Forum de FilmDeCulte

Le forum cinéma le plus méchant du net...
Nous sommes le 25 Déc 2024, 05:57

Heures au format UTC + 1 heure




Poster un nouveau sujet Répondre au sujet  [ 7 messages ] 
Auteur Message
MessagePosté: 08 Déc 2012, 04:04 
Hors ligne
Teacher

Inscription: 13 Mai 2010, 11:50
Messages: 11667
Drôle de frimousse (eurgh) en français.

Image

Maggie Prescott, rédactrice en chef du magazine Quality, recherche un mannequin pour présenter les dernières créations d'un couturier français. Le photographe du magazine, Dick Avery, va trouver la personne idéale : Jo Stockton, une jeune libraire modeste qui, loin de s'intéresser à la mode, ne jure que par la philosophie.


J'ai sous-estimé Donen. Même si beaucoup plus abouti, Chantons sous la pluie m'avait finalement pas laissé un souvenir impérissable. Alors que là, malgré un ensemble imparfait, il y a régulièrement des scènes qui me foutent sur le cul.

C'est pourtant un film témoin (comme beaucoup à partir de cette période j'ai l'impression) d'un cinéma classique qui montre ses premiers signes d'agonie, par épuisement ou saturation, face à un monde qu'il n'est plus possible de filmer ainsi. Il y a comme une aberration à voir l'abstraction harmonieuse de la comédie musicale, dont Donen applique strictement les codes sans aucun compromis ("comme si de rien n'était"), se cogner à l'acidité de l'imagerie pop naissante, ou aux cercles de discussion Sartriens... A ce titre, les quelques passages extérieurs d'un Paris réaliste à l'orée des années 60, pris dans le mouvement d'une chanson touristique dont la magie n'opère pas, et dont les reconfigurations artificielles se voient comme le nez au milieu de la figure, a quelque chose de sinistre.

Le film semble ainsi toujours flirter avec l'assemblage mortifère et mécanique de numéros de claquettes, d'une maîtrise exténuée menée à bout... Tout l'enjeu de Donen est de se concentrer, de rester focalisé, d'avoir conscience de ce qu'il raconte malgré l'archétypal extrême de son scénario. L'héroïne a beau être une caricature ultra-basique d'intello qui découvre la vie, la simplicité crue de sa première chanson (seule dans une pièce, parlant presque plus qu'elle ne chante, ne gérant la montée en puissance que par l'utilisation d'un simple chapeau) a quelque chose d'impressionnant. Idem pour le petit pas de deux à peine dansé, calqué sur le minutage d'une exposition photographique, qui s'épanouit majestueusement dans les 5m² d'un labo photo... A coups d'abstraction, Donen parvient souvent à circonscrire l'essence de situations cent fois filmées avant lui.

Et cette abstraction est partout, car le film répond à la gifle d'altérité qu'il reçoit en pleine gueule (celle des sixties qui arrivent) par une autre violence, celle de la satire, outrée et grossière (voire franchement bête parfois), mais qui lui permet au moins de recomposer avec ces éléments comme il l'entend, de parler du monde nouveau avec ses propres armes. Ça donne parfois des droits de réponse brillants, comme la scène de danse au club, qui tout en se foutant des tics d'une certaine danse contemporaine, caricature la chose par le biais d'une chorégraphie si exceptionnelle, mise en scène avec une telle maîtrise, qu'elle finit par en faire une sorte d'éloge détourné.

Il faudrait étudier les évolutions du genre, mais j'ai l'impression que le film, de peur de se paumer dans un environnement où il a de moins en moins ses marques, s'épure et se replie sur l'essentiel, s'interdit les fioritures et le flamboyant (y compris dans le scénar, qui ne joue pas au malin, qui ne s'écarte jamais du canevas classique), comme de peur de s'égarer : la pauvreté des moyens employés m'a frappé par exemple, ne serait-ce que parce que tout cela est finalement bien peu dansé, la chorégraphie s'incarnant plutôt dans la grâce des mouvements en prose (la sortie de scène avec le melon façon bowling, ce genre de choses), ou dans des séquences totalement détachées de leur contexte (Astaire qui fait un show solo dans la cour de l'hôtel).

