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MessagePosté: 19 Avr 2024, 17:52 
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L'ascension dans les années 60 d'un club de motards du Midwest vu à travers la vie de ses membres, passant d'un lieu de rassemblement pour les marginaux locaux à un gang plus dangereux.

À l'origine de ce premier film en sept ans de Jeff Nichols, il y a l'ouvrage du photographe Danny Lyon qui a fréquenté et interviewé les membres du Chicago Outlaws Motorcycle Club de 1963 à 1967 mais bien que le cinéaste, visiblement fasciné par ce livre, ait nourri le projet d'une adaptation depuis des lustres, il ne choisit pas Lyon comme protagoniste. Il y a bien un alter ego du journaliste dans le film, campé par mon pote Mike Faist (West Side Story et bientôt Challengers), mais il est surtout là pour recueillir le témoignage de Kathy, qui n'est pas une membre du club mais l'épouse de l'un d'eux. Ce choix de point de vue à lui seul détourne The Bikeriders du chemin qui lui semblait tout tracé.

En effet, si l'ouverture semble citer ouvertement Goodfellas, avec son arrêt sur image et sa voix off ad hoc, le film s'en affranchira peu à peu pour livrer un portrait globalement défait de tout glamour sur une communauté condamnée à devenir l'antithèse de ce qu'elle incarnait. Jouant adroitement avec les codes de différents genres, Nichols nous séduit dans un premier temps, en passant du film de gangsters à une imagerie rappelant le merveilleux nocturne adopté par son propre Midnight Special, mais le charme opéré tant par le charisme angélique d'Austin Butler que l'iconographie des motards comme symboles de la liberté à la Easy Rider cède lentement la place à ce que ce personnage féminin avait instinctivement cerné d'emblée comme un monde à fuir.

À l'inverse d'un Scorsese dont les films présentent une certaine ambivalence vis-à-vis des criminels, à la fois punis in fine mais sujets à l'empathie et à l'identification dans la jouissance de leur mode de vie, Nichols ne paraît jamais enamouré par l'univers de ses protagonistes. C'est résolument le film de quelqu'un qui regarde tout ça de l'extérieur, sur qui cela exerce une sidération certaine et qui voit bien pourquoi des laissés-pour-compte s'y retrouvent, mais pour qui tout cela reste tout de même un peu élusif.

Rien ne l'incarne mieux que la caractérisation du personnage de Butler, qui ne dit presque rien, qui semble rester en dehors de tout débat, à la marge, même de son ménage, pas vraiment un protagoniste dans le sens pur du terme. Ce n'est pas un archétype ou une idée que Nichols réduit à une icône, c'est un personnage qui existe mais qui demeure évanescent, insondable. Et l'acteur parvient à l'habiter à merveille. En fin de compte, il est sans doute celui qui symbolise le mieux cet idéal de liberté, la notion dans ce qu'elle a de plus pur, là où les autres membres finissent par dévier de trajectoire. Plus le club prend de l'importance, plus il devient régi par des codes, des règles, offrant une réflexion en douce sur le sectarisme et le communautarisme autant que sur la corruption des idéologies, une intrigue portée par un Tom Hardy qu'il est réjouissant de revoir enfin parfait dans un excellent rôle.

Mais tout le monde est bon ici. Shit, même Boyd Holbrook surprend en mécano un peu simplet.

Et la meilleur n'est autre que Jodie Comer, exceptionnelle en vrai point d'ancrage de ce film qui m'a paru vraiment habile dans l'écriture sur la question du point de vue, celui d'une femme sur un monde d'hommes, et donc forcément dans la mise en scène au regard doux mais juste.

C'est pas Witness quoi (gratuit).

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MessagePosté: 20 Avr 2024, 16:55 
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Trop content que le père Nichols revienne.

