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MessagePosté: 24 Déc 2023, 10:31 
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Müller a écrit:
Je le verrai à nouveau avec plaisir.

Le film vieillit super bien en tout cas. Je pourrais aussi tout à fait le revoir avec plaisir même si j'ai peur que l'indéniable ventre mou après le 1er passage à l'acte soit encore plus plombant.
Reste que tout ses petits détails donnent assez de profondeur rapportés au concept sec (même si on peut regretter que ça n'aille pas plus loin, ça évite le fait d'être un simple gimmick) et du ludique.
Typique le genre de film dont une 2e vision passe ou casse.

Müller a écrit:
comme ce grand méchant en mode dark santa,
J'y vois carrément le diable. Et ça me gêne entre guillemets, non pas par rapport au traitement du sujet en lui-même mais par rapport à la noirceur qui ne m'a jamais semblée aussi poussée dans les films de Woo pourtant bien souvent désespérés. Mais l'arrachage de croix pourrait parler de lui.

Müller a écrit:
les rues et no man's land tiermondisés de la côte ouest, montrés du coup sans commentaires,
Texas (mais on s'en fout). Ya quelques commentaires tout de même via les infos radios. Et en y repensant, ça participe à l'ambiance toxique général qui pousse la décision du père. Alors c'est pas foufou comme justification mais ce rapport aux infos et aux dialogues (dans un sens, celui de la femme) via SMS évoque aussi notre époque, et c'est encore un truc qui prend en compte son "concept".
Et ya un petit air de Hard Target dans ces décors (un Hard Target qui aurait sûrement gagné en valeur s'il avait été aussi noir que ce Silent Night). Quand la scène finale et ses décors de sapin de Noël rappellent le clinquant de Face/Off.
Müller a écrit:
la pute folle bien montée en sauce qui rappelle les bon vieux Walter Hill...
Là aussi, j'ai tiqué. Pas du perso et de son traitement, mais sur celui des autres persos par rapport à elle. Un peu comme la scène du vomi,
j'ai du mal avec cette hésitation du héros alors même qu'il sera déçu. Après tout ce qu'il a traversé, il arrive vraiment à avoir de la compassion et de l'espoir sur une toxico qui l'a canardé savamment (et humilié plus tôt dans le film) ? Le mec a justement arraché sa croix plus tôt dans le film. A la limite, j'aurais préféré qu'il ne la tue pas en lui collant une bonne grosse droite sans l'ombre d'une hésitation
Au-delà de la cohérence du perso, c'est aussi ce genre de détails clichés-glauques qui me font regretter un John Woo qu'on a connu à la fois plus inventif et plus humaniste. Mais bon, l'âge aidant, il n'y a rien de vraiment choquant à voir un gars plutôt tragique lâcher l'affaire sur la beauté du monde.
Juste que ça ne s'assume pas non plus complètement
on insiste assez pour montrer que le père n'a pas basculté complètement de l'autre côté
. Ou bien peut-être par l'absence
de vol de colombe dans celui-ci, pas de place pour le Saint-Esprit, pas de place pour l'espérance
Ca serait un détail absent qui s'ajoute à tous ces autres détails kiffants
les prises de photos en mode fusillade sur le portrait du méchant, la larme de la mère qui est une douille vide chez le père, qui passe du super-héros, forcément mutique, amateur avec son masque de soudeur à celui pro en enfilant sa veste-cape pour prendre sa moto, le sourire du gros bras asiat à machette -forcément increvable et revenant au dernier moment- quand son chef lui donne l'ordre de tuer etc.)


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MessagePosté: 24 Déc 2023, 12:57 
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Ah oui j'avais oublié de parler du vieux fond forcément réac du film, "les gangs s'entretuent dans nos rues pavillonnaires et tuent nos enfants". Et ce n'est quand on décide de contourner la loi et la police (par le policier lui-même) qu'on pourra régler le problème...

Ça m'a fait penser à cette chanson absolument ridicule découverte il y a quelques jours : https://youtu.be/b1_RKu-ESCY?si=6osqD24jVtTmpGpl

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MessagePosté: 24 Déc 2023, 14:39 
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Art Core a écrit:
Ah oui j'avais oublié de parler du vieux fond forcément réac du film, "les gangs s'entretuent dans nos rues pavillonnaires et tuent nos enfants".


