Forum de FilmDeCulte

De l'aube à la nuit, quelques heures dans l'existence de Monsieur Oscar, un être qui voyage de vie en vie. Tour à tour grand patron, meurtrier, mendiante, créature monstrueuse, père de famille...
M. Oscar semble jouer des rôles, plongeant en chacun tout entier - mais où sont les caméras ?
Il est seul, uniquement accompagné de Céline, longue dame blonde aux commandes de l'immense machine qui le transporte dans Paris et autour. Tel un tueur consciencieux allant de gage en gage.
A la poursuite de la beauté du geste. Du moteur de l'action. Des femmes et des fantômes de sa vie.
Mais où est sa maison, sa famille, son repos ?

Après les réactions démesurées du festival (il paraît que ça se gondolait sévère en projo presse, ce qui était beaucoup plus modéré quand j'ai rattrapé le film avec un public de salle un peu plus normal) et les cris d'orfraie concernant l'absence au palmarès du poète maudit après son interminable traversée du désert au profit du martyr ultra-haï Carlos Reygadas, que retient-on de Holy motors? Probablement qu'il n'avait aucune chance et qu'il n'est pas étonnant qu'hors France le film touche beaucoup moins, faisant penser à un film à sketches qui enchaîne les vignettes avec une vraie logique de passe-plat (hop je retourne dans ma limo, j'enfile un postiche, et on passe à autre chose) où 75% des trucs ne fonctionnent pas quand ils ne sont pas embarrassant (la scène butons les banquiers au Fouquet's, le numérique, la scène du double, la scène avec Eva Mendes, au secours) avec un ton sentencieux de vieux con par trop solennel et autocentré (clin d'oeil amants du pont neuf, grosses larmes pour Katia Golubeva). Alors Holy motors, nouveau délire général d'une presse française qui se touche après Pater l'année dernière? Quand même pas.

Le film m'a fait penser à un Paris dernière nawak avec de gros éclairs de génie, où tout peut ressurgir, fantômes du passé chez Franju et de lieux en déperrissement comme la samaritaine, où Kylie Minogue remplace au pied levé Binoche qui s'est déballonné dans cette grande retro caraxienne néo-surréaliste, presque un film testamentaire en fait, déjà si jeune. Les moments accompagnés d'une bande son sont au-delà du sublime, notamment un passage sur du Gérard Manset. Mais je n'arrive pas à me départir de ce côté segmentaire fourre-tout, où on trouve forcément son bonheur, au milieu de fadaises.
4/6

J'attends avec impatience le 1/6 de Freak

J'ai adoré, alors que je n'aime pas trop le cinéma de Carax. J'ai trouvé ça aérien, ludique, poétique... Les poils qui se dressent pour le passage Mendes, l'entracte, le passage Manset et le passage Minogue.

Je pense aussi que le film va bider sévère.

Tu devrais faire autre chose de ton congé paternité que poster tes avis cannois, père indigne!

LOL

La bande-annonce et les avis dithyrambiques attisent autant ma curiosité que ma méfiance.

En Terminale, dans le cadre de l'option Ciné, on devait réaliser un documentaire.
On avait choisi comme sujet un projectionniste dans une petite salle de banlieue et le tournage terminé, il nous a laissé assister gratuitement à une séance de Pola X.
J'ai pas tenu plus de 20 minutes.

C'est mon unique expérience du cinéma de Léos Carax.

_________________
UBERLINKS toujours dispo sur OCS et MyCanal!

le cadeau

Un rapprochement certainement pas anodin qui décuple mon envie d'aller voir le film. D'ailleurs je suis en pleine séance de rattrapage: il ne me reste plus que Boy Meets Girl à voir. Il vaut le coup ?

_________________
The Necks : Body

C'est pas pire que le reste.

_________________
N'écoutez pas Film Freak

Evidemment.

Pub géniale.

_________________
I think we're gonna need a helmet.

C'est quoi un sous-verre, un frisbee ?

_________________
CroqAnimement votre

Génie.

Merde, moi qui pensais que c'était une idée de campagne virale de Carax.

Attention SPOILERS (si on peut appeler ça ainsi dans ce genre de cas de figure)


Bon, avant de parler du film on est un peu obligé de parler de Carax, de son parcours de cinéaste adulé puis maudit et de sa situation de beautiful loser qui force déjà l'indulgence que l'on peut avoir à son égard. C'est Carax lui-même qui ouvre le film justement, ouvrant avec son doigt d'homme-machine cinéma la boîte aux mille merveilles dans une première séquence à la beauté onirique saisissante.

