jill - qui est une version à peine fictionnelle de brigitte bardot, nous ne sommes pas dupes - est très malheureuse : elle est la femme la plus célebre de sa génération, adulée et détestée, scrutée, prisonnière de la liberté qu'elle incarne et à laquelle elle aspire. je l'avais vu il y a quelques années, totalement à l'aveugle dans ma rétrospective maison louis malle, que je stanne. ça ne m'avait pas parlé du tout, et je m'étais terriblement ennuyé.
c'est ressorti hier, en version restaurée. rappeneau (co scénariste) était présent au champo pour raconter un peu tout ça. il a commencé par expliquer pourquoi le film n'était quasiment pas exploité depuis des décennies. il avait été financé par mgm, qui avait coupé 10 minutes pour la sortie us. puis revendu dans un lot à warner, qui n'en avait rien à foutre d'un film français pas très connu de 1962 et le laissait donc pourrir. et rappeneau, au nom de son droit d'auteur, refusait depuis presque 40 ans toutes les demandes d'exploitations du film, pour contraindre warner à le revendre à des français qui en feraient quelque chose de bien. il a fini par gagner l'année dernière quand gaumont l'a racheté, et l'a restauré, et le ressort. et il a raconté comment le film est né.
ils avaient rendez-vous chez un producteur avec malle pour parler d'une adaptation d'une pièce de théatre et quand ils arrivent... brigitte bardot, alors la plus grande star du pays, est là, pas annoncée. ils finissent par rester 4 heures, pendant lesquelles bardot parle pendant 3H50 pour raconter à quel point sa vie de star est horrible, à quel point elle n'en peut plus, qu'elle ne supporte plus tout ça, qu'elle ne l'a jamais voulu comme ça, que ses relations avec les hommes la nourrissent et la détruisent... et elle regarde malle et lui dit "vous devez m'aider, mr malle ! vous devez me sauver !" et louis en mode WTF on s'est rencontrés y a 2 heures. toujours est il que l'idée nait de faire une fiction documentaire sur sa vie de star, ils se revoient plusieurs fois, elle raconte toute sa vie, et 90% du film ce sont des choses qu'elle leur a raconté, et le reste c'est des souvenirs persos de malle et rappeneau.
le film vu comme ça m'a beaucoup plus intéressé. c'est une plongée dans la vie surréaliste de la star, avec l'impression que cette époque a inventé cette notion de mega stardom, sous cette forme là, et qu'on y est encore, qu'on pourrait sûrement faire le même film sur toutes les stars ravagées par leur stardom. sauf que là c'est fait en direct, avec une des stars les plus iconiques du monde, par un grand réalisateur. et le fait est qu'elle était quand même extraordinaire. j'ai revu le samourai la semaine dernière, et elle a ça en commun avec delon que chaque plan où elle apparait est de fait fascinant, on ne voit qu'elle, la star de cinéma dans toute sa splendeur. et sa grande caractéristique dans la vie c'est qu'elle jouait comme une patate (phrase marrante dans le film, sur son premier tournage, le réalisateur lui dit "essayez tout de même de parler moins faux qu'aux repetitions...") et là elle est juste, on voit son charisme naturel. et le film est magnifiquement réalisé, des plans splendides, tout le temps. il y a aussi le charme rétro, voir brigitte bardot en tenue légère préparer le petit déjeuner à mastroiani (que je n'aime pas mais qui est quand même iconique aussi) après une nuit d'amour, dans un appartement des années 60, avec l'image de l'époque, c'est quand même absolument magique.
mais....
les états d'âme des stars j'en ai un peu rien à battre. et c'est très bien réalisé, stimulant mais aussi un peu exagérément arty dans certains trucs, comme s'il avait besoin de surcompenser le fait que c'est un film de quasi commande sur un sujet pas ultra chic, en en faisant des caisses en mode "mais attention on fait de l'art !!" (je ne l'ai pas vu mais ce que j'avais perçu que
blonde était potentiellement un peu comme ça). et puis rappeneau a raconté qu'il écrivait le film seul à paris en même temps qu'ils tournaient en suisse ou en italie, sauf les scènes en appartement entre bardot et mastroiani - que malle lui avait dit "pas besoin d'écrire ça, je ferai des images". et le fait est que les images sont belles mais que ça fait 20 minutes de pas grand chose, une illustration visuelle très bateau des sentiments qu'il veut décrire (genre quand elle s'ennuie elle est allongée par terre et joue avec les motifs de la moquette, bon...).
alors c'est parait-il le film préféré de bardot de sa filmo avec
et dieu créa la femme..., et considéré comme un de ses 5 à voir pour mesurer l'icone que c'était. et c'est plein de charme. et c'est réalisé par louis malle. mais c'est aussi pas extraordinaire. donc à voir comme curiosité, petit documentaire sur l'époque, ou dans une petite rétro bardot.
le dernier plan est juste sublime.