Forum de FilmDeCulte

on vit l’âge d’or des cinémas de reprise du quartier latin, avec cette succession incroyable de restauration 4K de grands films, l’occasion parfaite de voir des gros morceaux manquants.

et au revoir les enfants ça se pose là. 3,5m d’entrées, lion d’or, 7 césars, incontournable des séances de cinéma scolaires pour une génération, et « grand film officiel » de louis malle.

et louis malle, je l’adore. son eclectisme incroyable. eclectisme qui n’est pas issu d’un fetichisme des genres, d’un instinct prédateur sur toutes les formes de cinéma, mais d’un intérêt profond pour toutes les facettes de l’aventure humaine. et dans cette aventure humaine, sa passion pour les zones d’ombre, les complexités, son refus d’un schéma social ou moral établi. il a commencé par un documentaire sur un explorateur et c’est ce qu’il a continué à faire toute sa vie : explorer les aventures des êtres humains, partout sur la planète, dans les circonstances parfois les plus triviales, parfois les plus complexes. et son absence d’égo d’auteur, sa capacité à s’effacer totalement quand nécessaire pour porter l’histoire qu’il raconte.

au revoir les enfants donc, contient toutes ces immenses qualités. il s’efface totalement, son style est si subtil qu’il en est presque invisible, il filme pour capturer et montrer la vie de ces enfants. ça pourrait être une chronique, et ca l’est, sauf qu’on sait très bien qu’on assiste à des moments essentiels de la vie de ces petits garçons, de notre pays et de notre civilisation. pour ce faire, comme à son habitude, il ne trace pas une marque dans le sol pour classer d’un côté le camp du bien et de l’autre le camp du mal. on est à l’époque du mal absolu, mais on voit les salauds se comporter de manière correct (quand les nazis ramènent les petits à bon port, quand l’officier intervient au restaurant…). Il poursuit le travail de lacombe lucien à montrer les salauds absolus, les collabos, être des gens médiocres, issus d’un parcours médiocre, quasiment compréhensibles, plutôt qu’être l’incarnation du mal. et le bien absolu, le prêtre, à qui il rend un hommage profondément émouvant tout en le montrant commettre une injustice terrible et aux conséquences terribles. (difficile de voir si le léger malaise dans ses entretiens avec l’enfant dans son bureau est issu de notre regard actuel ou s’il était volontaire à l’époque. connaissant louis c’était volontaire). et entre les deux, l’immense océan de gens normaux, ni héros ni salauds, qui font des erreurs, qui se comportent parfois salement et parfois glorieusement.
le portrait de lui, enfant, m’a ému. évidemment, la fin est un smash complet, une démarche humaine et artistique bouleversante. mais il n’était pas vraiment ami avec le petit juif dans la vie. le film est un fantasme, comme pour corriger cette erreur de jeunesse de ne pas l’avoir connu et peut-être plus protégé. et il ne cherche pas à se donner le beau rôle. il assumait en promo qu’ils n’étaient pas amis. Il ne se transforme pas en héros de la défense des persécutés à l’âge de 8 ans. il se pointe même comme partiellement responsable… il se montre participer au bullying enfantin. (belfast et the fabelmans m’ont tellement marqué dans la manière de se représenter soi-même enfant comme quelqu’un d’extraordinaire que je suis désormais sensible à cet aspect, et mon adoration pour louis et sa modestie s’est incarnée dans ce point).

et l’aspect « film scolaire » m’a aussi passionné, cette représentation de la France à ce moment-là, les dynamiques sociales (c’était donc un grand bourgeois et son regard et son respect pour le « petit personnel » n’est pas un cosplay humaniste, ni un cosplay de gauche, c’est une vraie compréhension des réalités humaines). l’importance de l’éducation catholique sur des générations de français. cet hommage aux curés humanistes, (et de gauche), dont on n’entend plus parler. ces invraisemblables jeux d’échasse dans la cour de recré. c’est vraiment une reconstitution intéressante et émouvante de cette époque.

et puis, évidemment, il y a le fondement humain de redonner vie à ce petit garçon, à rendre palpable et insupportable l’injustice existentielle que représentaient chacune de ces vies perdues. ce n’est pas niaiseux, ce n’est pas tire larmes, ça ne te dit pas que tu es un nazi si tu ne pleures pas. il se souvient de ce petit gars, il s’en veut de pas avoir pu faire plus de choses pour l’aider, son cœur se brise de penser à cette vie fauchée, il a envie de comprendre comment ça a été possible, et il utilise sa caméra 40 ans plus tard pour se souvenir, redonner vie, corriger et comprendre – un peu – ce qui peut très vaguement l’être.

un immense film, d’un immense cinéaste qui était aussi, je crois, un immense être humain – ce qui n’était pas ce qu’on lui demandait mais ce qui ne gâche rien.

Très beau film. je souscris totalement à tes propos.

6/6 évident et un de mes films de chevet, découvert enfant et il ne m’a plus lâché depuis…
Pur chef-d’œuvre.

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Ed Wood:"What do you know? Haven't you heard of suspension of disbelief?"

What the Fuck.

Dis-moi que tu as 20 ans sans me dire que tu as 20 ans !

Si j'étais plus proche, j'irais tout le temps

ahah non justement, moi j'ai connu l'époque où on enchainait une retrospective scorsese avec une retro frères coen avec une rétro almodovar avec une rétro woody allen dans des copies invraisemblables et ce en boucle. y a une programmation vraiment géniale en ce moment et d'ailleurs les salles sont très souvent blindées.

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Liam Engle: réalisateur et scénariste

que se passe t'il?

Oui je crois que la Filmothèque a battu son record d’entrées l’année dernière, après le Covid donc double exploit.


Il préfère que les gens n’aillent pas au cinéma.