Gagner la Guerre - Jean-Philippe Jaworski
http://www.images-booknode.com/book_cover/284/full/gagner-la-guerre-284123.jpgExtrait:
« Je n’ai jamais aimé la mer.
Croyez-moi, les paltoquets qui se gargarisent sur la beauté des flots, ils n’ont jamais posé le pied sur une galère. La mer, ça secoue comme une rosse mal débourrée, ça crache et ça gifle comme une catin acariâtre, ça se soulève et ça retombe comme un tombereau sur une ornière ; et c’est plus gras, c’est plus trouble et plus limoneux que le pot d’aisance de feu ma grand-maman. Beauté des horizons changeants et souffle du grand large ? Foutaises ! La mer, c’est votre cuite la plus calamiteuse, en pire et sans l’ivresse.
Je n’ai jamais aimé la mer, et ce n’était pas près de s’arranger. »Je ne suis pas une grande lectrice et encore moins une adepte des romans d'aventures et d'Heroic Fantasy mais ce roman à clairement contribuer à exclure radicalement l'idée honteuse que le genre littéraire et plus précisément celui-ci pour ne pas dire uniquement, pouvait être un indice de qualité. NON mais quelle idée, hein !? Cela vous paraît sûrement d'une évidence déconcertante et je m'en doutais moi-même plus que fortement mais les aprioris et réticences n'en n'étaient pas moins présents. Heureusement Jean-Phillipe Jaworski, et Alain Damasio avant lui, (et sûrement Tolkien quand je m'y mettrais) ont su me démontrer avec brio que le genre ne se limitait pas qu'à des contes fantaisistes irrationnelles peuplés de personnages fantastiques évoluant dans des paysages féeriques avec des elfes à tous les coins de pages, des méchants abuseurs de magie noir, des dragons cracheur de paillettes... etc.
Oui vous pouvez considérer que j'étais raciste!
Bon, il faut reconnaître que Gagner la Guerre n'appartient que "partiellement" au style Heroic-fantasy, les éléments qui l'attestent sont en effet peu nombreux. Il y a bien quelques références au genre (elfes, sorciers, magie...) mais ils n'apparaissent que de manière anecdotique. L'univers médiévale triomphe clairement sur la fantasy mais c'est un point plutôt rassurant pour les sceptiques de mon espèce. Et en effet, les descriptions dont l'auteur nous gratifie tout au long du récit, qu'il s'agisse des royaumes, des cités, des portraits, des ruelles, de la mer, etc... nous séduit à chaque page un peu plus tant les détails y sont pertinents et justes. C'est magnifiquement écrit et d'une précision telle, qu'on n'a pas de peine à se les imaginer.
Mais Gagner la guerre, c'est d'abord et surtout un personnage, et narrateur : Don Benvenuto!
Et quel personnage! Cynique et manipulateur, cette ancien maître-assassin se retrouve au service du Podestat Léonide Ducatore, Monarque de la République de Ciudalia. De cette nouvelle responsabilité, Don Benvenuto va tenter d'en tirer tous les avantages usant de son charisme diabolique et de son culot. Seulement Don Benvenuto ne se contente pas seulement de nous décrire
avec une désinvolture et une plume déconcertante les aventures qui ont fait sa renommé, il ne manque pas de nous interpeller; nous lecteurs! Auquel cas nous serions pas à qui nous avons à faire, m'voyez!? La vérité c'est qu'il est aussi bon narrateur qu'il est assassin et on s'en délecte! Le style y est acerbe, spontané, virulent, les mots rigoureusement choisis, le vocabulaire riche et abondant, le tout est délivré avec une fougue et une sincérité qui nous happe!
Un des meilleurs que j'ai lu ces 3 dernières années! =)
Ah autrement, je ne pouvais pas conclure ce message sans vous inviter à vous jeter sur LE DEMON de Hubert Selby Jr!
J'en parlerais peut-être une autre fois...