Je pense que c'est surtout ça qui gêne, oui. Pourquoi ça passe si mal, ces films où un type lambda décide d'outrepasser le système et les conventions sociales pour se venger ? Les autres films où les criminels s'entretuent ou se font tuer par la police, zéro souci. C'est la crainte du mauvais exemple, du mauvais message ? De la contagion réactionnaire ? Je suis pas spécialiste du genre, mais ces films ne semblent pas tant révélateurs d'une poussée réactionnaire que d'une suffocation impuissante fasse à un réel épouvantable. C'est un fantasme d'empouvoirement du même ordre que le nerd qui triomphe des bullies, l'ouvrier du patron, l'honnête du corrompu etc... des tropes cinématographiques qui n'ont pas exactement eu d'effet concret sur la réalité sociale et structurelle du pays, alors que certains remontent par exemple à Capra.

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MessagePosté: 24 Déc 2023, 16:11 
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Art Core a écrit:
Et ce n'est quand on décide de contourner la loi et la police (par le policier lui-même) qu'on pourra régler le problème...


De plus, toute la partie "régler le problème" me paraît bien loin non pas tant de ce qui se passe, mais de ce qui se joue dans le film. On ne suit pas un mec qui part en croisade contre le crime organisé pour défendre son mode de vie face à l'irruption soudaine d'un cartel dans ses rues pavillonaires de classe moyenne. C'est là que la question de l'urbanisme (my bad pour la confusion côte ouest/Texas) tel qu'il est filmé par Woo ici me paraît tou à fait saisissante : dès l'ouverture, le perso de Kinnaman traverse ces lieux craignos, parfois semi-industriels, coulisses universelles des grandes villes américaines, mélanges de ruelles, voies de chemins de fers et sorties arrières d'entrepots où squattent les laissés pour comptes et les junkies... Et il traverse tout ça en pistant le ballon porté par le vent, lâché de son jardin : il habite littéralement à deux pas de la manifestation urbaine de cette corrosion toxique dont parle Bêtcépouhr Lahvi.

Et cette porosité, on la retrouve tout du long : pendant le trajet de retour de l'hôpital, quand il part acheter sa bagnole, lors de la course-poursuite de nuit. Ces rues sales, délabrées, délaissées sont le marqueur de l'assise des gangs (je mets volontairement de côté tout le set design de l'immeuble final, on est là plutôt dans le registre du huis-clos maléfique). En somme, le personnage vit dans un monde déjà contaminé, et ces parties contaminées font désormais partie du décor. Ce n'est pas anodin qu'il arrache sa croix non pas en pleurant sur son canapé, dans la chambre du gosse ou en picolant dans son garage, mais dans la bagnole au beau milieu d'une de ces rues défigurées (je serais curieux de revoir Hard Target, mon intuition me dit que Woo y a déjà l'oeil pour l'urbain lourd de sens).

Et ni cette criminalité, ni cette dégradation de l'espace commun ne sont fantasmés. On dit souvent qu'à Paris tu passes facilement d'une ambiance à une autre au gré de ton avancée, et c'est vrai pour toutes les grandes villes du monde. Mais c'est sans commune mesure avec les villes US, ou en un seul virage tu tombes sur des situations à la rond point porte de a Chapelle, mais dans des rues entières, et pas aussi excentrées. Qui plus dans des quartiers qui étaient tout à fait normaux quelques décénnies auparavant.

Ce qui me ramène au début de mon message, ainsi qu'à ça :

Bêtcépouhr Lahvi a écrit:
Au-delà de la cohérence du perso, c'est aussi ce genre de détails clichés-glauques qui me font regretter un John Woo qu'on a connu à la fois plus inventif et plus humaniste. Mais bon, l'âge aidant, il n'y a rien de vraiment choquant à voir un gars plutôt tragique lâcher l'affaire sur la beauté du monde.


