La réunification des deux Corées (Joël Pommerat - Ateliers Berthier jusqu'au 3 Mars)Retour du plus grand auteur et metteur en scène de théâtre français dans ce qu'il fait de mieux, le théâtre de situation, cette fois-ci autour de l'amour en crise. Une prostituée qui ne veut pas qu'un prêtre les quitte, une femme de ménage qui divorce en pensant que son mari reviendra vers elle alors qu'il s'est pendu juste au-dessus d'elle, des auto-tamponneuses, un homme sur le point de se marier qui a fricoté avec toutes les soeurs de sa future femme, deux lesbiennes qui se séparent, un chanteur disco à la langue aussi inconnue que du Sigur Ros, une pluie fine, un instituteur accusé de pédophilie, un couple dont les enfants ont disparu alors qu'il les avait confié à une baby sitter... Rien n'est jamais simple et tout flirte avec la folie chez Pommerat, au point où on ne sait jamais vraiment s'il faut en rire ou en pleurer. Inspiré par Scènes de la vie conjugale et La ronde de Schniltzer, Pommerat fait une nouvelle fois merveille avec ses éclairages ectoplasmiques et sa scénographie limpide où tous ses comédiens plus poignants les uns que les autres évoluent au milieu d'un dispositif de deux gradins en bi-frontal. Enfn un spectacle de qualité à l'odeon sous l'ère Bondy.
Instants critiques (François Morel - Pépinière théâtre jusqu'au 2 mars)Une adaptation des échanges cinéphiliques entre Georges Charensol et Jean-Louis Bory, critiques historiques du masque et la plume qui avaient décidé de théâtraliser leurs divergences pour donner du peps à l'émission radiophonique dans les années 60-70 par une partie de la troupe des Deschiens. Entre l'écrivain goncourisé plus porté sur les films d'auteurs et l'Eric Neuhoff de l'époque toute en roublardise réac, Morel créée de petits moments savoureux, chantants et très visuels animés par la passion de débattre, avec Godard, Pasolini, Bergman, Coppola, Ferreri ou bien d'autres en background.
Intégrale Büchner (Ludovic Lagarde - Théâtre de la ville jusqu'au 25 janvier)
Tour de force de Lagarde de monter tout Büchner, mort à 23 ans après trois pièces dont une inachevée, avec son comédien fétiche Laurent Poitrenaux. Woyzech, soldat brimé décide de se révolter en tuant sa femme. La mort de Danton (moins abouti) raconte la chute de l'histoire en ne quittant pas uen chambre à coucher. Et enfin, Léonce et Léna, où un prince et une princesse tentent de fuir leur imminent mariage, vire à la grosse farce. Une palette vaste d'adaptations servie comme à chauqe fois chez Lagarde par une troupe de comédiens fougueux et survoltés autour de jeux de désir et de pouvoir.
Enfin, temps de crise oblige, pas mal de seul en scène en ce moment avec son comédien et sa chaise. En supplément de la nuit qui tombe, Guillaume Vincent montre ses échanges avec une maniaco-dépressive semblant irrésolue à vivre dans Rendez-vous gare de l'est aux Bouffes du Nord. Jean-François Balmer est sensationnel dans Voyage au bout de la nuit au théâtre de l'oeuvre, en prolongations actuellement. Grégory Gadebois se transforme de simplet en génie, cobaye de laboratoire ayant pour seul compagnon une petite souris, dans Des fleurs pour Algaernon au petit théâtre de la porte saint-Martin. Plus centriste et moins intéressant, Stéphane Hillel au petit théâtre de Paris raconte la vie d'échec ordinaire d'un instituteur qui n'aura jamais réussi à écrire dans Tour de piste.