Plus personne la suit cette série ?
La saison vient de terminer.
Les 6 derniers épisodes changent assez radicalement la donne : la liberté permise par le monde des esprits désinhibe la série sur de nombreux plans, visuellement et narrativement. Elle devient beaucoup plus fluide et agréable à suivre, inventive et flamboyante, même si c'est souvent au prix du kitsch (qui s'incarne autant dans le kawaï occasionnel que dans une imagerie new age), jusque dans les combats (parfois, les rayons dragon ball Z sont pas loin).
Les ressorts narratifs sont complètement artificiels : la suprématie de l'un sur l'autre tient vraiment à un canevas théorique (on décide soudain que la lumière renaît dans les ténèbres, ou vice-versa, en le justifiant par une pose sévère et une musique soudain sur-lyrique), et pas d'un trajet issu du récit ou des personnages. Là-dessus, la série a définitivement perdu un truc : le seul élément qui rappelle ce fonctionnement antérieur, c'est l'émergence de la figure de Jinora - dont l'arc ne peut malheureusement s'accomplir que sous forme d'un deus ex machina aussi arbitraire que ridicule. Il reste qu'en collant aux basques de cette gamine le temps de quelques épisodes (gamine fragile, inadaptée, mais aussi
en avance sur nous), on se rend compte combien la force de l'ancienne série tenait à l'enfance de ses personnages : l'acceptation d'un univers particulier qu'ils n'ont pas à rationaliser toutes les deux secondes, l'asymétrie des rapports de force, etc. Bien qu'attachante dans son approche physique/matérielle/butée, Korra restera un personnage problématique pour ça.
La saison a beau être auto-suffisante dans ses enjeux, la fin lance des dés assez surprenants pour la suite. On est au moins assurés que la prochaine saison sera différente, et aura quelque chose de nouveau à exploiter. Avec le recul, c'est aussi une réponse assez intelligente au conflit aristocratie/démocratie qui secouait la première saison. De manière générale, malgré leurs faiblesses respectives, les deux saisons fonctionnent très bien ensemble, en complément, dans leurs approches radicalement différentes. On garde cette qualité de la précédente série : cette idée que une saison = une tonalité = un rythme propre = un sujet = une atmosphère, etc.
Globalement, cette saison 2 reste donc plus convaincante (ne serait-ce que par le fait de se concentrer sur un petit groupe de persos souvent coupés du reste du monde, et donc de leur offrir du temps ; et par la réussite des personnages secondaires, également). Mais je pense qu'on a définitivement paumé une qualité de narration en route, et une propension à émouvoir (les larmes discrètes de Bolin dans le dernier épisode en courant, je me dis que dans la série précédente ça aurait été mieux géré que via une petite blague, et que ça aurait été un putain de climax). Aussi flamboyante soit-elle dans la forme, la série est devenue conventionnelle sur ce terrain-là.