Noony a écrit:
A cette époque, la sélection n'existe quasiment plus pour les femmes à l'entrée d'Auschwitz.
Continuons à être précis. Pour info, les femmes débarquent par erreur sur le camp d'Auschwitz début octobre.
Extrait du livre :
"
Ces femmes ignoraient qu'elles étaient arrivées à Auschwitz à un moment où les revers militaires allemands et les négociations secrètes engagées entre Himmler et le comte suédois Folke Bernadotte modifiaient quelque peu les données du camp. Les Russes ayant découvert dans le camp de Lublin cinq cent caissons de Zyklon B et plusieurs fours crématoires contenant des ossements humains, la chape de silence sur les camps d'extermination imposée par les Allemands était enfin levée. La nouvelle avait fait le tour du monde. Himmler, qui prétendait à la succession de Hitler et voulait redorer son blason, était prêt à promettre aux Alliés que c'en était fini des chambres à gaz. Il n'envoya cependant aucune directive à cet effet avant octobre 1944 - la date précise est encore du domaine des hypothèses. Une copie de la directive avait été envoyée au général Pohl à Oranienburg : l'autre à Kaltenbrunner, chef des services de sécurité du Reich. On continua cependant à gazer les juifs de Plaszow, de Theresienstadt, et d'Italie jusqu'à la mi-novembre. D'après les recoupements qui ont été faits, la dernière sélection pour les chambres à gaz a dû avoir lieu le 30 octobre 1944.
Pendant leur première semaine à Auschwitz, les prisonnières du groupe Schindler s'attendaient au pire. Même plus tard, alors que les dernières victimes des chambres à gaz poursuivaient leur marche à la mort vers l'extrémité ouest de Birkenau, que les crématoires et les bûchers consumaient les piles de cadavres en attente, elles ne remarquèrent aucune modification sensible dans les affaires quotidiennes du camp. De toute façon, la plupart de ceux qui échappèrent aux chambres à gaz furent tués par balles un peu plus tard - ce fut le cas de tous ceux qui travaillent aux fours crématoires - ou moururent de maladie ou d'épuisement.
Quoi qu'il en soit, le groupe de Schindler fut soumis à de nombreuses inspections médicales au cours des mois d'octobre et de novembre. Certaines prisonnières avaient été séparées du gros de la troupe dès l'arrivée et expédiées dans les baraques réservées aux incurables. Les médecins d'Auschwitz - Josef Mengele, Fritz Klein, Konig et Thilo - ne se contentaient pas de faire le tri sur les voies de garage de Birkenau. Ils circulaient partout dans le camp, assistaient aux appels, allaient dans les salles de douches et demandaient avec un sourire : "Quel âge avez-vous, grand-mère ?" (cette dernière réplique a d'ailleurs été utilisée dans le film)
On apprend principalement deux choses :
- Il y avait toujours des inspections et des sélections, de façon quotidienne jusqu'à plusieurs fois dans la même journée, et même la nuit
- Les femmes sont restées à Auschwitz plusieurs mois (le film donne plutôt l'impression d'un passage éclair de 48 heures)
Citation:
Le film ne montre au contraire quasiment rien de ce que tu dis. Il y a un plan sur les femmes alignées, avec les kapos et les aboiements de chien, un plan sur la cheminée du four crématoire, puis retour sur les femmes et la petite fille qui demande à sa mère: "On est ou maman?" cut - Schindler: "Elles sont à Auschwitz."
Je ne vois même pas comment on peut se sentir en sécurité.
