Ma foi, la BD dite "élitiste", ou adulte, est celle qui fera sortir la bande-dessinée de sa "minorité"... Donc rien ne sert de lui cracher dessus! En revanche, il est clair que la BD franco-belge ne doit pas perdre son assise populaire. L'un n'empêche pas l'autre.
Ce qui est étonnant, dans le franco-belge, c'est qu'à côté de l'émergence d'une bande-dessinée d'auteur (phénomène qu'on retrouve largement dans le comics américain, où le
graphic novel d'auteur a pris une place prépondérante, et sans doute aussi dans le manga), c'est qu'on a assisté à partir des années 90 à l'émergence d'une BD bas-de-gamme dite "de supermarché", investissant massivement le domaine de l'humour, et qu'on retrouve principalement dans les grandes surfaces. Les principaux éditeurs en sont Soleil, Jungle, Bamboo, Vents d'Ouest...
J'avais lu une étude sur internet sur le sujet, il faudrait que je la retrouve, mais il me semble que ce phénomène est unique en Europe, si ce n'est dans le monde dans le domaine de la BD. Je sais que vous n'êtes pas friand de ce genre de lecture, mais pour ma part je m'interroge sur les raisons de l'émergence d'une telle production, évidemment très commerciale (ou en tout cas, plus que les autres, car
tout est commercial).
Bref, la bande-dessinée, depuis 20 ans, fait de plus en plus le grand écart entre le "haut de gamme" élitiste et le "bas de gamme". Signe de maturité d'un genre qui élargit ses publics, ou début de la fin pour la BD en tant que divertissement populaire de qualité (n'oublions pas que le manga, et a fortiori les sheinen, tend à remplacer de plus en plus la BD dans ce rôle traditionnel)?
EDIT: j'ai retrouvé le lien en question, c'est amateur mais intéressant quand même (dommage qu'il n'insiste pas plus sur la BD d'humour à thème, et se concentrent un peu trop sur les motivations des acheteurs)
http://www.krinein.com/bd/savais-quoi-o ... -6050.htmlVoici d'ailleurs à titre de curiosité, mon avis sur la BD de présentation de l'article, "Je ne savais pas quoi t'offrir donc je t'ai pris ça" (cet avis date de janvier 2008, depuis ma position a quelque peu évolué):
Citation:
Je suis habituellement l'un des premiers à m'opposer à ceux qui vilipendent à tour de bras la bande-dessinée dite "commerciale" ou "de supermarché".
Mais quand on voit "Je ne savais pas quoi t'offrir donc je t'ai pris ça", on est en droit de se dire que la ligne jaune de la surenchère mercantiliste a été franchie.
Depuis le milieu des années 90, on a assisté à l'explosion des "BDs à thème", clairement destinées à être achetées comme objet de cadeau. Jim a été et reste toujours l'un des fers de lance de cette explosion, depuis son Tous les défauts des mecs de 1994, jusqu'à Les mariés en fin 2007. L'émergence des "BD à thème" n'est pas mauvaise en elle-même, elle fait partie de l'évolution globale de notre société qui devient de plus en plus consumériste.
"Je ne savais pas quoi t'offrir donc je t'ai pris ça" peut représenter la quintessence de ces BDs faites pour offrir. Un grand format pour prendre le plus de place possible sur les rayons, des couleurs criardes pour attirer l'oeil du chaland, un titre énorme et accrocheur pour aiguiser sa curiosité. Tout y est, dans des proportions supérieures à la production "mainstream".
Mais une limite a été franchie : c'est la première BD qui assume aussi ouvertement son statut mercantiliste. Mais quel contenu propose-t-elle? Justement, rien ou presque. L'auteur joue sur un aspect soi-disant "décalé", et le lecteur se trouve plongé des les tribulations d'un personnage qui n'arrive pas à choisir un cadeau, qui achète la présente BD, et qui essaie de s'en justifier. Jim y met toute la verve qui le caractérise, c'est indéniable, mais cela ne change rien, car toute la virtuosité du monde ne pourrait effacer la vacuité intrinsèque de cette BD.
Si vous voulez offrir, choisissez tout, même le plus médiocre des albums de La Vérité sur..., la démarche sera en tout cas plus honnête qu'avec "Je ne savais pas quoi t'offrir donc je t'ai pris ça".