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MessagePosté: 24 Juin 2024, 09:33 
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Je n'ai pas compris ce qu'a souhaité raconter Jeff Nichols avec ce film formellement sans intérêt, peuplé de personnages quasi inexistants et d'un scénario d'une mollesse terrible, fonctionnant sur le mode de la chronique et surtout incapable de nous offrir le moindre point de vue sur la communauté qu'il filme. C'est assez fascinant parce que le film adapte le livre d'un photographe, un recueil d'images sur une communauté puissamment iconique et le film n'est pas du tout là-dedans, Nichols n'est absolument pas intéressé par les motos, par les paysages, par cette soif esthétique de liberté revendiquée par ce groupe d'hommes qui a décidé de se réunir pour "rider" ensemble. On les verra surtout assis au bar ou autour d'un feu en train de boire des bières et de fumer des clopes. Alors c'est peut-être justement là qu'est ce discours où ce groupe de motards avec ces idéaux de cow-boys pionniers nés trop tards n'est en fait que des hommes conventionnels et ennuyeux mais le film est tellement peu sûr de lui dans ce qu'il raconte qu'il est difficile d'en être sûr.

Il faut voir cette ouverture proto scorsesienne avec voix-off, baston virile et arrêt sur image comique qui est en totale contradiction avec le reste du film et ce qu'il propose. On a vraiment le sentiment que Nichols avance à vue sans parvenir à choisir un ton vraiment clair. Il tâtonne avec des personnages qui surgissent ça et là mais qui sont tous bien trop peu écrits, on ne sait rien d'eux, on ne rentre dans l'intimité d'aucun (à la limite le mec qui veut devenir flic ou Michael Shannon qui fait un monologue assez touchant), ce ne sont que des icônes mal dégrossies dont évidemment le personnage d'Austin Butler, qui n'est qu'un bad boy badass épris de liberté et beau comme un dieu. Le personnage de Tom Hardy (enfin un rôle digne de ce nom même si ne je supporte pas son incompréhensible voix nasillarde) n'a aucune consistance, on comprend que c'est un père de famille qui aimerait raccrocher mais c'est tout. Le reste est à l'avenant, des personnages qui passent une tête de ci de là mais globalement un echec à créer un vrai groupe avec des personnages denses (Mike Faist, le photographe qui ne sert littéralement à rien). Jodie Comer hérite du rôle de la narratrice mais ça n'en fait pas un personnage intéressant pour autant (et elle force un peu l'accent du Midwest).

On arrive là à ce qui me dérange plus profondément dans le cinéma de Nichols, c'est un cinéma réactionnaire limite sexiste. Un cinéma de bonhomme où il n'y a pas l'ironie d'un Scorsese pour contrebalancer. Ici on a un personnage de femme qui nous raconte l'histoire et qui passe donc deux heures à parler des hommes. Elle ne parlera jamais d'elle-même ou de ses copines. On ne saura rien de sa vie de femme au foyer et de son sentiment vis à vis de ces hommes qui sacrifient tout pour leur bécane pour leur groupe. Pire, la fin vient entériner ce patriarcat total où l'homme qui a finit de faire son petit caprice rentre bien sagement à la maison où bobonne l'attend. Et encore une fois Nichols ne sait pas filmer l'amour. Comment croire à ce couple Austin Butler/Jodie Comer ? Ils tombent amoureux mais on ne les verra jamais s'embrasser, être ensemble, discuter à deux, partager quelque chose. Comme dans Loving, Nichols propose une vision du couple là encore bien réac, bien prude, bien chiante. Et puis bon il aurait été intéressant de nous dire ce que sotn politiquement que les gangs de motards. C'était pas des enfants de choeur mais au contraire souvent des droitards anti hippie et plus proche du fascisme que du flower power et ça on n'en verra évidemment rient (à peine un discours du perso de Michael Shannon à un moment).

Le film est pas désagréable et j'aime bien l'idée que l'on te montre un mouvement pacifique et basé sur l'amitié se faire dévoyer par une soif de pouvoir inévitable mais globalement je n'aime vraiment pas le film et j'ai bien du mal à comprendre les quelques avis enthousiastes lus ici ou là.