Malgré tout ce que j'y vois, je ne pense donc pas qu'il s'agisse d'un film de croisade pour "régler le problème", mais d'une histoire franchement archétypale d'un individu brutalisé qui opte pour une forme de libération devenue indissociable d'un sacrifice : libération de tout un système de conventions sociales basées sur la soumission au due process. Plus réactionnel que réactionnaire, le film nous épargne les dialogues, et donc les interminables débats avec le flic impuissant autour du respect de la loi, mais aussi le poncif (toujours marrant, certes) des mecs arrêtés puis relachés grâce à un avocat véreux et/ou un procureur complaisant : tout repose sur les épaules du gars, qui a le choix entre faire face à une tristesse infinie et une impuissance pour lesquelles son épouse est mieux armée, par conformisme (la tristesse suffit, le reste n'est pas de notre ressort : voilà sa position tacite, d'où son incompréhension frustrée face à la dégradation initiale de son mari... incompréhension que lui comprend très bien, et qu'il respecte en l'éloignant), avec en effet l'alcool comme échapattoire de choix, ou alors reconfigurer radicalement son rapport au réel — réel qu'il a en fait compris dès le départ puisqu'il est spontanément parti à la poursuite des mecs alors que l'épouse est restée, on l'imagine, au chevet du fils à attendre les secours. Il a fait l'expérience de cette libération dès l'évènement perturbateur, spontanément, et une grande partie du film c'est juste lui qui se met à niveau pour y revenir de manière plus méthodique.

J'ai trouvé la lettre finale superbe, de ce ce point de vue. Dans un film dialogué ça aurait été le clou dans le cercueil. Mais là, avec cette épure silencieuse, qui met en valeur toute cette intentionnalité puissante, ça marche du tonnerre. "Ca m'a brisé, donc je vais aller jusqu'au bout. Je t'aime." Pfooo ! Bien sûr, ce scénario IRL serait aberrant (et sa femme qui l'aime alors ? et puis ce massacre ? les dealers, un de perdu, dix de retrouvés ! c'est pas ça qui règlera le problème ! etc.). Mais on est dans un récit. La beauté du monde n'est en effet plus dans les rues, mais dans ce qu'un homme serait capable de faire pour son fils qu'il n'a pas pu protéger.

Je trouve ça cool.

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MessagePosté: 24 Déc 2023, 18:38 
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Effectivement dans Hard Target l’environnement urbain délabré (et vidé de ses habitants) y est très important. Woo débarque aux US la tête pleine de ce rêve américain qu’on lui a vendu et y découvre un pays remplis de SDF (certains anciens combattants), et le héros américain y est représenté par un immigré SDF à coupe mullet… La charge est assez rare dans ce type de films à l’époque.

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Que lire cet hiver ?
Bien sûr, nous eûmes des orages, 168 pages, 14.00€ (Commander)
La Vie brève de Jan Palach, 192 pages, 16.50€ (Commander)


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Merci de confirmer ce que je soupçonnais. C'est quoi d'ailleurs l'histoire de la version longue ?

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MessagePosté: 25 Déc 2023, 10:16 
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J'ai DL le workprint, on s'en reparle dans un mois.

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MessagePosté: 25 Déc 2023, 10:39 
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Cosmo a écrit:
et le héros américain y est représenté par un immigré SDF à coupe mullet… La charge est assez rare dans ce type de films à l’époque.
Cajun, le Chance Boudreau. C'est encore plus fort qu'un immigré qui aurait eu un passif d'une démarche, d'un espoir. Là, c'est un mec assigné à résidence d'une communauté oblitérée. Jusqu'à ce que ça parte en cacahouète avec cet horrible vieil oncle en sidekick comique.

Ya quand même un film similaire plus ou moins au même moment avec un sacré casting de série B Que la chasse commence, avec un propos pas forcément plus glorieux sur la société.
Aucun souvenir.
Alors que lorsque j'ai revu Hard Target ya genre 5 ans, et ne l'ayant pas non plus vu plus de 3 fois (mais ya eu le visionnage cinéma qui marque), j'étais surpris de me souvenir de TOUT le film.
Ya une version longue ? Hyper curieux !


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MessagePosté: 25 Déc 2023, 10:43 
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Bêtcépouhr Lahvi a écrit:
Ya quand même un film similaire plus ou moins au même moment avec un sacré casting de série B Que la chasse commence, avec un propos pas forcément plus glorieux sur la société.
Aucun souvenir.


Surviving The Game en VO. J'y pense aussi systématiquement dès que Hard Target ressurgit. Je le remate et ouvre un topic dès que possible.

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MessagePosté: 30 Déc 2023, 22:27 
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Naissance d'une pieuvre | Triades - La mafia chinoise à la conquête du monde (1/3) | ARTE https://www.youtube.com/watch?v=p-aCGaTwXiY
Vu que le 1er épisode, qualité arte, je regarderai les 2 suivants.
10 dernières minutes pas inintéressantes sur les liens entre la triade et le cinéma hongkongais. John Woo n'est pas directement cité mais on peut y voir une explication sur le choix d'un héros policier pour Hard Boiled après une série de films du côté des triades.