Je suis d'abord surpris de constater à quel point le cinéaste rattrape le wagon de la modernité après 13 ans d'absence, une certaine forme de modernité symbolisée par les constructions narratives de Weerasethakul qui tire quelques unes de ses séquences vers l'abstraction. Dans Holy Motors, deux séquences sublimes utilisent cette même construction, étirant celles-ci vers une abstraction purement visuelle: l'une dévoilant le coït de deux monstres synthétiques et l'autre se finissant par une forêt de macroblocs. Je trouve cette idée très belle, car après cette longue absence, le cinéma a changé, il s'est numérisé mais au lieu d'être dans la nostalgie de la pellicule (voire la moquerie de la motion capture), Carax essaye de tirer de la beauté de ces nouvelles caméras "plus petites que nos têtes" où l'on ne dit plus ce fameux "moteur!" avant de lancer le tournage.

L'autre sujet du film est le "faux" ou plutôt le "faire semblant" cher au métier d'acteur. Entre deux rhabillages dans cette loge-limousine où l'on montre tous les artifices, Holy Motors nous fait alors entrer et sortir de plusieurs segments qui donnent au film cet aspect somme et disparate, un va-et-vient éprouvant que serait la vie de Mr Oscar, qui ne cesse de revivre. Eprouvant pour le spectateur également car avec un tel procédé se pose le problème de l'identification, de l'attachement et de l'émotion. Comment être ému par ces courtes histoires où l'on sait que tout n'est que "faux" ? Comment y croire ? Pourquoi continuer si personne n'y croit ? D'autant plus que Carax a tendance à désamorcer toute émotion naissante par une farce (la famille singe), une rupture de ton (le dialogue entre le père et sa fille, sonnant faux sur la fin) ou l'étrange vertige d'une mise en abyme (j'ai pensé à Inland Empire). Le spectateur pourrait être de marbre et ressembler alors à ce reflet fantômatique de nous que le miroir nous renvoit à la figure au début du film. C'est finalement un certain désespoir qui gagne le film lentement sur sa fin, au détour d'une belle scène planante à la Samaritaine où entre deux missions d'acteurs, Carax nous rappelle que l'on est encore dans le faire-semblant (on y chante même, (une très belle chanson originale d'ailleur)), que l'on est encore au cinéma et que le cinéma ce n'est que ça. 5.5-6/6.

_________________
The Necks : Body

Sacré morceau quand même. Rarement un film m'aura été aussi difficile à "noter", à décider si j'ai adoré ou juste trouvé ça ludique avec de gros coups de mou et un aspect quand même assez vain.
Pour l'instant on va dire que j'ai beaucoup aimé. Que je suis peu à peu rentré dans le jeu du film, dans son système si particulier, si obscur, échappant à toutes les règles, à tous les genres, à tous les cinémas. Ce drôle de films à sketchs qui semble reproduire une parabole sur le cinéma en même temps qu'une célébration, où tout n'est qu'un passage, un moment où l'on vient jouer un rôle pour repartir aussitôt après, mais également une parabole sur la vie, offre quand même des moments très forts (le retour de Mr Merde, la Samaritaine, les singes) et d'autres en creux un peu absents d'eux-mêmes (le père et sa fille, le vieux mourant).
Je sens que c'est un film qui va se digérer et je ne sais pas ce qui va en rester dans quelques jours/semaines car il y a aussi quelque chose d'assez évanescent et insaisissable ici qui fait que j'ai été touché mais très en surface, que le film ne m'a jamais vraiment bouleversé. Et puis il y a certaines choses que je n'ai pas aimé (le dernier plan notamment amusant mais un peu ridicule en même temps).
Mais en tout cas je suis content que ce film existe, qu'il y ait cette audace là dans le cinéma d'aujourd'hui. Je ne suis pas choqué que le film n'ait rien eu à Cannes (j'ai pas vu le Reygadas ceci dit), c'est quand même extrêmement particulier et j'ai comme l'impression que le film s'adresse en particulier aux français qui connaissent Edith Scob (le coup du masque c'est bof quand même) et qui connaissent le cinéma de Carax (le mec s'auto-référence à tout va : la course de Lavant, le Pont-Neuf...).

En tout cas c'est très fort, très riche, très dense et c'est absolument singulier.

5/6

_________________
CroqAnimement votre