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MessagePosté: 31 Juil 2019, 11:59 
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1944, un bateau s'enfonce dans l'Océan Atlantique, coulé par un sous-marin allemand. Une femme, très élégante, ayant pu sauver ses bagages et son manteau d'hermine, s'est réfugiée dans un petit canot. Impassible, elle filme la catastrophe avec une petite caméra. C'est visiblement une journaliste reconnue.
Elle est progressivement rejointe (à la nage) par d'autres passagers, tous très typés : Kovac un mécano, viril, tatoué, et qui ne cachera pas ses sympathies communistes. Charles Rittenhouse, un grand patron, issu du même univers que la journaliste et qui s'efforcera de maintenir les usages de son milieu et d'organiser la vie à bord. Sparks et Alice, un marin anglais et une infirmière américaine, tous les deux dévoués et plus effacés, mais déjà habitués à la guerre (c'est le troisième naufrage de Sparks). Gus Smith, un mécano, copain de Kovacs, bedonnant et jovial, mais blessé à la jambe. Joe, un mécano afro-américain, visiblement venu du Sud rural et raciste, qui sauve du naufrage une jeune anglaise, catatonique, et son bébé. On apprendra que la mère était déjà traumatisée par un bombardement, et venue aux USA pour accoucher et suivre un traitement psychiatrique . Et finalement, ultime survivant, un marin allemand, le sous-marin ayant lui-même été coulé par sa cible...


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:) (le caméo, mais aussi l'article sur les comités de riverains des parcs ,ainsi que celui sur l'effondrement cosmique)
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Lifeboat (laissé sans traduction en français, il est vrai que Le Canot de sauvetage ou La Barque sonnent mieux dans une nouvelle que dans un film ) est un film moins commenté et, semble-t-il, moins vu, que les autres Hitchcock de cette période. Il est basé sur une nouvelle de Steinbeck, qui s'est fâché avec Hitchcock pendant le film, s'estimant trahi, et fut remplacé par Ben Hecht.
Disons-le tout de suite, c'est un très bon film, formellement différent mais politiquement assez proche des Enchaînes par le point de vue porté sur le nazisme. Tout l'enjeu du film est de le définir moins comme une idéologie nationale que comme une radicalisation, à la fois irréfléchie et d'une complaisance calculée, des aspects les plus violents et irraisonnés de la psyché humaine. C'est à dire qu'il ne se pense comme problème morale et ne peut être jugé que là où il ne fait pas obstacle à l'identification. Hitchcock décale le film de propagande guerrier : le problème est déjà moins de combattre le nazisme que de le juger, d'autant plus que sa différence et singularité monstrueuse est en permanence justifiée et expliquée par les criminels eux-mêmes. Du point de vue de l'ennemi, la guerre et la mise à mort de l'autre sont paradoxalement un discours tenu vers ceux à qui ils s'opposent.
Le juger est un rapport à soi-même plutôt qu'à l'autre. L'erreur est de confondre le refoulé avec le caché.


Il y a dans le film quelque-chose d'à la fois archaïsant et statique, d'issus de plusieurs genres, à la fois dévalués et nobles (le théâtre, le cinéma muet, le jeu d'enfant mais aussi des réminiscences du Radeau de la Méduse de Géricault et d'Homère) et étonnement moderne. Cette modernité concerne notamment la manière dont les personnages sont hyper-typés sociologiquement, tout en développant chacuns une histoire et un parcours de vie
crédibles. Paradoxalement la surécriture - car le film est tout en dialogue (et certaines parties relèvent presque du screwball du fait de l'humour cynique du personnage de Tallulah Blankheart) ) fait sortir les acteurs, excellents, du jeu naturaliste et psychologisant de l'époque. Pour autant, malgré ce statisme, lié au dispositif du film (un grand nombre de personnages en même temps dans le cadre), les effets de montages, cadres et inserts sont remarquables. Le tout début avec le naufrage et les plans sur les débris est aussi simple que génial. Le trucage pyrotechnique final a aussi extrêmement bien vieilli. Le noir et blanc renforce le réalisme du film, il réprésente plus la résolution d'une contrainte technique qu'une stylisation expressionniste. La barque n'est montrée qu'une seule fois de l'extérieur, ce qui renforce la sensation d'être réellement en présence de la mer.

