. C’est aussi parce que je vieillis que je me pose ces questions.


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MessagePosté: 15 Mar 2017, 22:14 
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Robot in Disguise
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Étrange film dont le moteur, au lieu d'être la plongée dans la jungle, est en fait le manque de jungle. La narration est volontairement hoquetante et, comme le héros, on est frustré et on veut y retourner. C'est marrant comment ça convoque les classiques du films de jungle - APOCALYPSE NOW, AGUIRRE et forcément FITZCARRALDO cité presque texto - mais pour ne pas totalement y aller, créer un manque.

Le film dégage la puissance simple du classicisme en béton armé, mais malheureusement on reste un peu à distance du parcours du héros. Le problème, c'est Charlie Hunnam. Il est mieux servi que dans PACIFIC RIM et on sent qu'il est à 110% de ses capacités, mais il est juste tellement peu intéressant à regarder. Comparez le à Macfadyen, à Pattinson, au mec qui fait Manley, à McDiarmid... il se passe tellement plus de choses chez eux. C'est dommage.

Par la force du scénario on voit l'évolution entre le soldat cocky du début et le mystique de la fin, mais ça reste littéraire, on ne le ressent pas vraiment. Et on sort donc du film certes troublé et stimulé car les films ainsi incomplets font toujours cet effet, mais on n'est pas repus, pas vraiment satisfaits.

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Liam Engle: réalisateur et scénariste
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MessagePosté: 15 Mar 2017, 22:16 
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sur Charlie Hunnam, je trouve surtout qu'il ressemble beaucoup à Brad Pitt par moment - et oui, il joue pas super bien.

Par contre, Pattinson est parfait. Et je suis pas d'accord sur l'aspect littéraire du film, je trouve au contraire qu'il évite cet écueil.


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MessagePosté: 15 Mar 2017, 22:41 
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Hunnam est bien pour moi. Il a cette espèce de beauté hiératique du héros mais oui c'est pas un immense acteur. En effet Pattinson est tout de suite plus intéressant, il y a beaucoup plus d'aspérités (j'aime beaucoup son perso d'ailleurs).

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CroqAnimement votre


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MessagePosté: 15 Mar 2017, 22:48 
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quand on le revoit dans les tranchées, j'ai eu les larmes aux yeux


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