les 20 premières minutes sont incroyables. c'est exactement la même chose que moulin rouge ! (baz lurhmann - 2001). on rentre dans la salle, la soirée bat son plein, les danseuses font un numéro endiablé devant un public hystérique et conquis. toulouse-lautrec est dans la salle, dans son environnement, et le patron zigler supervise tout ça. puis tout s'interrompt pour un numéro down tempo envoutant d'une femme sublime qui semble descendre du ciel. puis on enchaine sur un grand numéro spectaculaire pendant que les éléments narratifs de la suite se mettent en place. l'inspiration semble donc totalement incontournable, bien que cette version n'ait rien à se reprocher : la reconstitution est splendide, on a tellement envie d'en être, il y a des plans splendides, des moments de grâce, c'est vraiment un bang pour commencer le film. et donc baz a bien aimé et s'est dit qu'il allait faire sa propre version de ça, avec son propre style, et ça nourrit encore le smash total de ce qu'il a fait.
difficile, du coup, de ne pas être un peu désarçonné / déçu de la suite, qui lâche totalement le moulin rouge pour juste raconter un morceau de vie et des amours de toulouse lautrec. (et est-ce que ce ne serait pas là l'idée fondamentale de baz ? imaginer la suite du film qui tiendrait les promesses de ses 20 premières minutes ?).
les aspects les plus spectaculaires du film sont toujours valables : c'est une splendeur visuelle, la direction artistique est splendide (en plein dans les clichés parisiens mais enfin ils font rêver le monde entier depuis des décennies pour une bonne raison), les costumes tous les décors... et ça devient une splendeur visuelle, huston avait fait tout un processus pour modifier les couleurs du technicolor pour que ça ressemble à un tableau de toulouse lautrec et c'est fort réussi, les couleurs sont splendides, il y a une galerie de plans merveilleux, c'est vraiment du porn visuel. c'est donc idéal vu le sujet, d'autant qu'il arrive bien à rendre justice aux tableaux, à leur création, à ce qu'ils évoquaient à l'époque, à la vie en eux. il y a une bonne demi douzaine de scènes authentiquement magiques, dont la dernière minute qui est tout simplement splendide et mérite à elle-seule de voir le film.
et puis il y a les caractéristiques de l'époque, qui peuvent être des qualités ou des défauts : tout ça est quand même très caricatural, préfère la légende à la réalité, le stéréotype à la subtilité... donc on est dans un biopic très imaginaire, on cherche plus l'impact et la spectaculaire qu'à la véracité et la complexité des âmes. donc on est dans une caricature d'artiste maudit, ses amours sont spectaculaires, la prostituée problématique dont il est amoureux n'est pas un être humain mais une caricature de chaque instant. alors tout ça est fondamentalement assez vulgaire, et si cette approche narrative est plus intéressante que les biopics modernes on a l'impression que c'est vraiment la culture racontée aux très grand public américains. c'est aussi trop long et ça patine dans sa deuxième heure. mais d'un autre côté, c'est vieux de 70 ans, visuellement le pittoresque et le charme de l'époque jouent à fond donc c'est aussi facile de passer outre et de juste apprécier cette histoire over the top d'un artiste maudit dans une histoire d'amour maudite dans une époque et un lieu extraordinaires.
époque, lieu, et protagonistes extraordinaires, mais on en est réduits à régarder des films américains pour se plonger dedans (il y a bien eu un biopic de toulouse lautrec par roger planchon en 98, totalement disparu, mais bon...) (techniquement ce film là est anglais, mais bon). ça reste complètement tragique, et je crois que ça l'était déjà à l'époque, notre incapacité à nous saisir de tout ça, l'incarner, le raconter, le porter, le
vendre. les américains nous aiment plus que nous nous aimons nous-mêmes, c'est quand même pathétique.