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MessagePosté: 31 Déc 2023, 16:19 
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Müller a tout dit. J'ai bien aimé aussi même si ça grippe à certaines entournures : certains enchaînements qui sentent la coupe ou bien des idées pas ouf en termes de bastons. mais le deuxième reproche tient aussi du parti pris qui évite justement le proto-John Wick avec un protagoniste qui rame comme un beau diable pour exécuter sa vengeance
(et du coup, s'exécuter aussi)
. Il renvoie un peu à Sean Archer dans Face/Off mais aussi au Mark du Syndicat du Crime, estropié et donc, dans cet univers proprement masculin (John Woo reste John Woo), émasculé. Il est mutique et refuse d'utiliser un appareil, et de ce mutisme découle la fin de son mariage, son enfermement dans un monde où il ne communique avec personne et plus personne ne communique avec lui. Comme d'habitude chez Woo, la violence est une manière d'exprimer les sentiments et le tourment intérieurs, et tout le film découle du point de vue du protagoniste (la dilatation du temps en ouverture avec le médaillons comme des battements de cœur).

Il fait un mix de deux de ses plus grosses influences avec La rage du tigre (le héros estropié qui nous fait une remontada ultime) et Taxi Driver (par le prisme de son regard, le monde devient intégralement dégueulasse), mais j'ai aussi songé à RoboCop et à Mad Max par certains objets ou certaines scènes : la boîte à musique, le trombinoscope des salopards à retrouver... et surtout, l'idée que le personnage devient une sorte de Monstre de Frankenstein uniquement animé par cette volonté de vengeance. Une description qui passe par un pas lent, lourd et claudiquant : les scènes d'action n'ont rien d'aérien, car on sent le poids du destin qui cloue le protagoniste au sol (voir la scène de la baston dans la cuisine où le poids de l'agresseur brise la table ou bien les assaillants du gang qui s'écrasent tous comme des merdes, loin des scènes de voltiges habituelles). Il traîne sa misère, pour de bon, et le récit n'est pas aimable, ni ne valorise son action (il bute sa première victime sans même le regarder ou prendre conscience de son geste, mais en essayant de le virer du toit de sa bagnole comme on vire un moucheron). On est dans le bloodshed qui n'a plus rien d'heroic. Il n'y a que le flic qui l'aide qui a droit au geste-signature wooien des deux flingues tenus en même temps, et le film ne prend pas le parti d'une réunion aussi fusionnelle qu'entre Danny Lee et Chow Yun-Fat dans The Killer.

Et comme Müller, j'aime beaucoup l'utilisation du décor : le foyer du père qui est montré par étapes, chaque pièce étant un recoin de sa psyché ; le tunnel rougeoyant/bouche de l'enfer en dessous des escaliers qui mène au chef du gang ; la peinture murale avec ses yeux qui fixent Kinnaman...

Pas le plus plaisant ni le plus bruyant (TM) ou amusant des Woo. Mais même si cet aspect ludique me manque, il est justifié, et le tout n'est ni déshonorable ni foiré, malgré une facture qui n'est plus celles de ses glorieuses années.

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MessagePosté: 01 Jan 2024, 22:04 
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Revu donc avec Mme, qui aime beaucoup John Woo et reconnait son déclin, a passé un bon moment et trouvé ça "stylé".
Et j'ai encore plus apprécié mais... sans doute parce que je n'ai plus eu ce moment déceptif face aux relatives attentes (j'ai pourtant vu Manhunt à l'époque qui fait déjà le boulot niveau déception tout en laissant un souvenir positif malgré tout), car le ventre mou reste, surtout
parce qu'il y a toujours une gestion bancale du perso, une fois lancé dans sa vengeance.

Woo te met ce plan du père en mode "ça y est, il est barjo" quand il achète sa Mustang et met les essuis-glaces balayant la poussière mais l'écho, ce sont les essuis-glaces balayant le gangster et son sang, et là, petit chou n'a pas encore les tripes...
L'intention de laisser une humanité est d'autant plus noble dans l'environnement désespéré mais la gestion en fait vraiment le point faible du film.
D'autant qu'il y a la scène sur le parking où il ne passe pas à l'action à cause des gosses autour. Ca suffisait pour ne pas faire du gars un pur psycho.
Rebelote donc avec la camée épargnée, un instant, par le héros. Mais ce personnage reste pas mal notamment parce que permettant, malgré la pudeur visuelle de ne pas montrer l'injection de dope, d'appuyer sur la notion du mal, de la toxicité, s’immisçant partout.

