Forum de FilmDeCulte

Longtemps peu attiré par les textes posthumes de Tolkien, et de manière générale par les textes inachevés remaniés par un continuateur, j'ai franchi le pas au détour d'un commentaire laconique qui vendait le truc en mode "allez-y, c'est noir".

Et ça l'est. The Children of Hurin rappelle beaucoup Beowulf, même si c'est de la prose : une prose qui émule le style médiéval, abrupt et elliptique. C'est l'histoire du déroulé ineluctable d'une malédiction infligée par Morgoth, le N+1 de Sauron, à Hurin après sa défaite sur le champ de bataille. Malédiction qui va pourrir la vie de ses enfants éxilés par la menace permanente d'une guerre totale.

Crépusculaire, limite apocalyptique. Violent et désespéré, avec un héros (auto)destructeur. On est loin de la pastorale héroïque des Hobbits, plutôt dans l'étendue du mal à échelle humaine que réservent les antagonistes suprêmes à leurs ennemis en difficulté, loin des champs de batailles, des conseils de guerre et des missions undercover pour y mettre fin.

Très beau texte, très triste.

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Looks like meat's back on the menu, boys!

Ce que tu décris fait penser au chapitre "le nettoyage de la comté" dans le retour du roi

Un Balcon en forêt - Julien Gracq

Encore magnifique même si je commence à comprendre ceux qui disent qu'il écrit toujours le même roman, et pourquoi il n'est pas au sommet de la littérature française (enfin il l'est, mais pas auprès du grand public). Mais personnellement, ses atmosphères envoûtantes et son thème de toujours sur l'attirance mortifère de la solitude me parlent tellement que je suis toujours soufflé par ses écrits. Il y a des moments simplement extraordinaires de présence au monde qui font de Gracq bien autre chose qu'un romantique ou nihiliste vain et complaisant.
Il serait intéressant de faire une étude comparative entre ce roman et un autre classique sur "l'étrange défaite" de 1940: La Route des Flandres de Claude Simon.

Running Man - Stephen King (Richard Bachman)

Oui j'ai vraiment enchaîné avec du Stephen King. Ca fait bizarre En fait je n'ai jamais rien lu de cet auteur et j'ai commencé par ce romain court et assez mineur dans sa biblio, j'ai l'impression. Ca se suit sans déplaisir et sa critique sociale est intéressante mais c'est tout de même assez caricatural et simple. Le début en particulier est horrible, y a même quelques pages qui feraient bondir aujourd'hui sur le héros qui se permet de toucher le cul d'une examinatrice et on est censés le prendre en sympathie pour ça.
Quelqu'un a fait un top Stephen King? J'en lirais bien un parmi ses meilleurs pour trancher si j'aime ou pas.

Je crois que j'avais lancé un topic il y a quelques années. A mettre à jour.

EDIT : stephen-king-bibliographie-complete-t2203.html?hilit=Stephen
Ca s'arrête à 2008

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Anthony Sitruk - Bien sûr, nous eûmes des orages
(168 pages, 14.00€)
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Ca fait plaisir pour Gracq, tu as lu toutes ses fictions ? Je crois que moi oui, faudrait que je me lance dans ses essais mais pas encore eu le courage (juste lu le merveilleux Les eaux étroites au lycée, ma porte d'entrée dans son œuvre d'ailleurs).

Pour King parmi les classiques que j'ai lu ceux-là sont vraiment excellents : Cimetierre, Ca, Carrie, énorme souvenir de Marche ou crève également (roman très court, super efficace) ou dans ses plus récents, 11/22/63 vraiment génial sur le voyage dans le temps.

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CroqAnimement votre

Oui, ça participe de cette veine tragique et parfois même horrifiante qu'on trouve par moments dans le SDA, avec les défiguration des lieux et des personnes par une intense corruption.



It est une bonne oeuvre-somme, qui contient ce que King fait de mieux comme de pire. Le mieux : dépeindre des personnages crédibles et cohérents, ancrés dans le réel, qui plus est sur deux temporalités qui ont leur spécifictés culturelles (années 50 et années 80), qui représentent à eux seuls déjà de bons enjeux; un rapport "total" aux ressorts horrifiques, que ce soit dans la menace diffuse ou la confrontation cauchemardesque. Le pire, cette fascination constante et malsaine pour les corps et sexualités adolescents (c'est son summum en la matière), et le recours malheureux à la "dark fantasy" dès lors qu'il s'agit de retomber sur ses pattes niveau intrigue. Avec le recul des années, c'est le seul que je me vois relire sans m'écrouler de lassitude. Tout ce qui est tour sombre et compagnie, ça marche si tu es fan. De bons souvenirs d'Insomnie aussi mais ça remonte, et pour le coup c'est une des portes d'entrée à La tour sombre.