Mais sortir donc de la psychologie : certains personnages cachent un trauma (que le film bien sûr mettra à jour) ; d'autres un désir (la fade, jolie et efficace infirmière qui dira tout à coup Je suis bien contente que le bateau ai coulé, avant de broder sur une histoire d'amour avec un médécin marié digne des Inconnus pour se rattraper), mais l'apparence extérieur du refoulement et la fonction de l'aveu sont à chaque fois identiques. Le seul personnage au sujet dquel on ne peut distinguer ce qui relève du trauma ou du désir est le nazi (idée géniale :
il révèle cyniquement qu'il parle anglais après que le pitch de tous les autres acteurs aient été développé, pour les commander -ce qui est peut-être le but de la psychanalyse, échanger les sujets de la loi avec ceux du désir- , mais ne dit rien de son histoire, sinon son métier, sa position sociale, et des chansons à boire qu'il balance comme des secrets
).
Le film est aussi étonnament érotique. Le fil narratif central est la relation amour-haine entre Tallulah Blankhead et le mécano communiste joué par John Hodiak où, à la fascination pour les tatouages de l'une -
objet d'un dialogue extrêment drôle : En plus des intiales pourquoi pas aussi indiquer l'adresse et le numéro de téléphone ?
répond le fétichisme du pied de l'autre.


Peut-être cette réciprocité et équivalence indiquent aussi que la bourgeoise et la communiste partagent une même idée - isolée - du pouvoir
: le nazi qui explique au personnage de Bankhead que si elle se débarrasse de sa montre luxueuseement sertie et ornée, Kovac aura enfin envie de coucher avec elle : pour que l'idée de pouvoir soit communes à toutes les classes sociales, il faut que la nudité elle-même ait une valeur,
).

Plus le bateau s'enfonce dans la soif, le soleil et le désoeuvrement, plus les personnages ont envie de baiser - il n'y a plus rien entre le cul et la politique, et pour cela l'ordre social, même au sein de la catastrophe, est intégralement conservé. Cette conservation est l'autre nom de la honte, c'est aussi une censure du signe, mais pas de la réalité sous-jacente, qui reste dicible et échangeable avec autrui. Les personnages sont perpétuellement à la recherche d'un objet de transaction qu'ils ne trouvent, soit qu'il soit emporté npar les flots, soit qu'il corresponde à ce que autre a déjà.


Sur un autre plan, il y a aussi une représentation, intéressante car rare chez Hitchcock, d'un personnage afro-américain (joué par Canada Lee) . Cela a été une des causes du conflit avec Steinbeck, qui a reproché à Hitchcock le côté caricatral du personnage (à la fois effacé et héroïque, c'est lui qui sauve l'anglaise, ce que les autres personnage oublient
car elle se suicidera
.
C'est vrai, mais le film est aussi très franc dans la dénonciation du racisme des autres personnages (la gêne de Rittenhouse, qui dirige le bateau comme une entreprise, quand il doit proposer à Joe de voter sur le sort du bateau, en dernier, et l'abstention de ce dernier qui a la connotation d'un signe de résistance. J'ai personnellement trouvé ce personnage fullerien. Cela rappelle, mine de rien, le héros de L'Homme qui Meurt de Baidwin qui explique pourquoi il n'en a rien à foutre de la Deuxième Guerre Mondiale.
Le film a aussi des moments d'une puissance shakespearienne (
les deux personnages qui mourront et basculeront dans l'eau, fous et délirants dans le bateau, mais qui retrouveront parole et lucidité au moment de basculer, sans que personne ne sache comment receuillir ce qu'ils disent, qui est aussi le sens final du film : ce sont les seuls sujets qui peuvent juger le criminel sans se tromper comme le dit finement Sparks, mais ce jugement fonctionne alors comme une trace)
)
Comme d'habitude, je surcommente, mais le film est,profond et extrêmement drôle, un des grands Hitchcock. Peut-être un peu plus "mineur" que Notorious ou ses classiques des années 50, mais finalement (à cause de cela) ayant plus fortement influencé le cinéma contemporain (sans ce film pas de Gravity ou d' Interstellar, qui compensent la perte de vérité psychologique par un esprit de sérieux parfois difficile à avaler).


Très bonne prestation de Tallulah Bankhead, actrice que je n'avais jamais vu avant ce film, marquante, sorte de mixte entre Katherine Hepburn pour la distinction à la fois excentrique aristocratique et Marlene Dietrich pour quelque chose de plus à fleur de peau et cynique. Hitchcock a, pour une fois, visiblement beaucoup de sympathie pour son premier rôle féminin; il est vrai plus âgée (le film est un come back ) que les autres blondes de ses films. Film aussi pratiquement sans musique, hormis le générique, très novateur pour l'époque, qui nous implique in media res dans la naufrage.

