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MessagePosté: 13 Aoû 2024, 09:46 
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Assez déçu par ce film, présenté comme un chef-d'oeuvre et qui m'a globalement assez ennuyé. Je m'attendais à un grand film ample sur l'engagement, la milice, la résistance et en réalité c'est un petit drame principalement d'intérieur, très répétitif avec trois personnages. Etude de caractère d'un personnage principal trouble (ce que le film a de plus réussi évidemment) à la fois brute, presque trop évidente (cf la première scène où il tue gratuitement un oiseau) et encore un enfant qui joue à faire la guerre avec ses beaux costumes et son pistolet. L'acteur principal est vraiment bien avec son visage d'enfant perdu (et son destin tragique, il meurt deux ans après le tournage dans un accident de la route le rend encore plus poignant).
J'aime beaucoup la fin bucolique (qui m'a rappelé toute proportion gardé ce chef-d'oeuvre d'Elvira Madigan) où enfin le film décolle un peu mais c'est un peu tard et le film ne m'a jamais véritablement passionné.

3-4/6

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MessagePosté: 13 Aoû 2024, 09:59 
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Moi j'aime bien que ça soit pas trop ampoulé ou appuyé justement, c'est parfaitement adapté au sujet. La sobriété n'empêche pas un sentiment de malaise extrême à certains moments, et oui, l'acteur est parfait.


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MessagePosté: 26 Aoû 2024, 13:23 
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Revu sur le site d’Arte et de loin le meilleur film de Louis Malle (parmi tous ceux que j’ai vus).

Le personnage principal a un petit côté Forrest Gump, il traverse l’Histoire sans qu’aucun des événements tragiques auxquels il est confronté ne provoquent la moindre prise de conscience, le moindre point de vue sur ceux-ci ; si comme il dit un moment au père d’Aurore Clément pour lui faire peur : « mes amis n’aiment pas les juifs », lui n‘en pense rien, il n’exprime jamais ni son adhésion ni son rejet d’un tel racisme et s’il tue un allemand pour les sauver, c’est essentiellement pour des raisons sentimentales : s’enfuir avec la jeune fille qu’il aime et accessoirement récupérer la montre dérobée par l’allemand que Lucien destinait initialement au père de sa fiancée.

C’est l’une des raisons qui expliquent le rejet du film par les Cahiers « rouge » du début des années 70. Je crois (je dis je crois car leur pensée n’est pas évidente à déchiffrer) qu’ils reprochent au film son traitement ambivalent du personnage principal : un fasciste certes qui finira fusillé, nous annonce t-on à la fin du film, mais dont le crimes sont minimisés, dédramatisés , « innocentés » d’une certaine façon par le comportement enfantin de Lucien pendant les moments les plus dramatiques, le film en donne de nombreux exemples : quand il tire sur un lapin avec sa mitraillette pendant une action commando, ou lorsqu’il dessine une bouche sur le sparadrap qu’il vient de poser sur le prisonnier pour le faire taire…

Pascal Bonitzer a bien saisi à cet égard la psychologie du personnage de Lucien : un ado à la recherche d’un père (le sien est prisonnier en Allemagne) dont l’autorité lui permettrait de canaliser ses instincts primaires, voire ses pulsions meurtrières (cf. le massacre des animaux au début) et d’accéder ainsi à l’âge adulte. Ces figures paternelles seront successivement incarnées par cet instituteur résistant qui le rembarre : « le maquis, c’est du sérieux », par les hommes de la police « allemande » qui le prennent sous leur aile puis enfin par le père de la jeune fille juive. Cette quête est d’ailleurs placée sous l’égide d’un autre grande figure paternelle historique, le Maréchal Pétain, père de la Nation, son portrait apparaissant dès les premiers plans du film.

Mais plutôt que d’y voir un film moralement condamnable, on peut aussi y lire simplement « la prévalence des déterminations psychologiques sur les êtres humains, dès lors que que les déterminations politiques sont inexistantes » comme l’a écrit Pierre Bayard dans l’un de ses ouvrages. Lucien est vierge de toute culture politique, ses choix dès lors ne peuvent reposer que sur des motivations dont les ressorts relèvent de sa psyché.

Je note que Michel Foucault interviewé se montre plus clément que les critiques Cahiers, il trouve des qualités au film dont celle de bien montrer ce qui a permis la diffusion du nazisme parmi une grande partie de la population, à savoir la délégation aux gens du peuple de fonctions relevant habituellement de l’Etat : la répression, le contrôle, la police… Un nazi, c’était celui à qui on confiait le pouvoir enivrant, de torturer, tuer, spolier…

La présence d’un noir parmi les collaborateurs est une idée assez surprenante voire dérangeante. Je me suis demandé si elle correspondait au moins à une réalité (pas trouvé de réponse).


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MessagePosté: 26 Aoû 2024, 16:54 
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elmergantry a écrit:

La présence d’un noir parmi les collaborateurs est une idée assez surprenante voire dérangeante. Je me suis demandé si elle correspondait au moins à une réalité (pas trouvé de réponse).


Si l'on prend en compte le traitement que les Allemands réservaient aux tirailleurs sénégalais capturés d'une part, le racisme de la Milice de l'autre et enfin le fait que des personnalités comme Felix Eboué ou Franz Fanon se sont engagés par conviction dans la France Libre, peu probable et c'est plutôt un contresens.

