J'en parle, parce que c'est la première fois que je pleure devant un film depuis au moins deux ans.
*Tadam*
A l'instar de Shara, un film en apesanteur, où la gravité est toujours filmé avec une grâce et une légereté sans pareils, où Kawase aborde des thèmes sombres et universels (l'oubli, le deuil, l'inexorabilité du temps, et bien d'autres) avec une sorte d'insouciance légère, de distanciation, comme si, après tout, puisque tout est passager, rien ne sert d'en faire des tonnes...
Donc Suzaku est un film tout bête : 5 membres d'une famille, une maison, un arrêt de bus, un pont, voilà tout. 5 lignes de dialogue dans le film. Et du coup je craignais un peu un second Eureka (que j'avais peu apprécié), avec ce que cela inclus (selon moi) de lourdeur, d'ennui, de personnages figés. Et en fait non. Rien ne semble forcé, et même les symboles les plus évidents (le tunnel) deviennent des moments magiques.
Le tunnel
Suzaku ne construit aucune histoire, et le seul réel évènement qui survient est survolé, effleuré, ce qui participe d'autant plus de l'aspect mystérieux et onirique du film, de son jeu sur les apparitions et disparitions, sur la présence fantomatique des gens.
Etre(s) de passage
Les lieux rythment le film : le pont, le toit d'où l'on observe les montagnes, l'arrêt de bus, créant autant d'images qui s'ancrent dans la mémoire du spectateur et créent, petit à petit, la nostalgie qui va bercer toute la sublime dernière demie-heure du film. Kawase travaille aussi en motifs visuels qui se font écho : l'entrée dans le tunnel, les trajets en scooter, toujours filmés de la même manière.
L'arrêt de bus
En travaillant son film en cycle, la réalisatrice nous montre finalement le déroulement indifférent du temps, son irréversibilité, sans pathos, sans en faire une thèse non plus. La nostalgie n'est d'ailleurs pas triste dans ce film, au contraire, elle dit juste : "au moins nous avons été heureux ensemble, et, encore mieux, nous en avons une trace (filmée)".
La nostalgie
Des parents qui regardent leurs enfants jouer hors champ, une caméra qui hésite entre filmer la nature ou les personnages, un balancement continuel entre le filmé et l'absent, la fiction et le documentaire, tout est dans un entre-deux, un passage, car tout est de passage, tout transite, disparaît, mais c'est pas grave.
6/6, merci Naomi, go on!
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