bmntmp a écrit:
latique a écrit:
Ses parents étaient des prolos qui bossaient à l'usine avant d'ouvrir un café-commerce pour les ouvriers du coin.
C'est déjà une forme d'ascension sociale. Je sais pas si tu te rends compte...
Bien sûr. C'est dit expressément dans le livre et les parents en avaient bien conscience.
Citation:
pourvu que le commerce marche, dans le Yvetot situé sur la ligne de train de Paris et à l'économie florissante de l'après-guerre
Justement, il marche jamais très fort. Les parents n'ont jamais un rond. Commerce excentré. Clientèle ouvrière, désargentée, faut faire des ardoises; dès que les familles ont un meilleur salaire, elles vont dans le centre.
Citation:
Tu dis toi-même que la volonté de s'élever socialement lui a été transmise en partie par son père, qui l'a encouragée à faire ses études, signe d'une déférence envers le système éducatif, dont les socles d'enseignement, étaient sans doute bien plus unifiés qu'ils ne le sont aujourd'hui. Donc adhésion aux valeurs de l'école, désir d'accéder à la culture bourgeoise.
Non, je vais me répéter: le père accorde de l'importance à l'école, mais pas à ce qu'elle enseigne : c'est une "souffrance obligée" pour "pas prendre un ouvrier" (p.80); "Ecoute bien à ton école": "il disait toujours: "
ton école" (p.73). Ce que sa fille y apprend lui paraît toujours une lubie incompréhensible (apprendre l'anglais, aller au musée? quelle idée, c'est pas pour nous. On ne dit pas "se parterrer"? Mais si, tout le monde dit ça depuis toujours. Le "Tour de la France par deux enfants"? Ca, c'est un bon livre; etc)
Citation:
Tu m'étonnes, quand tu t'es élevé socialement et que ta fille prétentieuse vient te corriger tes fautes de français en mode grammar nazi alors que t'as quitté l'école à douze ans, il y a de quoi être dubitatif et même agacé.
La narratrice est la première à ridiculiser la pimbêche qu'elle était (cf les pages où elle relit ses journaux de l'époque ; où elle évoque ses disputes à table avec son père quand elle commence à fréquenter les petits bourgeois du lycée).
bmntmp a écrit:
Ça suinte le mépris.
Mépris pour qui? pour quoi? de l'adolescente qu'elle était? de l'écrivaine qu'elle est devenue? Faut démêler les voix. Elle rend compte d'un hiatus: le monde qu'elle quitte, celui où elle entre. Comment décrire ce monde, où elle était heureuse mais où elle ne pourrait plus vivre? Dire "le bonheur et l'aliénation" ; dire "nous" et dire "eux". Elle cherche une forme qui dise les deux.
Du mépris, elle en a eu quand elle est entrée au lycée, qu'elle s'est mise à trouver ringarde les chansons de Luis Mariano. Mais justement, faut voir ce qu'elle dit de cette adolescente méprisante et des journaux qu'elle tenait, où elle recopiait des poèmes d'Henri de Régnier et des phrases comme "Le bonheur est un dieu qui marche les mains vides" et autres sublimités du genre.
Citation:
Tu vois vraiment la différence de caractère entre le faux transfuge, finalement content d'avoir échappé au sort terrible du commerçant de province ou de son épouse, et celle pour qui être une X est presque embarrassant à cause justement des faux-semblant sociaux.
Dans ce cas, tu pourrais lire "La femme gelée". Tu verras ce qu'elle dit des faux semblants sociaux et de la famille bourgeoise de son mari.