STEPHEN SOMMERS IS BACK
Voilà. En fait, vous devriez vous limiter à cette simple affirmation, assez révélatrice sur la nature du film, et ne pas potentiellement vous monter la tête ou même être convaincu par mon avis, très positif, sur le film, vous risquant alors à une déception. Après, vous savez qui je suis, ce que j'aime, etc. et je me donne pas plus d'importance que je n'en ai mais bon, vous êtes prévenus.
Oui parce que j'ai vraiment pris mon pied, toutes proportions gardées, devant ce cartoon de grand gamin. Et pourtant c'était pas gagné, le projet ne me disait rien qui vaille, je n'ai pas grandi avec les jouets, je ne regardais pas le dessin-animé et j'ai encore moins lu les comics. Et surtout, la relative déception qu'était Van Helsing s'était transformé en 5 ans en un véritable sale goût dans la bouche, qui restait là à te donner mauvaise haleine dès que tu parlais de Sommers même aujourd'hui...
...mais justement, G.I. Joe est tout l'inverse de Van Helsing. Là où son précédent était une boursuflure de plus de deux heures avec un univers qui n'en finissait plus de déborder de manière superflue craquant les coutures d'un scénario structuré avec les pieds tout en se prenant un peu trop au sérieux et - crime de lèse-majesté pour ce genre (le blockbuster décomplexé) - super répétitif dans l'action, son nouveau film est une fusée qui ne se repose jamais, ni pour parler ni sur ses lauriers, et enfile comme des perles les séquences d'action démesurées dans un tout compact de 1h47.
En fait, le film présente les symptômes d'un parti-pris qui va sans aucun doute en rebuter beaucoup, c'est un film bande-annonce. Le film a quelque chose à vendre - son concept jouets/cartoon/comics en film - et le fait avec le strict minimum d'exposition, de scénario et par une blindée de money shots. Niveau consistance? C'est le néant. Niveau plaisir? Moi je suis comblé.
La légèreté générale est justement salutaire au film...Transformers avait le nom de la compagnie de jouets Hasbro au générique, G.I. Joe a carrément le logo animé de la boîte qui suit celui de Paramount. NON-MENSONGE SUR LA MARCHANDISE. Transformers est probablement le film auquel il est le plus facile de comparer G.I. Joe. C'est un peu la même démarche. Autrefois, Sommers singeait Spielberg, aujourd'hui il s'inspire de Bay. Il lui emprunte le chef op de Transformers justement et lui aussi adapte une franchise de jouets/cartoon/comics et procède par le même genre de construction par l'imagerie iconique.
Il y avait déjà de ça dans les précédents Sommers, les adaptations de classiques (Mark Twain, Rudyard Kipling), les séries B référentielles (Deep Rising), les remakes-hommages aux serials et films de monstres d'Universal (La Momie 1 & 2, Van Helsing) et ici le cinéaste poursuit son petit bonhomme de chemin en changeant quelque peu de registre...clairement inscrit dans la mouvance "films comic book", G.I. Joe emprunte également à James Bond, Star Wars, aux films de ninjas, aux films de guerre, etc. Les mauvaises langues parleront de clichés, les amateurs parleront d'icônes.
Sommers n'a pas le talent formel de Michael Bay et sa mise en scène, impersonnelle, n'est pas une composition de tableaux glorificateurs magnifiant la réalité. Rien de baroque chez Sommers. Cela dit, il a parfaitement saisi comment créer un univers à partir des oripeaux d'autres films, d'autres genres...alors attention, j'ai pas dit que c'était Kill Bill mais il suffit de voir la galerie de personnages, tout de suite cernés, archétype par archétype, chacun membre de l'équipe reconnaissable d'entrée (le leader, le comique, le gros bras, le techos, la maligne, l'artiste martial), comment les lieux sont définis par leur imagerie de carte postale, apr leurs principaux monuments (Egypte = pyramides, Washington = Capitole, Paris = Tour Eiffel) et comment l'intrigue se construit par les codes de divers genres (les flashbacks, comme l'intro, symapthique transition entre les films précédents de Sommers et son nouveau, mais surtout les séquences sur Snake Eyes et Storm Shadow).
Enfin bon, Snake Eyes et Storm Shadow quoi. C'est ça les noms des persos. Duke. Ripcord. Baroness. Zartan. Destro. C'est du film de bases sous-terraine et sous-marine, de batailles aquatiques et de Tour Eiffel qui tombe, de super-soldats et de savant fou. Quand arrive l'éventuelle scène du "réveil du Cobra" du titre, tu SAIS que t'es dans du dessin-animé. Y a pas à chercher quoi que ce soit de sérieux là-dedans, ça sait très bien ce que c'est et ça essaie pas d'en faire plus. Non, ça te donne du spectacle et ça sacrifie tout le reste au profit du divertissement pur.
A ce niveau-là, c'est vraiment bonnard. Qu'il s'agisse de l'entrée avec quelques explosions massives et des canons à pulsions (qui donne tout de suite le ton) ou du dessert en climax avec ses actions parallèles lucasiennes (un peu longuet cela dit mais assez maousse) ou des nombreux fights au corps-à-corps (le plus faible du film, mise en scène un peu confuse), c'est plutôt réussi...mais G.I. Joe c'est avant tout...le plat de résistance...la poursuite à Paris.
La poursuite à Paris est tout bonnement PHE-NO-ME-NALE.
Je n'ai vu que le teaser, le trailer et un rapide extrait de la séquence, et je craignais que ça se limite à ça mais pas du tout. J'avais encore rien vu. La séquence est super riche, et dure, dure, dure...t'as du ninjaïsme, du super-héroïsme, des sauts de partout et des persos qui prennent cher, du carambolage et de la destruction massive...c'est fabuleux. J'étais à DONF pendant cette scène. Meilleure scène d'action de l'été avec le combat dans la forêt de Transformers 2. Et en plus c'est à Paris!!! J'étais super content de voir qu'ils avaient pas juste filmé trois-quatre plans de coupe à la con mais qu'ils avaient vraiment exploité le décor, la ville, utilisé plein de plans du vrai Paris pour y rajouter les effets spéciaux (plus réussis que ce que je craignais en fait). Même si t'as sans doute des bouts tournés dans je ne sais quel pays de l'Est.
Un dernier mot sur les acteurs : Tatum est charismatique mais joue comme un zizi (heureusement on lui demande pas trop de parler), Wayans est marrant (c'est pas Donjons & Dragons quoi), Quaid surjoue un peu mal tandis que Gordon-Levitt surjoue bien (lui il se fait vraiment plaisir ici), Miller mais surtout Nichols sont ultron-bonnes (preums sur Rachel) et les autres font bien leur taf.
Enfin bref...j'ai kiffé. C'est purement le prototype du film consommable/oubliable où seul le moment présent compte mais j'ai trouvé ça vraiment sympa et je pense même le revoir avec plaisir. En tout cas, c'est cool d'être agréablement surpris par ce film que je n'attendais plus (jusqu'aux bons échos récents, qui se confirment donc) et ce réal en qui je n'avais plus confiance (et qui renoue donc avec un esprit quelque part entre Deep Rising et La Momie, pas ouvertement comique mais suffisamment second degré et toujours conscient de soi).
Et je veux une figurine Snake Eyes.
4-4,5/6
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