Müller a écrit:
Je suis pas sûr de comprendre ton raisonnement, tu peux illustrer ?
Par exemple, "t'ignores des jours quand il est en colère", ça peut être une saine attitude de mise à distance d'un conflit. Ou "se moque de toi en public", c'est une violence. Mais un conjoint, c'est aussi "te complimente en public". Regarder un porno en couple, c'est une façon de comprendre la libido de l'autre pour avoir une vie sexuelle plus épanouissante; et ça veut dire quoi "forcer à regarder du porno", le mec attache sa gonzesse comme Alex dans Orange Mécanique ?
Enfin je reviens à ce que je dis depuis le début, mon problème avec ce truc, c'est qu'on estime qu'il y a 5 raisons de profiter de la vie de couple quand il y en a 20 d'être en danger.
Müller a écrit:
C'est pas l'idée que je souhaitais véhiculer. Je ne me soucie pas de démarquer un pseudo, proto ou para-féminisme d'un autre qui serait plus commode, honnête ou souhaitable, je laisse ça à ceux qui choisissent d'y adhérer pour ensuite se livrer à leurs guerres de chapelles. Je me contente de constater que le machin en question est le produit d'un féminisme qui soutient que les violences au sein du couple sont très largement masculines, alors que ce n'est le cas que pour les violences physiques. C'est indiscutable que les coups, fractures, meurtres et viols conjugaux sont commis presque exclusivement, et à grande échelle, par des hommes. C'est un constat purement démographique, comme de dire que les pompiers, militaires et ouvriers sur les plateformes pétrolières sont majoritairement des hommes, ou que les femmes de chambres dans les hôtels en Île-de-France ou les livreurs Deliveroo à vélo à Paris sont très majoritairement d'origine africaine : tout ça saute aux yeux, et les études et statistiques viennent simplement confirmer un constat à la portée de tous (ou alors renseigner ceux qui en sont loin). Un constat n'est pas politique, ce qui est politique c'est ce que chacun décide de faire de ce constat, comment l'interpréter.
Sans rentrer dans les chapelles, faire ce constat que les violences physiques dans le couple viennent essentiellement des hommes contre les femmes, que c'est courant et qu'il faut y remédier, c'est pour moi déjà du féminisme.
Il y a encore beaucoup de personnes, hommes et femmes, qui sont dans le déni ou dans l'acceptation comme d'un ordre naturel de ce fait.
D'autres mettraient rapidement en avant qu'on oublie au contraire les violences psychologiques des femmes
Müller a écrit:
Je ne chercherai pas à te faire changer d'avis, de toutes façons il n'y a pas pour moi matière à en débattre. Les violences entre individus ne sont jamais "que" physiques, même lorsqu'elles ne sont pas subies directement (le stress post traumatique touche autant, et parfois avec la même intensité, les "simples" témoins : guerres, attentats, catastrophes, enfants dans un domicile violent etc.). Un seul coup peut avoir un retentissement psychique sur le long terme, comme en atteste l'état parfois de gens agressés pour un sac ou un portefeuille. On a régulièrement des cas maintenant de collégiens qui se suicident à cause du harcèlement scolaire, qui n'est jamais que physique. Il y a un nombre très significatif d'agents et agentes de la fonction publique qui font des séjours en psychiatrie à cause d'un effondrement suite à du harcèlement au travail. Les études cliniques concernant les effets des violences psychologiques sont, je n'en doute pas, innombrables, y compris en neurologie. La seule chose dont je suis certain à 100% c'est que les professionnels de santé mentale sont unanimes concernant leurs effets catastrophiques, leur poids, leur croissance dans leurs files actives. Un fléau total.
Ce qui n'est pas étudié, en revanche, et contrairement aux violences physiques, c'est à quel point les violences psychologiques seraient ou non majoritairement le fruit d'hommes ou de femmes. Ce n'est pas étudié car, comme tu le dis, c'est moins immédiatement graduable (pas de radios ni de prélèvement ni d'autres examens cliniques possibles aux urgences, comme pour coups, fractures ou viols). Comme ce n'est pas visible immédiatement, c'est beaucoup plus difficile et long de mettre en place le processus d'étude et de recherche qui permettrait d'en tirer des chiffres accessibles à tous pour une prise de conscience et l'instauration de politiques publiques pour leur prise en charge.
En revanche, je suis intimement persuadé que ce défaut d'études et de chiffres découle aussi du fait que le sujet des violences conjugales est devenu, par la force des choses, un sujet féministe — par un féminisme de régime, d'apparat, opportuniste et de surface, "à la Schiappa" peut-être, donc loin des réalités militantes quelles qu'elles soient, but still. Constater que les violences physiques dans le couple sont commises dans près de 100% des cas par des hommes, et le dire, le répéter pour amener tout le monde à le savoir, c'est une chose, et c'est très important. Réduire les violences conjugales à ça, c'est un choix politique dont l'objectif n'est plus de favoriser une prise de conscience, mais de cliver : les violences psychologiques, si elles devaient être étudiées sociologiquement à la hauteur de leur gravité et de leur prépondérance, nous diraient alors à quel point l'interprétation féministe de la situation est lacunaire et mal intentionnée malgré cette volonté affichée de "conscientisation". Eveiller les consciences, oui, mais sur tout, pas seulement sur ce qui arrange une certaine vision du monde. Même en l'absence de ces sources pourtant fort souhaitables, j'assume entièrement l'hypothèse que ces violences-là sont majoritairement féminines, à la maison comme au travail. J'évolue depuis suffisamment longtemps dans des milieux presque exclusivement féminins, qui plus est confrontés à toutes sortes de violences, y compris conjugales, et j'en ai suffisamment parlé avec suffisamment d'hommes et de femmes au fil du temps pour n'avoir besoin d'aucune source pour m'autoriser à le penser.
Les pouvoirs publics ont pour mission de favoriser l'émergence de problématiques avec précision et détachement, et d'assurer une obligation de moyens pour y remédier. Pas d'orienter les perceptions comme c'est le cas pour les violences conjugales, dont un pan majeur, et dont la prise en charge est essentielle, est de fait complètement absent du discours public par choix politique et moral.
Plus ou moins d'accord dans les grandes lignes. Mais surtout sur la fin.
Ce "violentomètre" est pernicieux en incluant des exemples dont la femme doit "profiter" en minorité face aux dangers et que ce soit un outil issu des pouvoirs publics.
M'en fout aussi des chapelles plus ou moins idéologues et militantes, les nervis en tout genre, on peut facilement éviter de les fréquenter au quotidien, ce qui me dérange surtout, c'est quand ça s'insinue dans le service public qui, en parallèle, disparait sur ses fondamentaux.
Ca me semble encore plus vicieux du fait, en dehors du féminisme ou autres, que ce genre d'initiatives donne l'impression qu'il y a encore un service public, alors que c'est un paravent. Qui peut être joli selon les cas mais qui cache toujours un champ de ruines.
Et ouais, aussi et vraiment, QUanD eN pRIme C'eST paYé aVEC nOS iMPôTs...