Forum de FilmDeCulte

Dans cette scène, sa collègue fait une remarque précise sur la cuisine du chef (me souviens plus laquelle). Lui sort une phrase bateau qui vaut pour n’importe quel breuvage chaud (ce que relève le chef, si la seule qualité qu’il trouve à sa soupe c’est de réchauffer il peut tout autant boire un thé). Ça me semble parfaitement définir Takahashi, qui ne cesse de répéter les paroles/gestes des autres, mais dont les imprécisions mettent à jour le manque de conviction profonde.

C'est un personnage sans personnalité (= un acteur), il est flottant, totalement naïf, mais je ne vois aucune malice chez lui.

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CroqAnimement votre

Oui, d'ailleurs il défend la prise de position de sa collègue lors de la scène du zoom (que j'aime pas trop d'ailleurs)

Oui pareil, je trouve pas que le perso soit malicieux, il est paumé, il se cherche, ne le fait pas de la manière la plus intelligente possible mais c'est pas un méchant. Et justement, il me semble que le projet du film, comme le dit son titre, c'est qu'il n'y a pas fondamentalement de "méchants", mais des agencements de situation délétères. Une nouvelle version du "Tout le monde a ses raisons" de La Règle du jeu de Renoir.

Et d'accord avec Karloff, la scène de fin est ratée, tant dans la conception que dans l'exécution. Franchement dommage.

Comment t'as deviné. "Drive my car" ou "Contes du hasard", que j'ai aussi adoré.

En revoyant des scènes de "Evil", je remarquais qu'il filmait beaucoup la vapeur, la fumée, parfois au détriment des acteurs, dissimulés ou laissés bord-cadre : vapeur des pâtes, du tas de fumier, fumée des clopes (autre point commun entre Takumi et Takahashi), fumée de la cheminée, etc. Et toute la scène finale, comme par extension, filmée dans une brume de plus en plus épaisse.
Je me demandais comment ça pouvait se lier au reste, et je lis (sur le twitter de Richard Brody) qu'Hamaguchi travaillait sur l'idée de déchets, à partir d'une pièce de Fassbinder: "Hamaguchi was working on the question of waste, basing it on a play by Fassbinder, "Garbage, the City, and Death".". Toi qui aimes Fassbinder, tu as déjà entendu parler de cette pièce? Apparemment attaquée pour antisémitisme - j'avais jamais entendu parler de cette affaire. Les résumés de la pièce ne sont pas très clairs.

En tout cas, la notion de déchets oriente différemment la lecture du film. La vapeur, la fumée ne connotent pas le mystère, le fantastique, mais plus concrètement, ce qui se consomme, ce qui se jette, ce qui se décompose. On aime bien parler "douceur", "contemplation", pour parler du film. Mais c'est vrai qu'en y repensant, c'est quand même un film qui cadre un tas de fumier, une bête crevée en train de pourrir, et passe un bon quart d'heure à parler de fosse septique...

Il n'a pas d'intention mauvaise sans doute, mais c'est le problème il me semble: il fait ce que son boss lui dit de faire, sans réfléchir, il ne pense pas.

Jamais entendu parler de cette pièce, mais je connais encore assez mal Fassbinder. Moi qui attendais ton retour suite à mes explications détaillés de Fort Apache

Désolé: le boulot, la vie. Je manque de temps et il faudrait que je revoie "Fort Apache". Dans mon souvenir, Fonda est un salopard pas trop complexe, plein de ressentiment vis-à-vis de sa hiérarchie qui l'envoie dans un trou paumé, ce qui me semblait le principe expliquant ses actions, beaucoup plus que son deuil ou son amour pour sa fille. Mais pour le reste, pas d'accord: son opposition avec Wayne n'est pas liée au fait qu'ils représenteraient deux époques. C'est plutôt le conflit entre deux éthiques militaires. Et si je me souviens, c'est Fonda qui trahit la parole donnée (à Cochise), qui se montre déloyal, agit par ambition, selon ses intérêts, qui veut se faire obéir sans discussion, quoi qu'il ordonne... Le sacrifié dans le film, c'est pas lui, c'est plutôt les soldats obligés de lui obéir - comme ceux qui défilent au plan final dans le reflet d'une fenêtre, comme des fantômes qui vont vers de futurs massacres, en chantant.
Mais il ne s'oppose pas, en plus, au mariage qu'elle souhaite?

Lol Le Conflit des Interprétationzzz zzzz zzzzzzz zzzz

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Mais peut-être la nécessité accrue de faire confiance incite-t-elle à la mériter davantage

Erving Goffman

A moi de concéder qu'il faudrait également que je le revois, parce que sur certains points que tu relèves je ne m'en souviens pas assez précisément pour pouvoir te répondre avec justesse. Même si je maintiens que le personnage de Fonda est beaucoup plus complexe que le portrait que tu en dresses. On poursuivra la discussion dans un topic adéquat

Revenons au film, oui.

Vous avez déjà goûté à du wasabi sauvage vous ?

Pour moi la lecture de Bégaudeau du personnage de la fillette comme seule rupture radicale ne tient pas vraiment la route. Elle déambule certes dans la nature, mais est plutôt dans la continuité de son père curieuse et en recherche de connaissances (qui sont encore partielles comme l'explicite le premier dialogue dans la forêt avec son père) ; il n'y a qu'à voir comment elle se promène dehors confortablement, bien emmitouflée dans son gros anorak, avec son bonnet épais sur les oreilles et ses petits gants. Elle ne représente pas plus la symbiose avec la nature en confrontation avec le projet de glamping que son père.

On se retrouve avec un film plus renoirien (pas loin de Ford donc, effectivement) que bressonien (dans "Le Diable, probablement", Bresson se plaçait clairement du côté des jeunes écolos révoltés représentés ici par le blondinet qui n'intéresse pas du tout Hamaguchi), dans lequel "chacun a ses raisons", sa bonne et sa mauvaise foi. Chercher les symboles c'est amusant, mais à un moment ça devient un peu que ça, ce qui me semble dommage. Parmi les trucs que j'ai pas encore lus ou entendus, sur la mauvaise foi des habitants face au projet de glamping : les résidents qui fument dans la forêt alors que la population s'inquiète des risques d'incendie liés au projet, les masses de fumier qui polluent dans l'exploitation agricole traversée par la fillette alors que le projet de glamping inquiète pour son côté polluant, le type qui aide tout le monde dans le village mais qui est pas capable de s'occuper de sa propre fille, et qui demande pas avant de fumer dans la voiture avec les deux membres de la com du projet alors que l'homme a la courtoisie et l'écoute de demander à sa collègue s'il peut fumer dans la voiture un peu plus tôt même si elle le trouve un peu "violent" pour faire un bon mari... Le résultat est bien sûr un jeu à somme nulle, finalement bien dans l'air du temps, comme l'était la résilience de la dernière partie de "Drive My Car".

Je comprends pas pq la critique des Cahiers dit que la fin évite le twist au contraire du dernier Kore-eda par exemple, comment appeler autrement ce final qui n'a d'autre but que de susciter la sidération et le jeu des interprétations certes ouvertes ?