Reste que cette épure est un jeu dangereux, et à force de faiblesses le film finit par s'atrophier. Dans sa dernière demi-heure, les numéros chantés/dansés (la répétition de l'interview, le numéro au salon philosophique) fleurent le remplissage mécanique, et les séquences entretenant un dialogue avec l'abstraction du film (le labo, les séances photos) commencent aussi à se faire rares... Le loufoque et la parodie deviennent alors une fin en soi un peu stérile, et peinent à dessiner à eux seuls un final digne de ce nom. Sur la corde raide entre le potentiel d'un grand film pur (un Rio Bravo de la comédie musicale) et l’anecdotique déclinaison de codes qu'on a refusé de remettre en question, Funny Face parvient finalement assez mal à imprimer sa marque - sinon comme témoin de 30 ans d'acquis.


Haut
 Profil  
 
MessagePosté: 08 Déc 2012, 13:41 
Hors ligne
Schtroumpf sodomite
Avatar de l’utilisateur

Inscription: 22 Mar 2006, 22:43
Messages: 24601
Localisation: Arkham Asylum
Et pas un mot sur Hepburn ?! Le mec...

_________________
N'écoutez pas Film Freak


Haut
 Profil  
 
MessagePosté: 08 Déc 2012, 13:43 
Hors ligne
Teacher

Inscription: 13 Mai 2010, 11:50
Messages: 11667
Bah non j'suis pédé.

Hepburn je saurais trop te dire, le pitch du film est quasi sur elle (beauté non conventionnelle, maligne > funny face). Ce qui est plutôt bien vu, c'est que son corps est utilisé comme moyen de transition : à la fois innocente et rayonnante (enfantine/cendrillon), et à la fois très "conceptuel" dans certaines scènes. Notamment dans celle au bar, où toute habillée en noire moulée, dans quelque chose qui évoque déjà d'avantage les années 60, elle a l'air d'une forme géométrique en mouvement : http://www.youtube.com/watch?v=r3oxqmKGM5g


Haut
 Profil  
 
MessagePosté: 08 Déc 2012, 14:32 
Hors ligne
Expert
Avatar de l’utilisateur

Inscription: 07 Oct 2005, 10:23
Messages: 8088
La version 4h du mat de la photo aurait du rester :)


Haut
 Profil  
 
MessagePosté: 08 Déc 2012, 14:34 
Hors ligne
Teacher

Inscription: 13 Mai 2010, 11:50
Messages: 11667
Pour toi mon Chow.

Image

Sale habitude de poster le truc dès que j'ai fini de l'écrire (genre on est pressés, qui sait, y a peut-être quelqu'un qui brûle de débattre de la fin du classicisme à 4h du mat !!), puis de l'éditer 50 fois pendant 1 heure ensuite pour que ce soit compréhensible.


Haut
 Profil  
 
MessagePosté: 08 Déc 2012, 22:25 
Hors ligne
Expert
Avatar de l’utilisateur

Inscription: 07 Oct 2005, 10:23
Messages: 8088
je trouve ça excellent faut faire ça pour toutes tes captures (comme si tu n'en faisais pas assez pour ce forum), tu pourras faire une expo après :)


Haut
 Profil  
 
MessagePosté: 10 Juil 2021, 16:12 
Hors ligne
Meilleur Foruméen
Avatar de l’utilisateur

Inscription: 25 Nov 2005, 00:46
Messages: 87091
Localisation: Fortress of Précarité
Excellente surprise d'entrée de jeu que ce Stanley Donen alors qu'Un jour à New York et Chantons sous la pluie ne m'avaient pas complètement convaincu dans la mise en scène de leurs numéros musicaux.

Ici, dès le début, avec le numéro "Think Pink", il y a l'infusion d'une imagerie pop voir pub qui apporte un vent de fraîcheur dans des séquences qui frôlent parfois la captation de représentation scénique. Située dans le monde des magazines de mode et de la photographie, le film s'adapte à son milieu pour ces scènes et parvient à éviter l'impression que l'on chante et que l'on danse exclusivement pour la caméra, même si on change encore trop rarement d'axes, ne voyant presque jamais le contre-champ.

