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MessagePosté: 07 Jan 2017, 21:44 
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Fin du XIXème siècle, dans une petite ville de Hongrie. Jano Kelepi est un étudiant pauvre mais heureux : la tenancière d'une maison de tolérance et ses pensionnaires l'ont pris sous leur protection. Lorsque sa vieille mère arrive en ville pour lui rendre visite, celles-ci, pour dissimuler la réalité, transforment la maison de plaisir en honnête pension de famille.


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Deuxième film de Kàroly Makk que j'ai pu voir (grâce à un très riche DVD chez Malavida, dont j'ai repris le résumé) , deuxième chef-d'oeuvre qui confirme l'importance et la force du réalisateur. "Amour" était âpre et taillé à l'os, ceci est une comédie chorale, à la fois évidente et extrêmement difficile à classer. Il y a quelque chose qui relève de l'humour humaniste (au fond profondément pessimiste, un moralisme qu'un masochisme narquois atténue) de Jean Renoir (on n'est pas non plus très loin de "Des Jours et des Nuits dans la Forêt" de Satyajit Ray, mais il est lui-aussi influencé par Renoir), quelque chose qui s'inscrit à la fois dans la libération des moeurs des années 1970 (le film va assez loin dans la représentation du sexe, et dialogue avec des choses comme Blier ou le Splendid, mais déplacée dans le passé à cause du contexte hongrois, du coup le film résonne aussi avec la mode "rétro-politique" de l'époque), mais le film est traversé par des bouffées sombres de nihilisme et d'inquiétude qui le rattachent plus souterrainement à Salo de Pasolini ou à Ferreri (le beau personnage de Béla, la prostituée suicidaire, pressentant les conséquences de l'antisémitisme montant, jouée par Carla Romanelli, qui donne une scène très proche de The appartment de Wilder). Le film a dû fortement influencer l'Appolonide de Bonello ( qui ne l'a pas cité je crois). Makk était souvent présenté à Cannes dans les années 1970, et ce film a été distribué comme une comédie érotique en France, ce qui lui a valu un certain succès (l'humour de Makk n'est pas trop loin de celui de Milos Forman, mais avec une dimension plus bergmanienne, une distance existentielle fascinée et impossible à réduire sur la féminité) . Il s'agît d'un film à la fois populaire et moderniste, consensuel et subversif. Mais des moments de pure beauté cinématographique (la scène où les pensionnaires sortent dehors, la superbe lettre que l'une d'entre elle écrit à son fiancé pour rompre avec lui) excèdent ce typage sociologique, le film est extrêment pictural (Janos Toth excellent chef-opérateur; il y a l'air d'avoir eu tout une école hongroise car sa lumière et ses cadres sont proches de Vilmos Zsigmond), mais sans verser dans l'esthétisme. Il prend en compte une forme de grotesque. L'idée, qui a dû traverser Velasquez quand il peignait Philippe IV, puis les bouffons de la cour de celui-ci, ou bien Flaubert quand il explique que Monsieur Bovary, harassé de fatigue sur son cheval, mais se croyant néanmoins inattaquable, se rêve en fait à côté de celui-ci, galopant lui-même, que la beauté esthétique est immanquablement recouverte par une couche de discours, de pouvoir et de postures sociales, par rapport à laquelle elle ne peut être que momentanée, et ne vieillir qu'au prix du grotesque si on essaye (et l'on arrive) à l'en dégager, est finalement une joie qui, trop bien cernée, donne presque envie de mourir et peut se retourner en haine de soi (et condamne à parler malgré soi de la politique pour faire survivre la communication avec autrui en face de l'image) tellement il est impossible de s'identifier à elle et qu'elle est à la fois objective et proche de l'illusion, a visiblement aussi travaillé Makk.

Le livret du DVD contient un très intéressant texte extrait d'un livre sur le cinéma hongrois de Jean-Pierre Jeancolas, qui donne envie de voir tous les autres films du réalisateur (notamment Jeux de Chat et un Autre Regard)


Dernière édition par supergontrand le 08 Jan 2017, 00:47, édité 5 fois.

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MessagePosté: 07 Jan 2017, 22:12 
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Je connais pas du tout. Je vais tenter, tiens.

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MessagePosté: 07 Jan 2017, 22:19 
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MessagePosté: 07 Jan 2017, 22:22 
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Film Freak a écrit:
LE MEC A JUSTE LU LE TITRE EN FAIT


Un nuit très morale contrairement aux films de Steven Spielberg ?

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MessagePosté: 07 Jan 2017, 22:24 
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Regardez-le bordel (et regardez le bordel aussi lol). Il y a même un clône de Sophie Marceau en mieux. Et l'acteur (Györgi Cserhalmi) ressemble à Owen Wilson mais joue comme De Niro. C'est d'ailleurs ample comme 1900 mais en trois fois plus court (Makk n'essayait pas de se demander qui choisir entre Lénine, Mao ou sa maman pour relier les plans ).
"Amour" est très bon aussi, mais n'a presque rien à voir (enfin si,
le personnage de la mère est quasi le même et il y a une mise en abyme "autocontenue" du film dans une lettre
).


