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MessagePosté: 03 Déc 2022, 08:48 
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Qui-Gon Jinn a écrit:
Comme dit plus haut, rien à voir avec le PTA ou même le Linklater


A mon avis c'est en effet l'anti-film de Linklater, et tant mieux. Quand tous les problèmes de société glissaient sur la surface lisse de la bulle dans laquelle le gosse était enfermé chez Linklater (dans un confortable "après tout c'était l'époque et c'était pas mon problème dans mon lotissement petit bourgeois"), au contraire le film de Gray traite de manière assez subtile mais sans tendresse (en particulier vis-à-vis des parents) de la difficile rencontre avec l'Autre nécessairement pris comme Autre et non comme simple ami car ses proches et la société le rejettent. Il questionne la nature de ce conforte qui allait de soi chez Linklater. Etrangement une identification semble possible avec un français blanc qui a grandi dans les années 80, a vu les préjugés et l'injustice du racisme vis-à-vis de ses potes "de couleur" à l'école, la haine raciste ou les remarques pleines de sous-entendus dans sa propre famille, et la violence raciste dans la société l'entourant (quand on passait avec sa caisse sur un "bougnoule" à deux ou trois reprises dans la cité d'à côté)...

Sur la typo du titre, il est aussi question plusieurs fois côté musique de l'arrivée de la culture Hip-Hop à NY, avec Kurtis Blow, les block parties... Ce n'est pas anecdotique je pense, c'est un pont possible certes un peu naïf entre blancs et noirs, entre classes, pour briser le cercle de la reproduction sociale du racisme chez les gosses (on se souvient du "Blanc et Noir" de NTM en 91).


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MessagePosté: 08 Déc 2022, 08:39 
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Pas de sortie belge en tout cas, et Apollo 1/ 11 n'était pas sorti non plus. :(
Bizarre, les films français sortent presque tous rapidement, alors que Linklater et Gray pourraient à mon avis parler au public flaman.

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Sur un secrétaire, j'avise deux statuettes de chevaux : minuscules petites têtes sur des corps puissants et ballonés de percherons. Sont-ils africains ? Étrusques ?
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Jean-Paul Sartre


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MessagePosté: 08 Déc 2022, 08:45 
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Vieux-Gontrand a écrit:
Apollo 1/ 11 n'était pas sorti non plus. :(

Parce que c'est Netflix.


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MessagePosté: 08 Déc 2022, 09:22 
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Ha ok, je retarde. Comme Bégaudeau l'avait soutenu je ne pensais pas que c'était Netflix. Pour ma part je n'arrive plus à voir des films sur un écran de télé ou d'ordinateur, overdose d'écran + pb ophtalmo, la lumière projetée vers l'avant me pose moins de problèmes.
Il y a trois ans Marriage Stories de Noah Baumbach était sorti en salle mais le COVID a tout foutu en l'air, et si j'ai bien compris il est de moins en moins sûr que Netflix produise des films d'auteur à l'avenir.

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MessagePosté: 08 Déc 2022, 10:27 
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MessagePosté: 28 Déc 2022, 17:52 
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J'ai trouvé cela très bon, beau personnage du père, plus faible mais plus complexe et lucide que d'habitude. Travail remarquable sur le son (bruits d'étouffement sourd d'où émergent , avec peine, comme en lutte, les Clash et Sister Sledge). Sans violence mais âpre (on voit d'où vient la scène d'exécution du bijoutier dans Little Odessa, l'idée que l'espace de la ville est commun au dominé et dominateurs, souffre à leur place).Chaque scène est un trauma, d'abord oedipien et familial, puis politique et sociologique, et la transition est graduelle et imperceptible.

Le meilleur Gray à mes yeux.