Et j'insiste sur la notion religieuse mais en plus de la déco boules de Noël de l'antre de l'Antéchrist (et sa robe de Père Noël), il y a aussi ces bougies rappelant les églises chères à Woo, appuyée par une musique (qui fait plutôt bien le taff d'ailleurs sur ce film "muet") en mode choeur grégorien.

Et si je comprends qu'on soit pris par la lettre dans le cimetière, la mise en scène, franchement, à base d'incrust pourrie dans ce cimetière ultra clean, c'est pire que le fiston dans les boules... Même si, à l'image du film toujours sur le fil, la notion de cercle autour de la pierre tombale -voire d'un train "Union Pacific" pour son dernier film US-, laisse encore de quoi s'accrocher au tout dernier moment.

Autre fait que tout le monde remarquera à la 1ère vision mais que JulienLepers fait bien de citer: quand Brian refuse le machin "larynx artificiel" là, c'est qu'il fait le choix de s'enfermer dans son mutisme et sur lui-même, et par là-même justifie de se couper des autres et leurs impossibilités à lui parler.
Alors comme pleins d'autres choses dans ce film imparfait, c'est pas assez appuyé ou géré sur plus longtemps qu'une scène mais ça reste réfléchi et choisi.

Un peu bof de voir qu'en fait il y a une colombe sur le blason de la police locale. Un peu trop d'honneur pour la police. Et surtout gratuit (enfin, les colombes chez Woo sont gratuites depuis un moment, même si dans Manhunt, ya une petite variation sympa).

Et ouais, on aura vu mieux niveau action mais la lisibilité des scènes met encore papy dans le haut du panier. En mode automatique, certes, mais il mord encore un peu et nous épargne les bouillies plus communes.

John Woo n'aura de toute façon rien fait de mieux que sa période polar HK. Même son pic US Face/Off nous mettait déjà en face de la réalité.
Et si son film épique des 3 Royaumes (Windtalkers étant une sorte de brouillon finalement) reste grandiose, il est quand même en deça des claques avec Chow Yun-Fat et compagnie.

Silent Night est meilleur que Broken Arrow (même si j'adore tout en sachant que c'est limité, je ne me le referais jamais pour ne pas gâcher mes souvenirs adolescents). Et oui, son côté glauque serait très bien allé à Hard Target (qui envoie plus en terme d'action pure).

Ca ne marquera pas tant que ça sa filmo mais si ça devait être son dernier film, je suis du côté de ceux qui sont contents qu'il l'ait fait. Plus que l'anecdotique, même si sympa (et finalement trop gentil), Manhunt, en tout cas.

A voir un jour The Crossing qui traîne depuis longtemps sur le DD (tout comme le Règne des Assassins, qu'a l'air basiquissime). Je reste curieux de la fresque qui semblait beaucoup plus motiver Woo que l'actioner après M:I-2, mais ça n'a pas l'air fou non plus et dure des plombes.


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MessagePosté: 12 Mar 2024, 16:28 
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Müller a écrit:
J'aurais bien du mal à resituer le film dans une appréciation d'ensemble de la filmographie de Woo, il faudra sans doute attendre la fin de la retro de FF pour ça

Ça va être difficile tellement c'est vide.

Au-delà de l'exercice de style, qui peut paraître poussif dans son jusqu'au-boutisme (le héros ne peut plus parler mais personne d'autre ne parle en fait, même quand ça n'a pas grand sens) mais qu'on accepte allez, l'idée du film muet est doublement pertinente car elle permet, comme cela a été évoqué plus haut, de dépouiller un film mille fois vus de dialogues mille fois entendus, mais surtout d'épouser l'état d'esprit d'un personnage qui, même s'il pouvait parler, ne pourrait pas s'appuyer sur des mots pour avancer. Aucun mot ne pourrait exprimer sa douleur, aucune parole ne pourrait lui rendre son fils. Le parti-pris formel devient alors symbole de la figure du vigilante, de la notion de take matter into your own hands. L'heure n'est plus aux palabres mais à l'action.