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Pas touché à King depuis bien longtemps, mais Carrie, Christine, Shining c'est la base. Et son recueil de quatres histoire dont j'ai plus le nom et dont ils fait Shawshank Redemption et Stand By Me entre autres.
Après il y a la Tour Sombre, mais faut quand même être motivé pour se lancer.

Différentes saisons

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Anthony Sitruk - Bien sûr, nous eûmes des orages
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Eh bien oui, maintenant que tu le dis, je crois avoir lu tous ses romans... (Le rivage des Syrtes, Un beau ténébreux, Le Château d'Argol et Un Balcon en forêt)
Il a fait plein d'essais en fait. Et des pièces de théâtre.

Mini-top des romans du coup:

1- Le Rivage des Syrtes: indépassable dans son étrangeté sublime et le monde fictif qu'il y créé épouse parfaitement sa sensibilité.
2- Un Beau ténébreux: d'une noirceur dérangeante mais fascinante. Là aussi un parfum de mystère constant.
3- Un Balcon en forêt: éprouve encore plus que les autres le rapport au réel grâce au thème de la guerre imminente.
4- Au Château d'Argol: superbe rêverie qui tire sur le cauchemar et m'a mis mal à l'aise à plusieurs moments. Passage absolument glorieux de la noyade avortée. Vénéneux à souhait.

Je note vos conseils pour King.

Tu oublies Les terres du couchant, roman posthume paru en 2014, excellent roman médiéval mais qui m'avait semblé un peu en deçà du reste. Mais oui il a peu écrit de fiction en fait. Sinon au classement moi ce serait :

- Syrtes
- Au chateau d'Argol (scène de noyade en effet mémorable)
- Un beau ténébreux
- Un balcon en forêt
- Les terres du couchant

Sinon j'ai lu aussi ses Manuscrits de guerre, journal de guerre assez simple et direct bien que dans le pur style gracqien où il raconte la guerre comme une espèce d'escapade campagnarde faite d'ennui morbide.

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CroqAnimement votre

Il est quand-même particulièrement amorphe et potentiellement con comme un balais Grange ( tiens seules les femmes ont un prénom), même si le sens du livre est sans-doute d'opposer à l'humiliation une passivité encore plus grande, qu'elle en devient
pré-politique, peut-être même pré-naturelle.
En comparaison Aurélien c'est Jean Moulin.

Sinon si vous êtes sensible au contexte historique, 33 Jours et Déposition de hum Léon Werth sont faits pour vous.

Par ailleurs Wikipedia dit que ce n'est pas tout a fait l'experience de sa guerre qu'il n'a pas faite dans cette région et que le lieu de la maison-forte lui a éte inspiré par un passage des Communistes d'Aragon, intéressant

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Mais peut-être la nécessité accrue de faire confiance incite-t-elle à la mériter davantage

Erving Goffman

Amorphe peut-être, con pas du tout. C'est juste quelqu'un qui n'a plus envie d'être dans le côté politique du monde et voudrait revenir à une société sans Histoire. Mais c'est illusoire. Mais beau. Mais illusoire

D'une certaine façon ce n'est pas si illusoire que ça, la guerre lui convient car il la conçoit comme un évènement anhistorique, naturel et souterrain, l'occasion de la résurrection de sa sensibilité d'enfant, et la garantie d'une solitude absolue.

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Mais peut-être la nécessité accrue de faire confiance incite-t-elle à la mériter davantage

Erving Goffman

Peut-être mais pas quand la colonne de blindés allemands survient, justement la guerre prend là une forme surprenante et tout à fait inédite que Grange n'arrive pas à appréhender.

Ok je vais voir cela il me reste 40 pages. J'ai bien du mal vraiment avec le style qui me semble personnel et précieux mais aussi monocorde et scolaire.
On est loin du Nouveau Roman pourtant apparu dans les mêmes années qui malgré tout crée des univers plus riches.

Par contre Aurélien pourrait t'intéresser, il y a aussi l'idée d'un personnage qui veut s'absenter (entre les deux guerres, marqué par la première, ne voulant pas voir la deuxième arriver) de l'histoire pas mais n''y arrive pas. C'est un portrait d'un analogue de Drieu la Rochelle qui échapperait au fascisme par la paresse (mais 900 pages - 400 bonnes, 400 un peu chiantes et les 100 dernières où on comprend il veut en venir, il parvient à rattraper de manière vertigneuse le présent et c'est vraiment bien) , où Aragon s'explique aussi avec lui-même et les positions politiques des Surréalistes, pas de manière haineuse et gratuitement polémique, ce qui fait la force du livre)
La Fin de Chéri de Colette aussi, mais lui malheureusement arrive à siffler la fin de partie (en 130 pages étonnament denses et apres pour le coup)

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Erving Goffman