5+/6

Ça m'a fait penser à certains textes de Kafka* (les écoles qu'elles soient publiques ou privées sont des châteaux, des processus d'observation et de sélection qui s'épuisent eux-même, mais qui rejettent paradoxalement très tôt et définitivement l'ami - on sent bien la dimension paradoxale, permanente mais souterraine, de toute violence sociale) mais aussi à Donnie Darko (le gamin a besoin d'halluciner la réalité pour la comprendre, et s'en libérer, on peut se demander si le copain, sans lieu, n'est pas aussi une hallucination, la somme des hontes et des refoulement, mais qui prend une portée politique par le seul fait d'être élu amoureusement, solitairement, ce qui fait plus peur aux parents que le réel et déjà scandaleux racisme social amené par l'idée de réussite et la peur déclassement qu'elle avive ) je ne m'attendais pas à cela. Gray comprend bien aussi la dialectique négative qui relie antisémitisme et racisme anti-noir, malin de montrer un Trump enfant qui l'absorbe comme une évidence (le gamin lui-même dit tout le temps Obviously aux adultes dont il a peur, pour montrer qu'il les identifie tout le temps à la loi alors même qu'il la transgresse, et atténuer la sanction ou punition qui pèsent sur lui, ce qui marche trop bien à chaque reprise malheureusement). Et il y a des trucs qui m'ont rappelé mon enfance, mon école et mes parents, que j'avais tendance à perdre de vue (d'autant qu'en primaire un élève s'appelait Graff et avait un peu le même profil que l'enfant du film. Ma mère essayait aussi d'exister socialement avec le même genre d'engagement qu'Anne Hathaway, pour les mêmes raisons et avec à peu près les mêmes résultats)

Et la scène de l'enterrement et l'explication du père sur ce que signifie et implique son métier de plombier pour lui et sa belle-famille (ou comment le fils doit son salut au fait qu'il travaille au black), ce ne sont pas des choses que l'on entend si souvent que cela au cinéma, et c'est pourtant la vie, et Gray n'est pas heureusement Ken Loach qui va enfoncer encore plus le plombier pour réserver la conscience sociale au spectateur.

Comme Freak j'ai trouvé Jeremy Strong très bon. Anne Hathaway aussi. La seule réserve est la photo très sombre (particulièrement après avoir vu celle lumineuse d'I Walk the Line de Frankenheimer par David Walsh il y a 52 ans) de Darius Khondji, qui ne cadre pas avec les images vidéo très contrastées mais avec un faible grain ou une faible définition des années 80, mais c'est aussi raccord avec l'idée que la famille retarde de 15 ans sur l'époque (y compris vestimentairement)

*L'ami fait bien remarquer qu'il est toujours menacé mais jamais puni (presque comme chez Kafka), justement parce que cela signifierait alors qu'il appartient à l'institution et qu'elle est la sienne

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Dernière édition par Vieux-Gontrand le 29 Déc 2022, 09:48, édité 4 fois.

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MessagePosté: 29 Déc 2022, 00:45 
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C'est aussi pas mal de la part de Gray de ne pas enfoncer le premier professeur, borné mais pas raciste
Pour sauver ses élève il lui faudrait remplir une fonction maternelle qu'il est juste psychologiquement incapable d'assumer. Or c'est justement cette fonction que les parents achètent dans l'école de riche, ultra libérale dans son rapport au monde mais plutôt maternante dans son fonctionnement. Belle lucidité, amère il est vrai, de montrer que le personnage de la mère s'étiole alors petit à petit une fois la "bonne" école choisie.
Elle est aussi cassée par l'idée que l'on peut à la fois être de gauche et minoritaire et conserver intacte les notions de réputation sociale, qu'elle confond avec la reconnaissance

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Dernière édition par Vieux-Gontrand le 29 Déc 2022, 09:24, édité 1 fois.

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MessagePosté: 29 Déc 2022, 07:36 
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Ah enfin, j'étais un peu seul sur ce film, même la plupart de mes proches ont pas aimé :(


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MessagePosté: 29 Déc 2022, 09:21 
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Il a 6 de MrOrange dans le Top,et 1 de la part de Telletubbies (qui met 6 à Licorice Pizza).
Zad lui met 1.

Marrant de voir que les gens qui distribuent les 0 et les 1 voient un nombre particulièrement élevé de films, par masochisme sans doute.