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MessagePosté: 30 Déc 2019, 17:05 
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Verdict Tetsuo ?

(le cinéma d'Europe central et des Balkans des années 60, c'est quand même prodigieux ce qu'il reste à découvrir - quand bien même la plupart serait des films modernistes chiants, sublimes sur les captures d'écran mais imbitables dans les faits).


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MessagePosté: 30 Déc 2019, 18:17 
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Ah j'avais totalement oublié...

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MessagePosté: 15 Aoû 2020, 11:48 
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J'ai trouvé cela passablement mauvais, moins que l'improbable Jeux de Chat que je n'ai pas eu la force de finir (et dont je me demande comment il a pu être dans la shortlist pour l'Oscar du meilleur film étranger), mais loin du chef d’œuvre vendu par Gontrand. Pourtant le film commence plutôt bien, qui se concentre sur le petit monde qui habite cette maison close, la photo est effectivement soignée, la réalisation riche sans être trop ostentatoire. Je ne connais pas l’œuvre de Sándor Hunyady dont est tiré le film mais ces 30 premières minutes m'ont beaucoup fait penser à La Fosse aux filles, impression renforcée par l'irruption de l'étudiant que toutes les prostituées semblent particulièrement apprécier. Malheureusement la suite prise par le film est bien différente de celle du roman de Kouprine et n'a guère d'intérêt, si ce n'est de nous asséner une lourde morale sur la décrépitude d'un monde qui tente vainement de pervertir sa jeunesse. Les scènes s'allongent alors inutilement (le quiproquo suscité par l'arrivée de la mère de l'étudiant et la partie de carte dans la taverne voisine sont toutes deux chiantissimes et interminables), ponctuées d'interlude "nihiliste" de la finesse d'un éléphant (la tentative de suicide avortée de la prostituée italienne - actrice qui joue le désespoir amoureux d'une manière totalement outrée, à faire pâlir les pires actrices du cinéma muet - et celle réussie du perdant de la partie de cartes). On est alors très loin de la sensibilité d'un Renoir ou d'un Ophüls, qui dans le second segment du Plaisir (La Maison Tellier), sous son apparente légèreté, décrivait lui avec bien plus de justesse le sombre monde des maisons closes.

bmntmp a écrit:
le cinéma d'Europe central et des Balkans des années 60, c'est quand même prodigieux ce qu'il reste à découvrir - quand bien même la plupart serait des films modernistes chiants, sublimes sur les captures d'écran mais imbitables dans les faits.

J'espère encore y faire de belles découvertes mais j'ai aussi l'impression qu'il y a une révision exagérément positive de ce cinéma. Depuis le début du confirment (et encore maintenant, ce qui m'a permis de découvrir ces deux films de Makk) l'institut hongrois de Paris met en ligne une fois par semaine un classique hongrois. Je ne les ai heureusement pas tous vu, mais à se jour je ne me souviens pas en avoir vu un seul qui valait vraiment la peine. Pour en revenir à Makk, après ces deux déconvenues, je redoute maintenant la vision de son chef-d’œuvre (Amours)...


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MessagePosté: 15 Aoû 2020, 12:27 
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J'ai peut-être surjoué l'enthousiasme, mais le but était de faire découvrir le film, qui reste très intéressant. Evidémment c'est en dessous de Renoir ou d'Ophuls, mais à ce moment-là autant arrêter de voir des films.
"Amours" m'avait fait forte impression, et est beaucoup plus personnel formellement . L'académisme de de ce film-ci est sans doute lié à une forme de censure, cela s'inscrit dans une forme de réaction au cours des années 70 (mais aussi un cinéma exporté à l'occident avec István Szabó qui faisait des films assez similaires). Makk est plus retors que Szabó, l'histoire du film symbolise de façon transparente sa propre condition de production et la situation du conéaste dans le régime: il y a l'idée que le juste degré de liberté d'une collectivité n'est celle d'aucun de ses membres, et se confond avec l'ordre. Derrière l'académisme il y a une situation forte : le bordel devient alors une métaphore de l'état et de la bureaucratie, mais neutralisés, car le couple central se comporte de manière irréelement édénique, complètement détaché des évènements : d'une part il n'y a de pouvoir que sur le fond d'un malheur préexistant, d'autre part, si ce bonheur est réellement éprouvé par le peuple, alors l'oppression politique n'a pas réellement besoin d'un objet pour se justifier et se maintenir (mais le film présente justement cette absence d'objet comme une farce et une fiction).

"Un autre regard" est téléfilmesque dans la forme, mais l'histoire et les actrices sont superbes, et le sujet extrêmement courageux.

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Mais peut-être la nécessité accrue de faire confiance incite-t-elle à la mériter davantage

Erving Goffman


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