En Algérie, d'après Ageron, la propagande allemande flattait le sentiment national algérien par des émissions de radio et des journaux en arabe mentionnant l'indépendance possible, utlisant des formules qui paraissent rétrospectivement prémonitoires et frappantes, mais les trois courants nationalistes dominants de l'époque y étaient peu sensibles : les messalistes étaient au départ proches des communistes, après moins, mais conservaient avec un populisme ouvrier et une fome d' idéal autogestionnaire, Ferhat Abbas, plus proches des élites économiques, était humaniste et francophile sincère (mais déçu), et les oulémas, la composante la plus conservatrice, trop sensibles à la notion d'une exception culturelle maghrébine et à une possible union panarabe tournant autour de la religion pour que l'influence allemande n'influence leur action, .

Par ailleurs si la défaite de la France après 1940 faisait le jeu des nationalistes dans les colonies d'Afrique et en Asie, ceux-ci n'avaient aucune raison politique de soutenir Pétain et le fascisme français qui aurait dilué leurs revendications politiques, d'autant que De Gaulle avait fait des promesses allant dans le sens d'une plus grande autonomie (le Discours de Brazzaville en 1944).

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Sur un secrétaire, j'avise deux statuettes de chevaux : minuscules petites têtes sur des corps puissants et ballonés de percherons. Sont-ils africains ? Étrusques ?
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Dernière édition par Vieux-Gontrand le 26 Aoû 2024, 17:29, édité 3 fois.

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MessagePosté: 26 Aoû 2024, 17:07 
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Si si c'est basé sur un souvenir réel de Louis Malle sur des miliciens martiniquais et c'est corroboré ici : https://www.jeuneafrique.com/178262/soc ... ionnistes/

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MessagePosté: 26 Aoû 2024, 17:11 
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Le sujet est intéressant mais il faut rapporter le nombre de Noirs engagés dans la collaboration d'une part (en Métropole donc), aux nombre de ceux qui ont combattu dans la France Libre pour l'objectiver.

Par ailleurs les Africains connaissaient les campagnes de l'Italie fasciste en Ethiopie ou en Libye avant la guerre (des soldats conglais ont engagé t battu assez tôt dans la gerre l'armée italienne au Soudan, intervention critique pour sécuriser des régions minières, notamment en ce qui concerne l'uranium)
https://fr.wikipedia.org/wiki/Bataille_de_Sa%C3%AFo

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MessagePosté: 26 Aoû 2024, 17:28 
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Quel est le rapport ? Je dis juste que le milicien noir n'est pas une fantaisie de casting mais un fait avéré.

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MessagePosté: 26 Aoû 2024, 17:35 
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Bilé parle dans l'article de Jeune Afrique de trois miliciens du nom d'Hoarau nés à la Réunion (et non pas martiniquais comme dans le film), deux à Bordeaux et un à Montpellier, ce qui ne veut pas forcément dire noirs...l'histoire de l'île, son rapport à la métropole, à l'Afrique et aux autres populations de l'Océan indien sont quand-même très spécifiques.


On trouve quelques info sur René Hoarau ici (chef de la Milice à Montpellier, ancien de l'Action française) :

https://www.etudesheraultaises.fr/publi ... 0septembre.

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MessagePosté: 26 Aoû 2024, 18:51 
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MessagePosté: 26 Aoû 2024, 19:24 
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MessagePosté: 26 Aoû 2024, 20:20 
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Art Core a écrit:
Si si c'est basé sur un souvenir réel de Louis Malle sur des miliciens martiniquais et c'est corroboré ici : https://www.jeuneafrique.com/178262/soc ... ionnistes/

Merci pour la recherche.


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MessagePosté: 05 Sep 2024, 08:52 
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Je l'ai également rattrapé hier sur Arte.

Je trouve l'approche de Louis Malle brillante dans le fait de montrer l'occupation comme une force étouffante, une menace perpétuelle qui devient torture psychologique, la violence physique et l'horreur véritable étant plutôt en arrière plan. C'est vrai que le film peut paraitre répétitif mais cela est logique par rapport à la volonté de Louis Malle de montrer comment l'oppression s'exerce au quotidien. Les rues sont peuplées de gens normaux qui continuent de vivre comme si rien ne se passait, presque dans le déni ou en faisant semblant. Quand Lucien comprend le pouvoir qu'il vient d'acquérir il va naturellement en tester les limites, exercer sa domination au plus fort, c'est un personnage dont la persécution atteint un tel niveau qu'il en perd toute échelle morale. Et cette persécution parait d'autant plus cruelle que justement elle est représentée à l'écran de manière répétitive, inlassable.

Une de ses connaissances se fait torturer par sa faute et il en reçoit une récompense: pour une personne un peu perdue et sans figure d'autorité dans sa vie (comme l'explique très bien Elmergantry) on voit bien comment les repères moraux peuvent être flous à échelle individuelle et on imagine comment cela peut infuser ensuite au sein d'une société.

En ça, pour moi il est clair que le film signifie bien le besoin de résister: contre la profusion d'idéologie contraire à ses propres valeurs morales, mais aussi frontalement contre une force oppressante qui agit chez soit (ici dans sa maison, mais plus généralement dans son pays), même si cela se fait au risque de sa vie. Du coup je comprends pas trop (je ne me suis pas tellement renseigné) pourquoi le film a fait autant polémique ? Certes il montre le côté humain qui peut se cacher derrière un personnage qui agit de façon tyrannique, mais ça me parait étrange que l'on puisse en déduire que le film tente de réhabiliter les collabos, après surement que les sensibilités à ce niveau étaient encore fragiles à ce moment là.

Finalement le personnage qui pour moi est le plus trouble est celui de France, avec son espèce de syndrome de Stockholm. L'autre facette de comportements qui deviennent presque irrationnels dans un contexte où les barrières morales sont abstraites.

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