La première page de ce topic est un vrai festival entre Müller en mode j'ai pas vu le film mais je sais qu'il culpabilise l'homme blanc (à croire qu'il sent son idéologie à la manière de cette espèce d'escargot qui peut sentir sa femelle à des centaines de kilomètres) et Lohmann qui lui joue la fibre blasée du il aurait pas pu mettre Adam Driver à la place de Jeremy Strong comme tout le monde.

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MessagePosté: 05 Jan 2023, 23:02 
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Baptiste a écrit:
Ah enfin, j'étais un peu seul sur ce film, même la plupart de mes proches ont pas aimé :(


Beaucoup aimé également, justement pour cette légèreté (malgré les thèmes abordés) qui confine à la platitude, et qui tranche avec les précédents, toujours si pesants, du cinéaste. Aucun souvenir de Little Odessa, auquel j’avais mis 6/6, celui-ci viendrait donc juste après. Sinon la musique m’a rappelé certains accords du Don't Box Me In qu’avaient composé Stan Ridgway et Stewart Copeland pour le Rusty James de Coppola (justement).
5/6

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Que lire cet hiver ?
Bien sûr, nous eûmes des orages, 168 pages, 14.00€ (Commander)
La Vie brève de Jan Palach, 192 pages, 16.50€ (Commander)


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MessagePosté: 06 Jan 2023, 08:55 
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Cosmo a écrit:
Baptiste a écrit:
Ah enfin, j'étais un peu seul sur ce film, même la plupart de mes proches ont pas aimé :(


Aucun souvenir de Little Odessa, auquel j’avais mis 6/6


:mrgreen: c'est ça de voir trop de films!


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MessagePosté: 06 Jan 2023, 09:04 
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tape dans ses mains sur La Compagnie créole
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Apparemment le film ne sortira plus en salle en Belgique :|

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MessagePosté: 07 Sep 2023, 16:37 
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Baptiste a écrit:
Dans les années 1980, le jeune Paul Graff mène une enfance paisible dans le Queens, à New York. Avec Johnny, un camarade mis au ban de la classe à cause de sa couleur de peau, ils font les 400 coups. Paul pense être protégé par sa mère, présidente du conseil des parents d’élèves, et par son grand-père dont il est très proche.

Topic toujours pas ouvert?

Ca commence comme un film des frères Coen où l'absurdité de la famille le dispute à la tendresse. La photo grisâtre complète le dispositif malaisant qui vise à retranscrire la difficulté pour les familles juives issues de l'immigration de trouver une place et maintenir une cohésion. Seule la relation entre le garçon et le grand-père (amusante référence dans un des premiers dialogues à The Father avec un "on parlait de quoi à l'instant déjà" :) ) dessine une perspective.

Mais en fait de perspective, James Gray refuse la facilité de la success story. Il aurait pu, il est quand même devenu un des cinéastes les plus respectés au monde, mais non, le propos est ici bien sombre: les discriminés sont davantage poussés à se battre entre eux qu'à dénoncer la domination.
La belle amitié avec son camarade noir est cernée de toutes parts et ne trouve de perspective que dans des projets naïfs et voués à l'échec. Mais ironiquement, la naïveté de ces projets n'empêche pas la reproduction sociale: c'est le noir qui porte le chapeau du délit.

La seule certitude du film, sa lumière grise, c'est la leçon du grand-père, celle de ne jamais cesser de lutter, seule manière de se sentir vivant et de construire des liens avec autrui. Gray offre une grande leçon de classicisme.

Baptiste a tout dit. Mon préféré de Gray après The lost city of Z et Hopkins trouve tout simplement un de ses plus beaux rôles
Le passage où il partage un moment de complicité tout simple avec son petit-fils, suivi de la scène d'hôpital puis de l'enterrement, c'est du grand art et j'ai chialé

Il y a un côté plus contenu, moins expansif, qui rend le film d'un émotion fulgurante. la dernière demi-heure, il faut avoir un coeur de pierre pour ne pas chialer. Et on sent un film proustien mais terriblement amer dans son constat, surtout dans ce qu'il montre d'une époque et du racisme latent de la société américaine.
Grand film. Et l'acteur qui joue le père est génial. La scène dans la voiture c'est de l'or.


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