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Sur un secrétaire, j'avise deux statuettes de chevaux : minuscules petites têtes sur des corps puissants et ballonés de percherons. Sont-ils africains ? Étrusques ?
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Dernière édition par Vieux-Gontrand le 31 Juil 2019, 13:44, édité 18 fois.

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MessagePosté: 31 Juil 2019, 12:12 
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Les photos 3 et 4 sont trop grandes


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MessagePosté: 31 Juil 2019, 12:26 
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Tallulah et John le valent bien

J'aime aussi ce plan avec Mary Anderson et Hume Cronyn

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Dernière édition par Vieux-Gontrand le 31 Juil 2019, 12:41, édité 1 fois.

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MessagePosté: 31 Juil 2019, 12:33 
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Ok je te laisse seul avec ta critique alors, je vais pas m'amuser à faire du droite/gauche pour parveniir à la lire.


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MessagePosté: 31 Juil 2019, 12:43 
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Même avec une largeur de page adaptée à un écran 11" , et des internaute qui n'annocent de manière plus ou moins détournée à leur interlocuteur leurs règles, on ne peut pas dire que la partie cinéma du forum soit devenuie très active...

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MessagePosté: 31 Juil 2019, 12:45 
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Sir Flashball
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Et Gontrand vient de s'aliéner son seul lecteur !

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MessagePosté: 31 Juil 2019, 12:47 
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C'est sûr, du coup tu essaies de porter le coup fatal?


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MessagePosté: 31 Juil 2019, 12:51 
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On dirait une scission de l'UNEF (embrassez-vous maintenant)

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MessagePosté: 31 Juil 2019, 14:33 
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Le film m'intrigue mais plus que la longueur c'est ta mise en page qui est décourageante Gontrand.
Alors que ton texte doit surement être intéressant.


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MessagePosté: 31 Juil 2019, 14:41 
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Abyssin a écrit:
Le film m'intrigue mais plus que la longueur c'est ta mise en page qui est décourageante Gontrand.
Alors que ton texte doit surement être intéressant.

En fait la mise en page est moins décourageante que son texte (que j'ai finalement lu), bourré de fautes de frappes (on se demande ce qu'il édite 9 fois) et pompeusement alambiqué. Il a des choses intéressantes à dire mais gagnerait à plus de simplicité.

Sinon le film je l'ai découvert il y a quelques mois, c'est intéressant mais tout de même assez loin des meilleurs Hitchcock


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MessagePosté: 31 Juil 2019, 14:54 
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J'imagine bien que c'est pas un de ses films majeurs mais J'essaierai de le voir, j'aime bien les Hitchcock de cette époque.


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MessagePosté: 31 Juil 2019, 18:22 
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C'est un peu trop formaliste et maniériste, mais quand-même pas mal. Proche de la Corde, mais en plus fluide.

Il y a des Hitchcock qui ne me parlent pas (l'Ombre d'un Doute ou l'Inconnu du Nord Express, peut-être les plus centrés sur le sadisme sexuel) mais d'autres que j'aime, dont celui-là.
Là ce qui me frappe le plus un jour après la vision, c'est le ressemblance physique entre Walter Slezak qui joue le nazi et William Bendix,le personnage le plus martyrisé par l'histoire, qui renforce l'idée d'Hitchcock que le sauveur est aussi, par excellence, le meurtrier de celui qu'il a fait vivre (mais c'est pourtant la victime et non le " méchant" qui assume cette ambivalence comme une pure fonction). Les autres passagers ne perçoivent pas cette ambivalence, mais y sont aussi du même coup extérieurs, parce que leur rapports réciproques ne sont uniquement que des transactions.



