aka La Crime était presque parfait
Tony Wendice, une ancienne gloire du tennis, s'est marié avec Margot pour sa richesse. Mais celle-ci le trompe depuis peu avec Mark Halliday, un jeune auteur de romans policiers. Craignant que sa femme le quitte et le laisse sans le sou, Tony embauche une vieille connaissance pour exécuter le meurtre parfait...C'était le dernier des Hitchcock les plus populaires que je n'avais pas vu et son seul film tourné en 3D donc j'étais très curieux du résultat. J'avais vu le remake complètement nul (malgré son idée intéressante de fusionner le tueur et l'amant) et n'en gardais aucun souvenir.
Même si je l'ai vu en 2D, l'exploitation que le metteur en scène fait du dispositif est visible, dans sa façon de placer des objets en amorce dans le cadre et dans les multiples travellings circulaires autour des personnages mais surtout lors du meurtre, dans cet incroyable moment où Grace Kelly, en train d'être étranglée, tend la main vers l'objectif, vers le spectateur, comme pour demander à l'aide...avant de saisir les ciseaux. C'était certes le moyen de surfer sur une mode mais il est tout de même étonnant d'avoir choisi de tourner en 3D l'adaptation d'une pièce de théâtre quasi-cantonnée à un seul décor et je soupçonne que Hitchcock ne l'a fait que pour
ce plan.
Il y a quelque chose de réflexif à filmer un meurtre et de montrer la victime implorer le spectateur. La 3D et sa "fenêtre plus lucide" ont aboli la barrière entre l'action du film et le public (cf. notamment les fameux plans avec objets en amorce qui nous placent déjà dans la position de voyeur) venu voir un thriller, donc venu voir quelqu'un mourir (avec ce titre original de roman de gare qui souligne le "service" mis à disposition, "composez M pour un meurtre", ça pourrait tout aussi bien être "allez voir un Hitchcock pour un meurtre"), et même si l'on n'était pas évidemment impuissant, ferait-on quelque chose après tout ce premier acte où notre protagoniste n'est pas la femme mais le mari donc le criminel, qui nous expose son plan parfaitement huilé tel...un metteur en scène.
Ce n'est bien sûr pas le premier manipulateur de la filmographie de Hitchcock mais aucun ne m'avait autant rappelé la fonction de réalisateur dans sa façon de recruter un "acteur" pour le "diriger" dans une "mise en scène" et le fait qu'un romancier vienne ensuite contester sa version en proposant de lui substituer une "réécriture" de l'histoire ne fait que rajouter à la dimension méta du film. D'ailleurs, quand on connaît la réputation de Hitchcock vis-à-vis de ses actrices victimisées, la main tendue de Grace Kelly qui traverse l'écran prend encore un autre sens, c'est celle d'une comédienne qui veut s'échapper de la machination de son réalisateur.
Le dernier tiers du film est un peu trop
Columbo pour moi dans sa résolution de l'enquête, même si faire tenir la clé de l'intrigue sur une clé littérale pérennise la conscience de soi du film, mais si le film manque de trouble (auquel il n'aspire pas, à vrai dire), il est plutôt ludique dans son deuxième niveau de lecture cinéphile.