Forum de FilmDeCulte

La fin de son dernier film sur Anne Frank va te faire gerber :

Le procès d'intention sur l'invisibilisation me semble guère constructif. Il retombe lui-même très vite s'il est imprécis sur des oppositions sujet ( réalisateur même si dans le cas de Lohmann c'est le spectateur qui feint d'être le réalisateur) -objets (personnes filmées) inhérentes au cinéma, l'autorité revenant dans tout les cas au premier. Par ailleurs la prise de conscience politique nait rarement avec un film à lui-seul
Mais sur la guerre du Liban de 1982 Journal de Campagne d'Amos Gitai est important, même si je ne crois pas qu'il rentre au Liban mais reste plutôt en Cisjordanie

La comparaison avec the Act of Killing me paraît aussi emprunter une voie particulièrement hasardeuse, car, même s'il y a des points communs (l'esthétisation par la musique de PIL ici, les affèteries de la comédie musicale camp avec les tueurs là-bas) il y a entre eux une importante différence de degré. Dans ce film l'extermination des communistes et Chinois est bel et bien jouée par les bourreaux, voire par l'armée indonésienne qui met à sac un village aux alentours de Medan pour les besoins du film. À moins que l'on ne considère qu'il existe une équivalence de valeur entre les corps réels des Indonésiens et ce qui est déjà représentations dans le cas du conflit israélo-palestinien, mais dans ce cas là on butte sur de sacrés points aveugles, dont une forme d'hiérarchisation implicite et irréfléchie des conflits et de leurs victimes.

Bon, j'ai adoré Valse avec Bachir donc je ne suis pas vraiment objectif mais je comprends mal ton propos Lohmann, tu projettes TA VOLONTÉ et TES INTENTIONS, qui ne sont pas celles du réalisateur, tout simplement, qui justement prend le point de vue béotien d'un conscrit comme lui. Et le film a provoqué un vrai débat en Israël, justement car une partie de la classe politique israélienne rejette la responsabilité évidente du massacre. J'aimerais bien avoir le point de vue de Lapid d'ailleurs, ce serait intéressant.

Il était lapidaire.

OUAIS BON CA VA

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Liam Engle: réalisateur et scénariste

C'est là toute la question que j'essayais de soulever. Je suis bien conscient du point de vue qu'il adopte, et c'est sa part d'indécence que je questionne. J'ai un peu de mal à m'apitoyer sur le sort des soldats israéliens ayant participé (activement ou non) au massacre de 4000 palestiniens. Imagine un même film sur les conscrits russes en Ukraine.

Et Lapid dans Le Genou d'Ahed (ou Mograbi dans Z32) parle bien mieux du niveau de nocivité au sein de l'armée israélienne.

Bah c'est justement intéressant le point de vue de quelqu'un embringué dans une cause horrible. C'est comme si tu reprochais à Jonathan Littell ses Bienveillantes.

Tout le monde a le droit de parler, de raconter. On va pas commencer à trier les victimes.

Qu'est-ce que Folman a d'intéressant à dire sur Sabra et Chatila dans son film, hormis que ça l'a traumatisé et qu'il a évacué son souvenir pendant plus de 20 ans ?
Tout le monde à le droit de parler, comme j'ai tout autant le droit de ne pas trouver sa parole pertinente.

J'avais apprécié le film mais les réserves avancées par Lohmann me semble plutôt valables, rétrospectivement et sans beaucoup de souvenirs du film : esthétisation de la guerre et d'une espèce de vague à l'âme de la soldatesque. C'était dans l'air du temps, un an plutôt, Sokourov faisait Alexandra dont je ne garde strictement aucun souvenirs.

En même temps pourquoi une représentation de la guerre devrait être moralement et esthétiquement satisfaisante ? Comment pourrait-elle l'être ? Cette satisfaction est extrêmement ambivalente (sur quoi le spectateur se prononcerait alors, où parle-t-il ? à la fin le point de vue moral et le bon sens deviennent à la fois une forme de spécialisation et une vision surplombante. Jouit-on du caractère insoldable du conflit à travers le film ?), elle n'est pas ce qu'un film recherche (c'est peut-être par l'effet d'une pudeur morale que l'on ne peut pas exprimer directement que dans l'Illiade le thème du destin individuel prend progressivement le pas sur celui de la justification de la guerre de Troie), ni même un angle critique pertinent. Il me parait plus pertinent de mentionner de façon plus sobre les films qui le complètent et sont moins visibles.
Et Lohmann parle moins du film qu'il ne reproche au réalisateur d'être ce qu'il est.


Même un film aussi frontal et nécessaire que la Bataille d'Alger pose d'énormes problèmes historiques, vu les conditions de tournage et le moment politique où il s'inscrit.

Sinon
A ce serait génial qu'un réalisateur russe fasse et puisse montrer un film, même mauvais, même à la Jarhead , sur les atermoiements du bidasse

Et malgré tout le dernier geste politique d'Ariel Sharon a été de désengager l'armée israélienne du Liban, et de créer un parti politique à la fois relativement centriste et axé sur les questions territoriales et de se soumettre au suffrage au risque d'être minoritaire pour se maintenir au pouvoir, ce qui pourrait en inspirer certains.

Le film de Pavel Lounguine sur l'Afghanistan semble correspondre à cela (à vérifier, il y a beaucoup de films de guerres russes dont on n'entendra jamais parler ici, sans parler des ukrainiens ou des géorgiens, etc).

Là encore, Folman expose le point de vue d'un soldat (c'était tiré de son expérience ou de celle d'un ami je me souviens plus) mais justement en montrant les images d'archives finales, il te montre le décalage entre ce qu'a vécu le soldat et les horreurs commises (mais pas par Tsahal, pour le coup). Le film a été critiqué en Israël pour l'absence de contextualisation du massacre final (genre ce n'est pas de la faute d'Israël)

sinon je doute qu'un cinéaste russe parvienne à faire un film sur la mobilisation russe en Ukraine qui se termine par le massacre de Botcha

Dans les 26 prochaines années pourquoi pas.

Après j'imagine que si le film est sur un conscrit un peu intello débarquant de Saint-Petersbourg, qui écoute du London Grammar, traversé de scènes oniriques, et avec comme arrière-fond mélancolique le massacre de Butcha faisant office de péché originel, mais à distance, avec un air de ne pas y toucher, pas sûr qu'on doive y être forcément sensible.