Forum de FilmDeCulte

Le titre ne fait pas mystère de la référence highsmithienne que se choisit le film (via le film de Claude Miller avec Depardieu). Ça marche plutôt pas mal pendant une heure grâce à des acteurs aux petits oignons. Vanessa Paradis qui joue l’anorexique sur le retour, un peu boho, Omar Sy, l’armoire à glace avec un problème de communication, José Garcia, droit sorti du Couperet, parfait en salary man un peu mielleux, au sourire tordu. Et surtout, surtout messieurs dames, Elodie Bouchez, jouant un personnage tout aussi stupide qu’elle en a l’air, épatante en vraie ingénue, animée par une force inflexible.
Bon au bout d’une heure, on constate que la sensibilité du scénario n’est pas vraiment celle de Highsmith, c’est plus étriqué, moins pervers, moins menacé par une folie insondable et finalement ça correspond à l’espèce de finesse un peu mesquine d’Anne Le Ny que j’avais pu constatée dans Les Invités de mon père. On bascule donc plus du côté de Fatal Attraction inversé que du Cri du Hibou (que Highsmith, je vois, considérait comme l'un de ses romans les moins réussis et dont j'aime beaucoup l'adaptation de Jamie Thraves), plus du côté de Elle Magazine que d'affres pascaliennes. Ça ne veut pas dire que ça ne peut pas être intéressant, notamment par rapport à l'espèce de satire en creux des rapports humains qui y est secrétée (jusque dans les scènes d'entreprise), mais au détriment de l'aspect dérangeant auquel on était en droit de s'attendre en se basant sur la référence highsmithienne. Le méchant ne sera à peine plus qu'un méchant, la victime à peine plus qu'une victime : ça cadre avec l'esprit du temps comme la relation Glenn Close/Michael Douglas cadrait avec le sien. Je trouve ça infiniment mieux que du Sébastien Marnier cherchant une vibe similaire cela dit.

une femme mariée, 2 enfants, se laisse séduire par un collègue du siège parisien - de passage dans sa ville, suite à des soupçons d'infidelité envers son mari.

anne le ny x omar sy x elodie bouchez x josé garcia x vanessa paradis x snd x france télévision x canal x disney

le film moyen de l'industrie cinématographique française dans toute sa splendeur.

ça sent les rencontres dans des bars de palace, des négociations dans des bureaux avec des moquettes hors de prix, on entend d'ici les gens faisant semblant de trouver ça hyper intérssant alors que c'est hyper moyen. puis il y a l'accueil presse absurdement bienveillant (on ne va quand même pas se fâcher avec tous ces gens), les 500k en salles (juste assez pour ne pas être un gros bide déshonorant, juste parfait pour être pur film moyen de flux), ça sera diffusé par france 2 un jour et ca fera 2 millions (le même chiffre que les centaines de téléfilms / mini-séries clonesques qu'ils diffusent les uns après les autres), puis le dvd sera à 99c chez noz, et plus personne ne pensera jamais à ce film jusqu'à ce qu'il soit cité quand anne le ny mourra - et même les gens qu'ils l'ont vu ne se souviendront plus bien de l'intrigue.

alors ça n'est pas nul, hein. c'est moyen. le concept d'un liaison fatale gender-reversed, en mode franco franchouille en bretagne, c'est plutôt sympa. et c'est raconté une étape après l'autre, pour chaque idée sympa y en a une nulle qui arrive juste derrière.

