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usqu’à l’orée des années 2000, on a cru le chef d’entreprise classiquement libéral, comme la plupart des patrons du CAC 40. Mais, depuis son arrivée dans les médias, le grand patron ne cache plus son engagement, en catholique fervent, dans la défense de « l’Occident chrétien ». Ce « combat civilisationnel », dont il parle parfois à ses visiteurs, tous les présidents qu’il a fréquentés, depuis Jacques Chirac et jusqu’à Emmanuel Macron, qu’il méprise, l’ont perdu, pense-t-il. C’est désormais à lui de le mener.
En 2022, Vincent Bolloré a cru avoir trouvé en Eric Zemmour le bon candidat pour prendre la tête de sa croisade. Marine Le Pen ? « Elle est de gauche », fustigeait-il. Mais, depuis l’échec de Reconquête !, il s’est résolu à faire avec le Rassemblement national dont il apprécie bien plus le nouveau président, Jordan Bardella. Au RN, pense-t-il, il revient désormais de mener le combat contre l’immigration et l’islam, le retour à l’ordre et à la sécurité. En chef d’entreprise, cependant, il préférerait bien mieux voir aux manettes de l’économie des ministres venus de la droite. Au fond, son idéal politique, ce serait une synthèse française de la première ministre italienne, Giorgia Meloni : anti-immigrés et réactionnaire, européenne et propatrons.
Pétition pour soutenir ce rassemblement
En quelques années, il a donc mis une partie de son groupe, qui s’étend des médias jusqu’à l’édition, au service de ce dessein politique. L’alliance entre Républicains et extrême droite ? Elle est déjà visible chaque jour sur les plateaux de CNews, où, régulièrement, Pascal Praud reçoit des figures LR et leur demande : « Mais puisque vous êtes d’accord avec Jordan Bardella sur l’immigration, pourquoi ne pas travailler avec lui ? »
Seulement, il le sait, les cadres du parti Républicain résistent. Jusqu’à Nicolas Sarkozy, qui siège au conseil de surveillance du groupe Lagardère, désormais à la main de Vincent Bolloré, et ne veut pas entendre parler d’une alliance avec Le Pen. Ils résistent, sauf Eric Ciotti. C’est donc le président des Républicains que Vincent Bolloré convie ce lundi. Cette fois, la situation est mûre. Dès le lendemain, le président de LR annonce, comme convenu entre eux, son ralliement au RN en vue des prochaines législatives.
Peut-être Eric Ciotti et Vincent Bolloré n’imaginaient-ils pas que les cadres des Républicains seraient si nombreux à s’insurger et que l’exclusion du président Ciotti serait votée à l’unanimité du bureau politique de son parti. C’est en tout cas de concert que les deux hommes ont imaginé, mercredi, de lancer une pétition pour soutenir ce rassemblement des droites qu’ils appellent de leurs vœux. Comme une deuxième poussée, afin de faire céder cette muraille de Chine qui résiste encore au FN et exaspère Vincent Bolloré. Puis Eric Ciotti s’est rendu sur CNews, face à Christine Kelly, moquer ses anciens « amis », « tellement décalés de la réalité lorsqu’ils fustigent le danger fasciste ». Avant de refuser de céder la présidence des Républicains, bien que son ancien parti lui ait désormais retiré tous ses pouvoirs, sa voiture avec chauffeur et jusqu’à l’accès à son bureau.