«Les armes, c'est comme les femmes, on les aime quand on les touche.»
Diego est braqueur, né à Barcelone. Il vit à Aubervilliers, dans une hacienda délabrée, avec son frère Archibaldo et des souvenirs. Leur sœur, Adriana, a fait d'autres choix. Artiste au cirque Moreno, elle rêve d'accrocher son trapèze à la tour Eiffel.
À Paris, un braquage que la police surveillait pour obtenir le flagrant délit tourne au massacre. La traque est lancée, du quai des Orfèvres au canal Saint-Denis, des marges du Grand Paris aux cerveaux des indics. La brigade criminelle du 36 et le 2e DPJ enquêtent. Les commandants Desprez et Duchesne, aidés de la Fluviale, essaient de démêler les fils. Un nom finit par tomber : Diego. Entre flingages et virées nocturnes, Diego garde toujours un temps d'avance. Comment piéger celui que rien n'arrête?
Belle découverte que ce polar qui n'est habituellement pas mon genre de littérature.
C'est d'abord l'histoire de Diego qui parle à la 1ère personne, ce parfait inconnu des services de police. Sa stratégie : rester dans l'
angle mort; genre "pour braquer heureux, braquons cachés"
Grave erreur que de le voir comme un petit voyou de banlieue sans envergure.
Pas de traces, pas de vagues, pas de frime, prudence, discrétion, il calcule minutieusement le facteur risque même pour les actes les plus banals, jongle avec tous les looks possibles, un vrai caméléon. Il a tous les tics des professionnels, un
beau mec, le terme est employé dans le livre.
A travers lui, on découvre une photographie recto-verso, actuelle, réaliste, des gendarmes et des voleurs, mondes inversés qui se cherchent, se pistent, se dérobent, s'entrechoquent et finissent toujours par s'affronter.
Tout est précis, net et sans bavures (
), à l'image de Diego et on comprend pourquoi l'auteur, Ingrid Astier, l'a choisi pour parler à la 1ère personne. Et sur tous les sujets abordés, elle sait de quoi elle parle; on sent qu'elle a potassé ferme et c'est hyper confortable pour le lecteur. Le seul petit bémol étant l'accumulation de sigles des différentes organisations policières (SRPJ, IJ, DCPJ, etc ....) qui donnent un peu le tournis.
Ce n'est pas un roman d'action mais de réflexion(s) dont certaines savoureuses et/ou percutantes, on avance comme dans la vraie vie avec des voies de garage et des boulevards brillamment éclairés, le coup de pouce du hasard et les résultats d'un travail obstiné des deux côtés.
Le mystère de Diego -ce pourquoi il est ce qu'il est- se dévoile par lambeaux douloureux dans les tous derniers et courts chapitres, parachevant le portrait de ce personnage attachant et effrayant qui se définit lui-même par cette épitaphe :
ni à haïr ni a pardonner