Closure (PC/PS3)
Les années actuelles sont décidément l'âge d'or du puzzle-plate-forme, avec cette fois-ci un principe de base qui déchire.
Le concept est simple : les plates-formes existantes sont uniquement celles que l'on voit. Le jeu se déroule dans le noir total, et vous pouvez trimballer des globes de lumière, qui vous entourent d'un halo assez étendu pour éclairer une petite portion de sol sous vos pieds. Mais si par exemple vous posez cette boule lumineuse par terre et que vous sortez du halo, vous vous retrouvez dans le noir, donc selon la logique du jeu "dans le vide", et vous tombez.
Comme pour
Portal ou
Fez, il faut du coup tout penser autrement, modifier ses réflexes, ses schémas de pensée. Un mur bloque le chemin ? Il suffit d'en éloigner la lumière, il laisse place à du noir, et vous pouvez traverser ce vide. Vous partez avec un globe dans les mains ? Le cube à côté de vous, que vous aviez trimballé sur tout le niveau, n'a soudain plus de sol sous lui, et bascule dans le vide... La solution à chacun des tableaux (82 en tout) est souvent simple, mais pour la trouver il faut tout un cheminement de pensée pour concevoir le niveau "autrement", pour trouver la façon de déjouer l'architecture du décor, et pour générer soi-même ses propres plate-formes. Dans chacun des trois mondes proposés, de nouveaux éléments viennent s'ajouter : lampes, réflecteurs, glace à travers laquelle la lumière passe, boules de lumières qui s'éteignent à votre passage... On a même un peu l'impression que les concepteurs ont peur de nous lasser, et qu'ils rajoutent de nouveaux éléments avant d'avoir épuisé toutes les potentialités des précédents.
Globalement, le jeu est un grand plaisir à jouer. Au-delà du concept génial, donc, la finition est absolue (on se sent jamais "trahi" par le jeu, tout a été testé/pensé à fond), et la difficulté est exactement dosée pour une progression très fluide, sans arrêt prise de tête de trois quart d'heure : on réfléchit en même temps que l'on agit, on trouve immédiatement de petits bouts de la solution, par étapes. Seuls les dix derniers niveaux maousses, qui prennent à eux seuls un tiers du temps de jeu, ont vraiment une dimension casse-tête-névrotique.
Le petit souci, c'est que les concepteurs ne font pas naître grand chose de ce patron parfait. L'ambiance pseudo-Burtonesque est facile (hopital glauqe, cirque...), calquée à vide à coup de symbolisme opaque (pourquoi trois personnages ? Ca ne change rien au jeu). La dimension artistique du jeu est très "plaquée" au lieu de venir de lui, pas très réfléchie ou liée au gameplay, à l'image de la musique répétitive collée à la va-vite et qui rend un peu taré, comme une playlist en boucle... Le jeu construit en somme bien peu au-delà de sa succession de tableaux, alors que par le biais de la lumière il aurait pu mener à un ouvrage magnifique, même par petites touches, tant plastiquement que thématiquement. Ça pointe un chouilla, dans les niveaux avec la glace, mais ça ne va pas bien loin. Du coup, malgré la générosité (c'est très fourni, relativement long), la sensation d'ampleur fait défaut au jeu. Ça reste un "petit jeu indé" réduit à sa dimension de rubik's cube.
C'est d'autant plus ironique que les trois concepteurs mettent beaucoup leurs noms en avant, jusqu'à une sorte de "commentaire audio" (!), commentaire écrit en fait, qui permet de refaire le jeu avec des notes dans tous les coins (cela dit, pour le coup, c'est vraiment intéressant), mais les trois zouigues échouent finalement un peu sur l'essentiel : le jeu a pour lui le concept et l’exécution parfaite, ne lui manque que l'âme.
C'est dispo dans le
Humble Bumdle de cette année, pour ceux qui seraient intéressés.