Sur le papier, c'est taillé sur mesure pour Woo dont l'esthétique grossière - oui oui même celles des flashbacks avec le fils - se prête à du cinéma qui laisse les images parler, mais si le film paraît instantanément plus incarné que le précédent (et bien plus regardable d'un pur point de vue technique), on aurait aimé voir le metteur en scène plus inspiré pour figurer les émotions. Il y a ce plan GIGA TOO MUCH mais génial, qui suit en gros plan la larme couler de l’œil de la femme, le long de sa joue, jusqu'au menton et qui, lorsqu'elle tombe du visage, se raccorde sur un gros plan au ralenti d'une balle qui chute au sol. Si tout le film avait été de cet acabit, ça aurait été mortel. Parce qu'on aime Woo quand il y va à fond.

Et ici, il y va pas vraiment à fond.

Je veux bien que l'exposition prenne son temps mais trop de flashbacks étirent le premier acte inutilement, la faute à une ouverture in medias res pour avoir un peu d'action dans la première heure parce qu'il faut attendre la 50ème minute avant la prochaine. Cinquante minutes durant lesquels des scènes classiques d'entraînement/préparation, généralement réduites à une séquence montage galvanisante, s'éternisent sans n'avoir grand chose à dire. Le scénario aurait pu se servir de ces scènes pour montrer la facilité avec laquelle un quidam peut se procurer des armes aux USA (ici limité à une scène cliché torchée de mec qui achète un sac d'armes dans un entrepôt random) ou bien la culture de la violence (le protagoniste apprend à se battre en regardant des vidéos YouTube) mais l'absence de la moindre idée était le premier indice qu'on est face à un film qui n'a globalement rien à dire.

Le film aurait sans doute été plus pertinent si le personnage principal n'était pas interprété par Joel Kinnaman (meilleur muet que parlant mais tout de même pas ouf), habitué des thrillers et films d'action, mais par M. Toutlemonde. C'est la seule bonne idée de Nobody, caster Bob Odenkirk, avant que le film ne fasse la bêtise de donner un passé d'agent gouvernemental du personnage. Quitte à faire du film de mec normal qui devient un tueur expéditif, autant y aller à fond. Il y a un peu de ça lors du premier combat, qui dure et sent la galère (après c'est pas la baston de The Killer de Fincher non plus). Mais le réel n'intéresse pas vraiment Woo et le film retombe par conséquent sur des stéréotypes fatigués, avec ce gang de latino d'une ringardise achevée (qui n'est un commentaire sur rien, n'en déplaise à Müller). Jadis, le cinéma de Woo s'attachait aux laissés-pour-compte, aux opprimés, démunis face aux puissants, mais là on est simplement dans une logique fascisante de bas étage (peut-être un aveu d'échec de Woo commentant ce nouveau retour aux États-Unis).

Moi non plus, cela ne me dérange pas forcément mais seulement si :
- ça raconte quelque chose
ou
- ça m'en donne pour mon argent en termes d'exutoires.

Bref, faut que ça éveille l'intérêt. Or, Silent Night échoue complètement sur le premier point et s'avère un peu chiche sur le second.
Le héros est seul cette fois donc point de fraternité (même si on a droit à la version peau de chagrin avec le flic pour deux balles à la fin) et la trajectoire du protagoniste a beau tenir du chemin de croix cher à l'auteur, le traitement demeure superficiel, et cette conclusion laisse terriblement sur sa faim. Le film ne dénonce pas l'inanité de la vengeance, ne la cautionne pas forcément non plus. Il est juste là. Going through the motions d'un genre sans rien proposer à part quelques fusillades bof, un plan-séquence qui rappelle moins celui de Hard Boiled que ceux des séries Marvel de Netflix, à base de couloirs marrons d'immeubles miteux. Il y a sans doute là aussi l'idée de montrer un personnage qui n'a pas la maestria de Tequila, Celui Qui Glissait Sur Les Rampes, mais ça reste du one-man-army.
Et s'il reste évidement quelques images cool, force est de constater que Woo est dépassé (et son prochain étant un auto-remake, ça sent vraiment ça).

Quand la bande-annonce est sortie, je l'avais retweeté en disant "Fuck John Wick". Mais la réalité, c'est que les scènes d'action des John Wick (au moins celles du 2 et du 4) sont largement plus inventives et kiffantes. Et si ici le but n'était d'être kiffant, ce n'est pas assez désesthétisé et douloureux (comme pouvait l'être Une balle dans la tête par exemple).

Pas catastrophique mais très moyen.

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Bravo ! J'imagine la satisfaction d'arriver au bout (même si c'est dommage que ça finisse par celui-ci).

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