This is War (
Severe Clear, Kristian Fraga, 2009)
Un soldat américain a filmé la guerre en Irak, et a monté les rushes (ainsi que ce qu'ont filmé ses amis) pour donner "sa version" (attention point de vue, hein) de la guerre. Ce qui est terrifiant, c'est que j'ai mis une bonne demi-heure à piger que ce n'était pas une fiction... Ce film, en fait, c'est un témoignage ethnographique sur le jeune américain qui devant réagir à n'importe quelle situation ne sait rien faire d'autre que de s'échanger du tac au tac les mêmes 10 mots comme dans les films ("yeah dude, seriously, fuck, you know, i was like "okaaay", crazy, fuck dude"), à l'aise comme devant une caméra à remplir les blancs, qui n'a même pas idée de ce qu'il fout là et qui s'en tape, qui est heureux et fier de s'en taper au nom de sa patrie, puisque comme il le répète il est là "pour défendre la liberté de son pays", et qui observe tout individu croisé comme un petit singe marrant parce qu'il parle pas anglais, le con. C'est tellement incroyablement caricatural, jusqu'aux pseudo-délires entre soldats si photocopiés et clichés qu'ils semblent avoir été achetés en pack, qu'on peine à croire que c'est du matériau pris sur le vif. Faut dire que le "réal" va dans le sens de cette grande démonstration d'aisance, alignant les effets "atttentiooon caméra amaaateur, faux défauts vidéooos rajoutés, montage éclaaaair", chapitrage et dramatisation, et musique ambiance douloureuse en zoomant sur le cerveau d'une petite fille par terre... Le pire, là-dedans, c'est que la question du "eh en fait, y a civil sanglant avec trois membres en moins au bout de mon fusil" est même pas esquivée : non, elle est là, en bonus, comme un des chapitres, "la guerre en fait ça fait des morts, et ça nous travaille". Puis on passe. Annexe quoi. Parce que le plus important, comme il le conclue si solennellement après s'être rendu compte que son gouvernement l'a entubé, c'est qu' "on est les marines". Et bien je suis heureux pour toi, mec.
Hisss (Jennifer Lynch, 2010)
Gros fou rire, après 1h30 de cette ode au direct-to-video, de voir qui en est la réal. Ça commence fort, avec un carton qui te prévient que ne t'inquiètes pas, les serpents sont des faux, aucun animal n'a souffert - comme si le moindre spectateur pouvait croire en la réalité des sfx made in 1990 ou autres pantins en fibres de ver qu'on secoue de la main... Bon j'exagère, c'est très loin d'être si cheap, mais dans le ton c'est vraiment ultra série Z (relativement friquée, mais ça n'empêche pas), où la réal confond mise en scène et "librairie d'effets de final cut", où on sent TROP qu'il manque la moitié des plans et que le monteur a du faire au mieux pour que ça se voit pas, où l'acteur jouant le méchant doit faire des grimaces devant une marionette de serpent pendant 50 plans... Le pire c'est qu'il y a là matière pour une bonne série B honnête, voire motivante : la transformations de la déesse serpent en femme (avec la chorégraphie qui va avec, à la limite dans la métamorphose y a de l'idée), ou l'utilisation de la fête des couleurs en Inde. Mais tout ça c'est sur le papier, parce que pour le reste c'est nanarland. A voir en VF, de préférence, pour compatir au calvaire des doubleurs qui doivent remplir de dialogues les scènes remplissant le vide en filmant les figurants. Big up aux 15 secondes DE LA DOULEUR où les employés du méchant, autour d'un feu de camp, expliquent en continu leur rôle dans le film pour remplir le mouvement des lèvres :
"Ouais, nous on s'en fout, nous on fait ça pour de l'argent" "- T'entends, nous on travaille pour le fric" "- C'est vrai, le fric c'est bien" "- Hahaha, ouais, c'est l'argent qui nous intéresse" "- OUAIS, l'argent, c'est pour ça qu'on est là" ... C'est dans ces moments là où tu te rends compte que 15 secondes, c'est long.