Ecoute, je vais pas te faire un cours d'axe de caméra et de montage hein... mais c'est bien présent et souligné par la mise en scène. Alors certes, ça vient APRES la scène de la douche, mais la séquence à Auschwitz forme un tout bien compact et très dense, et Spielberg situe géographiquement les femmes à partir de la 8ème minute sur l'extrait que tu as mis. Et les situer géographiquement dans le camp, c'est les situer d'un point de vue vital, c'est jauger leur niveau de sécurité. La douche marque le point culminant de leurs doutes et de leur peur, mais Spielberg ne prolongera pas le malaise au-delà de cette séquence, qui répond en une seule scène à toutes les interrogations et les craintes que l'on peut avoir à leur arrivée par erreur sur le camp. Camp que l'on reconnaît d'ailleurs bien avant la réplique explicite de Schindler. Je crois que la majorité des adultes reconnaissent la structure d'Auschwitz, avec son entrée emblématique, bien ancrée dans l'insconscient collectif.
Petit analyse du découpage à partir de la 8ème minute :
Elle forment une file indienne qui avance vers la caméra et sort du cadre par la gauche, alors qu'au deuxième plan une autre file indienne apparaît en opposition de la première, formées de gens qui défilent de gauche jusqu'à sortir du cadre à droite.
Au cut c'est de nouveau plus marqué puisque Spielberg fait un champ / contre-champ. Les femmes sont dos à la caméra et s'éloignent du danger vers la gauche, danger qui est en contre-champ des silhouettes dos à la caméra qui s'enfoncent dans un escalier par la droite.
De nouveau un champ / contre-champ en plan plus serré.
Puis sur le contre-champ Spielberg panote de bas en haut pour révéler l'imposante cheminée... dernier champ pour retrouver un visage d'une des femmes en plan serré, toujours de dos qui observe et comprend - comme le spectateur - la nature du camp et le sort réservé à ses occupants. Visage qui disparaît du champ avant même la sortie du cadre. Elle est sauvée.
C'est une analyse un brin technique d'une séquence pourtant ultra lisible et qui ne laisse aucun équivoque et aucune place au doute. C'est en tous cas mon point de vue. Alors bien évidemment, si l'on isole la seule scène de la douche, elle ne sera pas exhaustive de ce qui se passe à Auschwitz, mais elle ne sera pas non plus exhaustive de ce qui est décrit dans le film. La question morale est évacuée du fait que Spielberg n'entre pas caméra au poing dans une réelle chambre à gaz, mais bien dans une douche avérée. La question du suspense - ou de l'angoisse - épouse le point de vue des personnages et rend justice à leur expérience réelle.
De plus il y a un élément souvent mis de côté, mais qui me paraît pourtant essentiel. Lors de quelques scènes clé, comme celle-ci ou la liquidation du Ghetto de Cracovie, chargées d'angoisse, les Allemands ne sont plus compréhensibles et parlent allemand, ils vocifèrent de façon explicite des ordres que le spectateur ne peut que deviner, et du coup Spielberg oublie les mots et les répliques en obligeant le spectateur à se fier à sa mise en scène. Je rejoins donc The Scythe-Meister sur le côté expressionniste de ces moments, où Spielberg prend le spectateur par la main et où il lui parle directement avec les images. C'est un parti pris qui a également été critiqué (commodité de faire parler les allemands dans leur langue quand bon lui semble, facilité de faire peur avec les cris dans une langue que peu de personnes comprennent etc.) mais qui apporte beaucoup à l'impact des images.
Citation:
Et puis en revoyant la scène, il y a toute cette séquence ou les prisonnières se font couper les cheveux, déposent leurs chaussures dans des boites, laissent leurs effets personnels tandis que les femmes SS leurs disent "respirez bien fort, c'est pour désinfecter".
Mais ouais ! Elle le dit en allemand c'est ça ? Maintenant que tu me traduis je capte mais sinon... c'est impossible ! Ecoute... ce genre de réplique ne s'invente pas, c'est tellement sadique... ça doit être fidèle à la réalité (mais le livre n'en fait pas mention). Cela dit comme ce n'est pas traduit (et il n'y a pas de sous-titres sur la VO du film), je ne pense pas que c'était le but de pousser davantage le doute.
Je remets le lien ici pour ceux qui souhaitent revoir.
http://www.dailymotion.com/relevance/search/schindler/video/x4d8k8_la-liste-de-schindler-9eme-partie_shortfilms