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The King of Kings en VO.



La vie du Christ, des premiers miracles à la résurrection.


Du peu que j'ai pu voir de lui, j'ai quand même l'impression que DeMille est un cinéaste matériel : il est concret, il aime la chair, il sait filmer les corps et les foules, ses images sont pleines de poids et de pesanteur (ses compositions hyper-fermes y sont sans doute pour quelque chose). Gentil paradoxe, ainsi, que d'adapter le récit de l'incarnation divine : ca doit bien être le dernier nom qui me viendrait en tête pour filmer la transcendance.

Le film prend le problème de biais : durant toute sa première partie, le Christ joue au magicien, avec son petit regard "vous allez voir ce que vous allez voir", enchaînant les miracles comme des attractions - frôlant le fantastique avec la purgation de Madeleine, l'horrifique avec la résurrection de Lazare... Avec ses méchants qui complotent, ses villageois béats, Madeleine devenue vamp : on est à la foire, et la fiction marche à plein tube. Le pouvoir narratif de ce cinéaste est dingue : y a pas un plan gratuit. La solidité totale de la mise en scène, qui enchaîne les compositions en béton armé, ne se permet aucune gratuité : tout est entrain de raconter une histoire, de nous prendre la main pour rentrer dans le récit, de jouer avec nos attentes. Reste que, justement parce qu'il fonctionne ainsi, dans cette efficacité très terre-à-terre presque hors-sujet (façon "les aventures de Jésus", parfois), toutes les tentatives du film pour installer une atmosphère éthérée, un état de grâce qui donnerait de la grandeur au récit, virent un peu au grotesque.

A quelques scènes près (dont les deux déjà citées), il faut donc attendre de voir passer la première heure pour découvrir vraiment le film dans sa pleine puissance : quand il a à disposition sa foule, finalement, DeMille retrouve enfin pleinement ses capacités, et arrive par ce biais à redonner le mystère et la beauté que demande son sujet à pleine voix. Je pense notamment à la scène au temple, parfaite de bout en bout, avec cette foule aussi lyrique que dangereuse, le Christ qui s'est réfugié à distance et qui observe, isolé aux côtés de Satan entre les colonnes, la liesse qui peut se transformer en violence... C'est dans cette énergie magnifiée et redoutée, dans cette tension retrouvée via le groupe (la cène fonctionne très bien, à ce titre), que DeMille arrive à retrouver son lot d'opacité et d'inexplicable. Le crescendo sombre que subit le film, et notamment son climax à colère divine sur le Golgotha, qui explose de virtuosité graphique et de démesure, est d'emblée une des plus belles séquences que j'ai pu voir dans la fin du cinéma muet - période décidément exceptionnelle. Dommage que le long épilogue, qui a du mal à vraiment fermer l'ensemble, et qui se perd dans des jeux de couleurs assez hasardeux (pourquoi ces scènes là et pas d'autres), émoussent un peu le sentiment de puissance que le film avait su transmettre à son apogée.

Voilà, ça vaut vraiment le coup, et au pur niveau du découpage c'est une tuerie.

*** FOR YOUR CONSIDERATION ***

Je vois que la coupe recommence, et j'avais promis de pas délaisser mes muets, donc c'est tipar (par contre j'ai toujours pas compris quel film restait/jartait, donc ce sera pub pour les sept).

Et pour celui-ci, ce sera deux extraits.

Un sur le mont Golgotha, qui donne toute la mesure de la puissance de feu du cinéma de Demille, spectaculaire ET inspiré. Pas une seconde ici, en l’occurrence, où le déchaînement de moyens vient étouffer la singularité de la scène, sa nature de cauchemar hyper-pictural.



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Et la résurrection de Lazare, à la lenteur hypnotique, plus étrange et glaçante que tous les films d'horreur des années 30 réunis.



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