Ils sont sauvés lorsqu'il n'y a plus rien à échanger et plus rien, non plus, à raconter sur le bateau, et se décident à pêcher : il y a une séparation très nette entre les attitudes et objets qui relèvent de l'échange (qui sont par ailleurs mal distingués : une boussole ressemble trop à une montre, les cartes de poker en papier sont inévitablement marquées et identifiables) et ceux qui relèvent de la consommation (uniques, mais susceptibles d'être détournés, comme le bracelet doré qui devient un hameçon... ce qu'il est bien-sûr dès le début dans un sens figuré et érotique), séparation qu'ils subissent mais qui les protège de tomber dans l'idéologie, et est à la racine de leur scepticisme. Malgré leur immoralité et leur dureté ils sont moralement légitimés. J'ai été marqué par le passage où le personnage de Tallulah Bankhead est silencieusement mais visiblement très incommodée par le fait que la mère se soit suicidée avec son manteau d'hermine : c'est choquant, mais cette bêtise, parce qu'elle est inimitable, singulière et assumée, rattache la charité et l'aide à une logique de consommation et de dépense plutôt que d'échange et d'imitation (la scène et l'affect qu'elle montre repondent aussi très finement au fait que l'on ne sait pas qui a jeté la dépouille de son bébé, quelqu'un aurait-il assumé ce geste que la femme ne se serait sans doute pas jetée à la mer. En se suicidant la mère interdit aux autres personnages de se réfugier dans le hors-champ : ils pouvaient très bien s'expliquer de l'intérieur du film, l'espace leur était laissé mais ils ne l'ont pas pris - à l'exception du nazi, d'un certain côté). Seuls Hitchcock et peut-être Fritz Lang peuvent filmer de telles situations.

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MessagePosté: 07 Nov 2019, 22:03 
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Les photos rendent le texte impossible à lire, qui est lui-même imbitable, donc il y a une forme de logique dans ce choix d'illustration. J'ai dû le copier-coller pour pouvoir le lire. Alors que comme le dit Lohmann, je suis sûr que tu as des idées intéressantes mais elles sont impénétrables. Je suis en train de finir le film, je ne sais pas trop quoi en penser. Son érotisme, comme le signale Gontrand, nous paraît étonnant mais n'est-ce pas plaquer des idées actuelles sur des vieux films ? Dans le même ordre idée, si je crois Gontrand, le personnage de noir a choqué Steinbeck ? Eh bien si c'est le cas, ils étaient bien plus progressistes à cette époque, en plein nazisme pourtant.


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MessagePosté: 07 Nov 2019, 23:30 
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Lu l'espèce de démenti de Steinbeck dont le personnage de Joe a été transformé en, je cite :"stock comedy Negro. On the contrary there was an intelligent and thoughtful seaman who knew realistically what he was about. And instead of the usual colored travesty of the half comic and half pathetic Negro there was a Negro of dignity, purpose and personality"
Marrant parce que ça reste le personnage le plus digne, en retrait forcément à cause d'un racisme latent. Dans le films, il n'est ni drôle ni pathétique, juste sobre. Je serais curieux de savoir ce qu'il y a de différent dans le script original.


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MessagePosté: 08 Nov 2019, 02:26 
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Il est sûr que l'érotisme n'existait pas en 1944
la chaîne aux pieds de Barbara Standwyck qui rend le personnage masculin d'Assurance sur la Mort aussi calculateur que soumis c'est la même année, un peu le même type de relation que celle de Blankhead-Hodiak dans ce film. On pourrait dire que le personnage de Standwyck est une enflure et pas celui de Blankhead mais même pas : Standwyck ne demande finalement pas de tuer pas pour l'argent (même sa cruauté ne change rien à la structure bureaucratique qui gère cet argent sans le détenir, et qui est une forme de surmoi particulièrement efficace) mais pour sa liberté, qu'elle est d'ailleurs en mesure de se représenter parfaitement , et pas pour l'argent, quand la sophistiquée Blankhead pense au vison qu'elle a prêté à la veuve et l'orphelin, contre leur gré et perdus avec leur mort. Les innocents chez Hitchcock ont déjà perdu leur surmoi avant de mourir
, et que du coup il était très facile à représenter, notamment dans un film de guerre (qui ne met en scène pratiquement que des civils, ou en tout cas des non-combattants, sauf l'ennemi). Il ne joue aucun rôle dans le fascisme ordinaire non plus. Hitchcock n'a aucun mérite de nous l'expliquer tout en provoquant notre plaisir. Pourquoi Wilder s'est échiné à faire la Scandaleuse de Berlin et de transformer Dietrich en nazie rigolote et cyniquement fétichiste aussi, plaquant ainsi des idées venues d'un futur trop clair pour ses contemporains (mais pas pour les brillants internautes de 2019 qui ont tout compris d'avance : voir et vérifier, mais c'est devenu la même chose voyons ! Même plus besoin de réfléchir ) sur sa propre époque ?
Avec un tel niveau de révisionnisme il est en effet particulièrement aisé d'expliquer aux autres comment avoir les idées claires.

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