il y a elodie bouchez qui est vraiment une reine : touchante, tout le temps juste, avec un personnage que j'ai trouvé écrit de manière intéressante et dont elle exploite tout le potentiel. elle est absolument formidable et rend le film plaisant à regarder - et sa tâche n'était pas aisée parce qu'elle doit régulièrement se débattre avec des dialogues catastrophiques, des mises en scènes horribles, des plans dégueulasses et un partenaire de jeu nullissime.
nullissime, peut-être pas, mais omar sy est quand même joyeusement ridicule. elle y est allée particulièrement fort avec ses dialogues et le malheureux ne s'en sort pas. c'est tout à son honneur de ne pas vouloir se typecaster mais je n'ai pas bien compris pourquoi il avait choisi ce film et en quoi ça rentrait dans son contrat avec son public (et effectivement la salle c'était 100% boomer + moi) et vraiment c'est pas son univers, son style de jeu, tout, le résultat est cata.
mais la vraie raison pour laquelle j'y suis allé c'est vanessa paradis. la déchéance complète de sa carrière cinéma restera pour moi un mystère absolu. pas une injustice : elle en est la seule responsable et c'est manifestement volontaire. mais un mystère : pourquoi une fille qui est une star complète, avec des débuts aussi iconiques, a t'elle volontairement tout sabordé pour se retrouver dans cette usine de films médiocres ? et donc ça continue, elle est à peine 15 minutes à l'écran, un rôle sans intéret dans lequel elle n'a rien à jouer, incompréhensible à part son amitié avec anne le ny avec laquelle elle avait déjà fait un très mauvais film. douloureux.

sinon, cette histoire qui aurait pu être pas mal est donc traitée comme le film moyen qui n'existe que grâce aux obligations d'investissement : c'est-à-dire une absence totale de quoi que ce soit pouvant ressembler à une ambition cinématographique. ce niveau de pépère fait définitivement ressembler le film à un téléfilm - alors que l'enjeu fondamental aurait évidemment été de s'en éloigner. mais non, c'est avec ce casting de a list, avec un budget de 7 millions, au cinéma. ça aurait pu aussi être un roman de piètre qualité dont personne n'aurait jamais entendu parler. ça aurait pu etre une pièce aussi, pourquoi pas - mais ça rapporte pas beaucoup et c'est chiant.

enfin, au final, c'est ça. tout le monde a bien croqué, et tout le monde s'en fout.

dont acte.

Comprends pas la remarque sur Sy (qui est très bien) et son typecast, où le "qu'est-ce qu'il est allé foutre dans cette galère", qui est de ton propre aveu un film correct.
A un moment, faut arrêter d'aller voir les films bourrés de préjugés...

je ne comprends pas ce que tu comprends pas. il cartonne dans lupin et de l'autre côté du préiph, c'est là dedans que son public l'aime bien.
mais il n'a manifestement pas envie de se typecaster uniquement dans ce genre de trucs, du coup à côté il va faire un peu autre chose, et des fois ça marche (tirailleurs) et des fois pas du tout (yao, ça...).
et comme pas pas mal de stars, il a du charisme et une présence et une personnalité et il brille quand il peut exprimer tout ça librement, mais quand il s'agit de faire l'acteur pur et dur ça coince un peu plus, ce qui est - je trouve - gravement le cas ici. la différence de niveau entre lui et bouchez c'est juste terrible dans les scènes de dialogues.

Mais du coup quand il joue un immigré sénégalais, avec un accent bidon, il est typecast? Il veut faire un film français, pas parce qu'il est nul en anglais comme Dujardin, mais parce que ça l'intéresse ?
Bouchez est géniale dans le film car elle a l'air naturellement stupide et le film en joue merveilleusement bien. Sy est un faire-valoir tout autant que Garcia, on les voit pas tellement à l'écran et on peut juste regretter qu'à partir du moment où il apparaît, le film est trop gentil avec ses personnages, hormis Garcia. C'est la différence avec Chabrol, qui faisait du FELA, mais en épousant un peu le point de vue du pervers. Ici le film est moyen, car tout est lissé, jusqu'au rôle de victime consentante de Bouchez. Donc je suis d'accord pour dire que le film est moyen et qu'il s'arrête au milieu, mais j'ai vu bien pire et ouais, je trouve malvenu ces remarques sur Sy.