
ça fait partir de l'experience de vieillir de revoir des films qu'on a vu en étant jeunes et de constater le méchant coup dans la gueule qu'ils ont pris depuis.
alors, certes, c'est un film de danny boyle - le réalisateur dont les films vieillissent mal dès le lendemain de leur sortie - mais c'est quand même rude. tout a pris 4000 ans dans la gueule, le style du film, ses préoccupations, moby et les all saints en bo, tout. rien que le 'scandale écologique' que ça a entrainé est inimaginable aujourd'hui - les occidentaux qui vont tourner un film en thailande sur une plage paradisiaque et qui saccagent le truc sans états d'âme avant de repartir... aujourd'hui ils en feraient des caisses pour faire savoir qu'ils utilisaient des toilettes seches sur le tournage.
à sa décharge, c'est un film de jeunesse, qui veut parler et capter à la jeunesse. c'est donc assez logique que ça capte le moment m et que ce soit plus compliqué derrière.
de fait, di caprio avait 24 ans, ledoyen 22, canet 26 (mais déjà aussi nul qu'aujourdhui ! aucune évolution catastrophique de son premier à son dernier jour devant les caméras, on applaudit la constance) et garland 25 quand il l'a écrit. et ça avait une ambition de capter une aspiration générationnelle - le monde occidental qui ne nourrit pas l'âme (et l'absence de sens collectif qui pousse à une quête individuelle...), les citoyens de la planète, le retour à quelque chose de vrai. mais de fait, c'est donc le follow up de titanic et le livre a été bien transformé pour s'adapter à son nouveau public potentiel.
et j'aimerais dire que ça a du pour et du contre, mais au final, ça a surtout du contre.
ça commence avec la catastrophique voix-off, avec di caprio et sa voix juvénile qui lit avec un ton pénetré (ça n'a jamais été son fort vraiment) un texte qu'on croirait écrit par un ado certain d'avoir compris le sens de la vie après lu son premier joint.
ça se poursuit de fait avec les 3 acteurs, qui sont vraiment tous jeunes à un stade qui nuit un petit peu au film : les autres habitants de l'île ont clairement plus 25-30 ans, et ces trois jeunes gens très propres ça n'évoque pas des gens qui vont refaire leur vie en sac à dos en asie à 20 ans. il y a vraiment un décalage qui nuit à la crédibilité et à la compréhension des personnages.
après, c'est bien établi, tout ça a été bien édulcoré pour ne pas faire peur aux adolescentes. c'est donc franchement niaiseux, le paradis est débarassé de toute notion politique ou de reflexion sur la vie en société. la triangle amoureux est juste apocalyptique, vraiment du niveau d'un teen show wb. les minuscules intrigues couillonnes qui se développent font ressembler tout ça à du young adult totalement denué d'envergure - ce que ça pourrait être, dans l'absolu ça pourrait être rigolo comme ça.
sauf qu'il y a ensuite la fin, la bascule dans la "folie" de di caprio d'une scène sur l'autre qui n'a aucun sens narratif ni dramatique, sa fin toute niaiseuse, et la volonté active de ne rien avoir de politique, profond ou dur qui vide tout cela de son sens.
au final ça fait partie des films tout entier définis et abimés par leur star.
le film est considéré comme un flop, parce qu'il a couté 55m et rapporté 145 dans le monde et 40 aux usa. sur les 55 y en avait 20 pour di caprio, et en follow up de titanic les chiffres sont forcément décevants.
c'est évident que le budget et la pression ont contribué à des décisions artistiques qui ont profondément nuit au sens du film.
aujourd'hui danny boyle dit que même le tournage était infernal parce que "tout le monde faisait la fête tout le temps en voulant profiter à fond de la thailande"... ("tout le monde" ==> suivez son regard) et que c'était dur de faire les choses bien dans ce contexte...
et tout ça pour di caprio qui abime le film parce qu'il est trop jeune, qu'il a une vibe 50% énorme kéké 50% essaye d'être profond mais ne l'est pas...
et en même temps, c'était son déjà un signe qu'il allait chercher les réalisateurs intéressants et des projets pas forcément ultra safe tout le temps.
mais enfin c'est quand même une grosse plantade.