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 Sujet du message: Europa (Lars Von Trier, 1991)
MessagePosté: 10 Nov 2007, 19:32 
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Inscription: 06 Nov 2007, 19:55
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Alors que je viens de revoir Europa, et que j'avais lu quelque part sur ce forum que Lars Von Trier était un réalisateur sans finesse, je me devais de réagir au travers de l'un de ces plus beau film; donc Europa. Europa, c'est tout d'abord une mise en scène d'une maitrise rare, absolument brillante
et toute en référence subtile, pas de dogme, pas de caméra épaule mais un classicisme expressioniste fort et puissant s'extirpant de tout académisme. Et que dire de l'esthetisme pur? C'est pour moi plastiquement l'un des plus beaux films si pas le plus beau des années 90 et peut-être même des années 2000, il n'a pas vieilli et le pouvoir d'attraction de l'atmosphere et de l'image du film est toujours aussi forte. Pour terminer le tryptique de cette oeuvre, l'histoire, adaptation de l'"Amerika" de Kafka à la sauce européenne qui lui donne son titre, aussi tordue, intense, et déréglée que celle dont pouvait nous gratifier le génial auteur tchèque avec des personnages angoissants, des situations absurdes,.. avec en plus un etat des lieux tres pertinent de ll'Allemagne d'apres-guerre.

Europa 6/6

ps: Et pour en revenir à Von Trier lui-même, la ou je le trouve justement tres fin c'est qu'il aurait pu continuer sur cette lancée de film extrement abouti et presque parfait autant dans le fond que sur la forme, et il a préféré encore une fois se prendre de revers, ce qui est tout à son honneur, Breaking The Waves et Dancer in The Dark sont justement tres fins dans leur lourderie et dans leur non-finesse, Trier le sait qu'il fait des films manichéens et bourrées de clichés (et il le dit lui-même dans le making of de Dancer) , à l'image de ce conte 'Coeur d'or' dans sa deuxième trilogie est tirée, mais la ou d'autres se seraient laissé engourdir et submerger par cette lourdeur et ce sentimentalisme exacerbé sans même s'en rendre compte, Von Trier lui en fait la matière première de ses films, en joue, et de par cette contrainte qu'il se donne encore une fois arrive à tirer des films extremements puissants et touchants, tout en étant volontairement manipulateur certes.

Je n'ai encore jamais été décu par Von Trier (je n'ai pas vu le Direktor mais ca ne saurait tarder), ses films ne me laissent jamais indifférent, ne sont jamais mou. Ca manque de réalisateur de cette trempe en France!

Vous aurez compris que pour moi c'est l'un des plus grands cinéastes contemporains 8)


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MessagePosté: 31 Jan 2009, 12:05 
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L'intro de Europa m'avait complètement laissé sur le cul tant sa puissance hypnotique atteignait sur moi un niveau dingue.
Je ne suis absolument pas fan de Lars Von Trier, mais je considère Europa comme son chef d'oeuvre. Effectivement, on est ici loin de ses délires auteurisants de sa période Dogme, la mise en scène étant d'une rigueur et d'une précision plaisantes. Europa est bourré d'idées visuelles, que ce soit la scène d'Hartman dans la baignoire, ses jeux sur la couleur et le noir et blanc, son travail constant sur les surimpressions...
Mais Europa n'est pas qu'un bel objet formel ou un exercice de style vain. Trier sonde l'Allemagne post-45, ses désilusions, ses nazis continuant à agir, ses marchandages avec les USA. Certains ont accusé Trier de complaisance envers le nazisme, auquel celui-ci a répondu qu'il ne s'identifiait pas aux nazis, mais aux perdants de l'histoire de manière générale.
La scène finale est magnifique. Trier partira ensuite dans une direction dans laquelle je ne le suivrai plus.

5.5/6


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MessagePosté: 31 Jan 2009, 12:26 
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BuzzMeeks a écrit:
Mais Europa n'est pas qu'un bel objet formel ou un exercice de style vain.


Ben moi j'ai pas pu y voir autre chose justement. Bien que ce soit un des noir et blanc les plus somptueux que j'ai pu voir, c'est quand même de la bonne grosse pignolade à mes yeux.


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MessagePosté: 31 Jan 2009, 13:11 
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oeil-de-lynx a écrit:
BuzzMeeks a écrit:
Mais Europa n'est pas qu'un bel objet formel ou un exercice de style vain.


Ben moi j'ai pas pu y voir autre chose justement. Bien que ce soit un des noir et blanc les plus somptueux que j'ai pu voir, c'est quand même de la bonne grosse pignolade à mes yeux.


En quoi ?


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MessagePosté: 31 Jan 2009, 17:14 
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Bah, c'est beau, tout le monde joue bien, y'a de la belle musique et puis il y même de l'expérimentation parce que Lars von Trier est âââârtiste, mais tout ça pour un histoire fort classique et cousue de fil blanc. J'ai regardé ça poliment, quoi.


