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Une femme quitte son mari et ses enfants

Je fais volontairement court sur le synopsis, tellement il vaut mieux ne rien savoir avant de rentrer dans la salle. En tout cas ce qui est sur, c'est que le film risque de laisser certains sur le carreau. On est vraiment dans la droite lignée de Barbara et de La chambre bleue et ça fait plaisir de voir un film aussi exigeant dans le paysage français. J'adore Amalric cinéaste qui accouche d'histoires folles et à la mélancolie puissante et là on est servi.

Le film déroute mais séduit progressivement. Amalric joue à fond sur la déconstruction narrative, on ne comprend pas grand chose dans les premières minutes, le film révèle petit à petit ses clés et on se laisse guider par une caméra sensorielle virtuose. En tout cas, le cinéaste ne manque pas d'audace. On se laisse happer par le mystère à l'écran, les aller-retours entre réel et imaginaire et ces ellipses déroutantes. Je connais peu Vicky Krieps mais elle est ici bouleversante, c'est notre guide dans ce labyrinthe mental.

Car c'est un véritable labyrinthe ou puzzle mental que dessine Amalric sous nos yeux. Certains ne vont pas adhérer à l'ambitieux dispositif cérébral du film mais si on y adhère, on est emporté dans un tourbillon de tristesse et de mélancolie. Il faut noter un travail assez fabuleux sur la musique. Ce n'est pas simplement la beauté de la BO qui est à mettre en avant, mais la façon dont Amalric l'utilise comme un véritable moteur de son histoire.

Voilà donc un film qui s'apparente à un requiem, un tourbillon de mélancolie et de rêveries qui s'avère très touchant. Amalric est vraiment un cinéaste passionnant et au talent singulier. Lohmann, fonce! Je sais que tu as adoré Barbara, tu ne vas pas être déçu.

4,5/6

Je l'ai pourtant été, je n'ai rien retrouvé de ce que j'avais aimé dans Barbara, son aspect ludique, le rayonnement de Balibar (rétrospectivement je me dis que si je n'ai pas beaucoup accroché à The Phantom Thread, Vicky Krieps doit y être pour quelque chose....). Il y a quelques jolies idées, éparses, mais j'ai trouvé l'ensemble très chichiteux, d'une fausse complexité que j'ai trouvé assez vaine, l'impression qu'Amalric était très (trop) content de sa forme. Je ne dis pas qu'il n'y a pas des ponts à faire avec le reste de sa filmographie, mais eut égard au sujet je trouve qu'un peu plus de sobriété n'aura pas fait de mal.

J'ai écrit à un ami, qui lui a aimé le film, les mots suivants : "prétentieux, boursouflé et incompréhensible". Ça rejoint ce que dit Lohman, encore que le terme "chichiteux" me paraît bien plus approprié que celui de "boursouflé"

Sinon, tout est dit. Le mec a de l'or dans les mains (sujet, actrice, construction) et il gâche tout par une approche cérébrale qui relève plus de la posture que de la nécessité.

J'aime pas trop hurler avec les loups sur la supposée tendance "intello" du cinéma français mais là on est en plein dedans..

Pas le temps de vous répondre tout de suite mais j'avais pas tort de dire que ça allait laisser certains sur le carreau. Et je comprends totalement vos avis.

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Sur un secrétaire, j'avise deux statuettes de chevaux : minuscules petites têtes sur des corps puissants et ballonés de percherons. Sont-ils africains ? Étrusques ?
- Ce sont des fromages. On me les envoie de Calabre.

Jean-Paul Sartre

Lol, petit chenapan va.

Sinon Loh et Kill, là où je vous rejoins, c'est que le film se perd par moments dans sa complexité. Je n'utiliserais pas le mot vain, car ce n'est pas le cas à mon humble avis, le côté puzzle est totalement assumé mais oui ça se perd un peu dans certains passages. Donc je suis pas en désaccord sur ce reproche que vous lui faites. Mais globalement, j'ai trouvé l'approche d'Amalric très belle. Je me suis abandonné dans ce pur trip sensoriel et, même si je n'ai pas tout compris, j'ai été emporté et touché et il faut avouer que Krieps apporte une sensibilité à ce voyage mental. J'avais même pas reconnu que c'était elle dans le P.T. Anderson.

Pas vraiment de la posture, c'est un parti pris on ne peut plus sincère de la part d'Amalric mais je comprends qu'on déteste. Tu as vu La chambre bleue?

SPOILERS OBLIGATOIRES


Plusieurs jours après, il me reste une substance triste et somme toute assez belle du film, preuve d'une certaine réussite d'Amalric. Mais j'ai toujours été agacé par les numéros de prestidigitateur au cinéma et celui-ci ne fait pas exception. D'autant que les images, pour manipuler le spectateur, sont parfois trafiquées: on croit au subterfuge parce que tout le début montre la fuite de Krieps avec ses regards vers sa famille, avec elle dans le plan.

Émotionnellement, cela donne quelque chose d'assez retors: j'ai été très agacé pendant les trois quarts du film par le personnage de Krieps (mais pourquoi se plaint-elle? elle laisse en plan sa famille...), qui est forcé par le fait que jamais les motifs de son départ ne sont évoqués (et pour cause, bien sûr...). Se concentrer sur les conséquences pures de son départ, pourquoi pas. Mais même sur ce plan-là, c'est peu crédible: les enfants et le mari semblent peu perturbés. Et donc après cet agacement permanent, on est pris en défaut par les faits et on se sent presque coupable: cette personnage que vous condamniez, c'est elle la victime; PLEUREZ! Très limite comme procédé.

La toute dernière séquence est en revanche réussie, avec ce plan capté depuis l'intérieur noir d'une chambre de la maison, qui fixe la mère en train de partir en voiture. Elle ne fuit plus sa famille vivante, mais sa famille morte. Et ensuite ce plan dans la voiture où elle sourit consacre la complexité du personnage, pour qui le meilleur moyen de s'en sortir psychologiquement est probablement de jouer ce rôle de la personne qui prend le large.

Joli texte, Baptiste

Le son est-il aussi mauvais que dans La Chambre Bleue ?

Vu la chambre bleue sur un PC donc je ne pourrais pas comparer, mais aucun souci pour celui-ci. Vu l'importance de la bande son dans le film, ça aurait été d'ailleurs abusé d'avoir un son pourri.

Hmm pas au bout de 15 minutes, plutôt 30/40 minutes et à ce moment ce n'est pas très clair, ça peut tout aussi bien être qui s'invente symboliquement la mort de sa famille. Car dans cette scène elle a une attitude très légère je trouve, pas très paniquée.

Tout de même, ça vient renforcer un dispositif très évident (Krieps en voix-off qui met dans la bouche de tous les membres de sa famille ses propres mots). Après oui dans la scène qu’Abyssin mentionne, je suis d’accord avec toi, l’attitude de Krieps ne correspond pas à ce qu’elle est en train de vivre. Et ça n’est malheureusement pas la seule.

Tout ce que vous dîtes ne fait que confirmer le parti prix d'amalric de construire un dispositif cérébral et totalement artificiel, qui rend le film pénible.

Pas vu le film mais j'ai beaucoup ri en découvrant le résumé qu'en fait Allo Cine

Ah mais oui, le côté dispositif cérébral est totalement assumé. A toi de le juger artificiel mais je comprends perso qu'on y accroche pas.


Ah, rigolo, je l'ai trouvé crédible dans cette scène. Les goûts, les couleurs.