2/6

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MessagePosté: 24 Juin 2024, 09:52 
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Art Core a écrit:
Je n'ai pas compris ce qu'a souhaité raconter Jeff Nichols avec ce film

Citation:
Il faut voir cette ouverture proto scorsesienne avec voix-off, baston virile et arrêt sur image comique qui est en totale contradiction avec le reste du film et ce qu'il propose. On a vraiment le sentiment que Nichols avance à vue sans parvenir à choisir un ton vraiment clair.

C'est le but. Ça commence délibérément comme Goodfellas pour mieux le déocnstruire et montrer justement ce que tu as bien ciblé plus haut :
Citation:
Nichols n'est absolument pas intéressé par les motos
Citation:
Alors c'est peut-être justement là qu'est ce discours où ce groupe de motards avec ces idéaux de cow-boys pionniers nés trop tards n'est en fait que des hommes conventionnels et ennuyeux

Et c'est en ça qu'on a le point de vue féminin.
Citation:
On ne saura rien de son sentiment vis à vis de ces hommes qui sacrifient tout pour leur bécane pour leur groupe.

Quand même...

Ce sont des gens qui jouent à être (ça commence avec Hardy qui découvre Brando en motard et reprend ses propos) et elle les voit comme toxique dès son entrée dans le bar.

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MessagePosté: 24 Juin 2024, 10:21 
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Le regard de Nichols n'est pas si évident. Clairement difficile de voir qu'il fait un film sur des hommes toxiques, il est clairement ambivalent dans son sentiment vis à vis d'eux...

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MessagePosté: 24 Juin 2024, 10:26 
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Of course, mais il tranche in fine.

Et il y a ce qu'il fait dire au perso de Hardy à Butler : un truc genre "tu es ce qu'ils pensent être". Il y a l'idéal et la réalité.

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MessagePosté: 24 Juin 2024, 11:44 
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Sinon pour un film qui déconstruit la masculinité de manière bien plus brillante, The Iron Claw (qui n'est pas si éloigné de ce film) est très largement meilleur.

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MessagePosté: 24 Juin 2024, 11:46 
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Je lui préfère celui-ci mais c'est vrai que les deux films sont parents, notamment dans l'étude d'une certaine Amérique.

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MessagePosté: 25 Juin 2024, 00:59 
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Art Core a écrit:
Jodie Comer hérite du rôle de la narratrice mais ça n'en fait pas un personnage intéressant pour autant (et elle force un peu l'accent du Midwest).



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MessagePosté: 25 Juin 2024, 08:01 
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Je m'incline, je ne suis pas un spécialiste des accents américains donc mon avis est invalide :|.

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MessagePosté: 25 Juin 2024, 09:07 
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L’info c’est surtout "turn out to be a spot on imitation of the real woman".


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MessagePosté: 26 Juin 2024, 19:44 
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Antichrist
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Un peu le cul entre deux selles, le nouveau Jeff Nichols, entre chronique d'une désillusion, fascination pour le monde des motards et angle féministe plaqué. A force de ne pas trancher, on en vient à douter de la sincérité de certaines scènes, reste Tom Hardy génial.

3/6

Je viens de lire ton texte Freak, tout ce que tu dis fait sens, et du coup... il y a t-il un film à faire quand tu es fasciné-mais-pas-trop par un monde loin de toi ?


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MessagePosté: 02 Juil 2024, 19:05 
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Karloff a écrit:
Je viens de lire ton texte Freak


Je me demande comment tu as fait, au bout de 10 lignes j'en pouvais plus.

Sinon c'est un Jeff Nichols certes mineur, mais ça reste un film solide sur ses appuis (mise en scène, interprétation, bande son)


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MessagePosté: 02 Juil 2024, 19:39 
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C'est pas plus mal que tu votes pas.

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MessagePosté: 02 Juil 2024, 20:44 
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Tu penses quand même pas que j'allais manquer l'occasion de voter RN.?


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