La mise en scène dans le sens de mise en espace, pour ne pas dire chorégraphie, se voit déjà dans les scènes hors chansons, comme celle où l'équipe du magazine investit la librairie de l'héroïne. Donen laisse durer le plan et motive ses mouvements de caméra en suivant son personnage tout en laissant les silhouettes s'affairer à l'arrière-plan. C'est vivant, bouillonnant.

J'aime assez ce que l'intrigue propose sur la confrontation entre deux générations même si l'on sent encore le vieux monde qui s'agrippe et s'impose sur ce Paris intellectuel tourné en dérision et le personnage féminin "qui pense" mais que le récit veut prouver être naïve, plus à sa place à tomber amoureuse instantanément après un baiser non-consenti et gratuit et à épouser un mec qui a TRENTE ANS DE PLUS QU'ELLE.

C'est pourquoi j'accroche d'ailleurs beaucoup moins à la deuxième moitié (avec son méchant homme de paille et ses faux dilemmes et sa jalousie justifiée) qu'à la première, où la gouaille d'Astaire et surtout la caractérisation de Hepburn, dont je suis désormais amoureux, portent le film. Tant et si bien que même le numéro carte postale de Paris réussit à m'enjailler.

_________________
Image


Haut
 Profil  
 
Afficher les messages postés depuis:  Trier par  
Poster un nouveau sujet Répondre au sujet  [ 7 messages ] 

Heures au format UTC + 1 heure


Articles en relation
 Sujets   Auteur   Réponses   Vus   Dernier message 
Aucun nouveau message non-lu dans ce sujet. Ailleurs l'herbe est plus verte (Stanley Donen, 1960)

Mr Chow

0

1455

18 Juin 2014, 22:25

Mr Chow Voir le dernier message

Aucun nouveau message non-lu dans ce sujet. Voyage à deux / Two for the Road (Stanley Donen, 1967)

Le Pingouin

8

1988

17 Déc 2021, 10:21

elmergantry Voir le dernier message

Aucun nouveau message non-lu dans ce sujet. Un jour à New York (Stanley Donen & Gene Kelly - 1949)

[ Aller à la pageAller à la page: 1, 2, 3 ]

Blissfully

35

3901

23 Déc 2023, 20:08

FingersCrossed Voir le dernier message

Aucun nouveau message non-lu dans ce sujet. Chantons sous la pluie (Stanley Donen, Gene Kelly, 1952)

[ Aller à la pageAller à la page: 1, 2 ]

Baptiste

15

2583

15 Juil 2022, 22:15

Vieux-Gontrand Voir le dernier message

Aucun nouveau message non-lu dans ce sujet. Les Sentiers de la gloire (Stanley Kubrick, 1957)

[ Aller à la pageAller à la page: 1, 2, 3 ]

Film Freak

32

4110

24 Avr 2022, 19:41

Mr Degryse Voir le dernier message

Aucun nouveau message non-lu dans ce sujet. The Last Face (Sean Penn - 2016)

Rajdevaincre

3

1695

11 Juin 2017, 15:23

Karloff Voir le dernier message

Aucun nouveau message non-lu dans ce sujet. Volte-face (John Woo - 1997)

[ Aller à la pageAller à la page: 1, 2, 3 ]

Castorp

32

2645

27 Aoû 2024, 15:54

Cosmo Voir le dernier message

Aucun nouveau message non-lu dans ce sujet. Poker Face (Russell Crowe, 2022)

Film Freak

4

131

14 Oct 2024, 15:12

Film Freak Voir le dernier message

Aucun nouveau message non-lu dans ce sujet. Pile & Face (Peter Howitt - 1997)

Zad

12

1592

24 Mai 2006, 16:50

Mr Chow Voir le dernier message

Aucun nouveau message non-lu dans ce sujet. Pile ou face ( Robert Enrico, 1980)

Mr Degryse

0

573

01 Juin 2022, 11:19

Mr Degryse Voir le dernier message

 


Qui est en ligne

Utilisateurs parcourant ce forum: Aucun utilisateur enregistré et 0 invités


Vous ne pouvez pas poster de nouveaux sujets
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets
Vous ne pouvez pas éditer vos messages
Vous ne pouvez pas supprimer vos messages

Rechercher:
Aller à:  
Powered by phpBB® Forum Software © phpBB Group
Traduction par: phpBB-fr.com
phpBB SEO
Hébergement mutualisé : Avenue Du Web