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MessagePosté: 31 Jan 2009, 17:31 
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oeil-de-lynx a écrit:
Bah, c'est beau, tout le monde joue bien, y'a de la belle musique et puis il y même de l'expérimentation parce que Lars von Trier est âââârtiste, mais tout ça pour un histoire fort classique et cousue de fil blanc. J'ai regardé ça poliment, quoi.


On peut pas dire que l'histoire soit classique : le héros américain qui débarque dans une Allemagne filmée comme l'enfer, la sympathie évidente du réalisateur pour les anciens collaborateurs du nazisme, je ne sais pas trop dans quels films on a pu voir tout ça avant Europa.
Cousus de fil blanc, la fin dans le wagon avec l'eau qui monte ? Les enfants assassinant les dignitaires ? Le suicide ?


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MessagePosté: 31 Jan 2009, 17:47 
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?

J'avais dû dormir, je me rappelle pas de grand chose dans tout ça à part l'esthétique.


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MessagePosté: 02 Fév 2012, 03:09 
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Leopold Kessler, une jeune Américain d'origine allemande, vient de son plein gré travailler dans l'Allemagne de 1945. Employé comme contrôleur de wagons-lits, il découvre un pays au climat délétère, ravagé par les bombardements alliés.


Element of Crime, film formaliste tout mort / tout propre de premier de la classe, m'avait bien refroidi concernant cette première période. Je continue à penser que Lars Von Trier naît avec Médée d'abord, puis réellement avec The Kingdom ensuite - pas tellement parce que sa caméra y commence à trembler, mais parce que l'expérience du tournage prend alors une vraie place dans son geste cinématographique, et que sa maîtrise d'horlogerie y dialogue enfin avec un chaos à sa mesure. Europa, tout sur-maîtrisé qu'il soit, n'est cependant pas à ranger aux côtés de son très stérile premier film : c'est déjà plus fort.

Déjà parce que cette espèce d'approche vaguement héritée de Stalker (humide, rouillée, dépressive) n'est plus le calque automatiquement posé sur tout le film. Chargée d'une mission particulière, celle de façonner la vision du continent après la guerre, elle se fait beaucoup plus intelligente, réactive, vivante ; la scène à l'église, par exemple, n'a aucun mal à utiliser les propriétés de cet univers pour s'abandonner à un certain lyrisme, fut-il glacé. Il y a globalement, au-delà d'un film un peu sage, un projet formel que je trouve enfin habité. L'ouverture hypnotisante, qui semble nous prendre par la main pour nous amener au fond de la nuit, pour nous faire replonger aux racines intérieures et secrètes de notre ADN européen, résume déjà toute la puissance narrative (jamais départie d'une dimension séductrice, joueuse) que j'adore chez ce cinéaste.

L'intuition plastique est ainsi souvent bonne, elle est juste exploitée trop loin, le fignolage prenant le pas sur la portée des idées. L'image indécise et onirique (à la fois couleur & noir et blanc, toujours mutante par le jeu des rétro-projections) est par exemple une idée brillante ; mais le film la surligne et en gâche l'évanescence, par ses inserts explicites à la Sin City ou ses scènes de rêves lourdingues. Dans le même genre, on pourrait aussi parler de la maîtrise qu'a LVT du scénar... Une trop grande science de l'écriture, comme toujours, qui lui permet de faire passer la pilule de rustines narratives peu inspirées, ou qui pour créer l'oppression ambiante se réfugie parfois dans la facilité d'un petit programme kafkaïen pépère (la scène de l'examen, pénible). Quant à la vision fugitive des camps de la mort, on pourrait franchement s'en passer : le film évoque tellement la chose par toutes ses pores (ne serait-ce que par son décor principal) que ça relève de la provocation de petit con. Au final, tout cela donne parfois le sentiment désagréable que LVT n'est pas tellement concerné par son sujet, et que celui-ci ne lui sert qu'à montrer les muscles.

J'avais lu que LVT trouvait à présent le film ennuyeux, trop maîtrisé, et c'est effectivement un sentiment qu'on partage plusieurs fois, notamment devant des personnages pantins trop univoques (à commencer par le héros tête-à-claque ; heureusement qu'Udo Kier, ou le perso de son père, traînent dans le coin). Mais il y a quand même énormément de potentiel, d'ampleur contenue, de promesses qui en font déjà un film assez passionnant, si l'on veut bien fermer les yeux sur ses longues plages désincarnées, et sur sa perfusion d'influences un peu étouffantes.


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MessagePosté: 29 Mai 2020, 17:26 
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Inscription: 04 Juil 2005, 15:21
Messages: 22885
Localisation: Paris
Quand tu veux voir un film depuis trente ans, forcément tu en attends peut-être un peu trop. Avec son Jean-Marc Barr à tronche d'ahuri, et son alternance aléatoire de couleur et noir et blanc, j'ai eu beaucoup de mal à m'attacher à cette histoire qui part dans tous les sens. Je me demande si ce n'est pas le LVT que j'aime le moins.
1/6

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